Artisanat menacé à Lola : quand la rareté du coton fragilise les femmes tisserandes

il y a 6 heures 12
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Le 22 novembre 2023, à l’occasion du lancement de la saison touristique dans la préfecture de Lola, au pied des Monts Nimba, une voix a particulièrement retenu l’attention : celle de Kolou Koïvogui, enseignante et aujourd’hui seule femme tisserande reconnue de la région, résidant à N’Zérékoré.

Devant les autorités et les visiteurs, elle a livré un témoignage poignant sur les difficultés rencontrées par les artisans pour se procurer le coton, matière première essentielle au tissage traditionnel.

Kolou Koïvogui raconte avoir découvert le tissage en observant les pratiques ancestrales de sa communauté :
« Avant, ce sont nos parents qui tissaient, et une femme ne pouvait même pas s’approcher du métier de tissage. »

Inspirée par des vidéos de femmes tisserandes à l’étranger, elle décide de se former. En 2017, elle s’initie auprès d’un maître tisserand à N’Zérékoré :
« C’est lui qui m’a tout appris. Lorsqu’il est décédé, il n’y avait plus personne pour poursuivre son enseignement. Je suis restée pour perpétuer le métier. »

Depuis, Kolou forme à son tour de jeunes filles et des femmes désireuses d’apprendre un métier manuel :
« Tout le monde n’a pas la chance d’aller à l’école, ou certaines n’achèvent pas leur parcours. Plutôt que de les laisser sans repères, je préfère les former afin qu’elles puissent, un jour, soutenir leurs parents, leurs maris et leurs enfants. »

Mais cette dynamique est aujourd’hui menacée par un obstacle majeur : la raréfaction du coton.

« L’acquisition de la matière première est un vrai défi pour nous, les tisserands », déplore-t-elle. Cette année, elle a tenté de cultiver un petit champ de coton pour réduire sa dépendance aux fournisseurs extérieurs, sans succès.

En Guinée, aucune production structurée n’existe. À Kankan, les anciennes zones cotonnières sont à l’arrêt :
« On m’a dit que cela fait deux ans que la région ne produit plus », confie Kolou.

Elle s’est alors tournée vers le Burkina Faso, pays historiquement producteur, mais l’exportation du coton brut pour les artisans étrangers est désormais restreinte :
« On m’a dit que ça ne sort plus du pays. Voilà mon souci. »

Kolou Koïvogui appelle la Guinée à développer sa propre filière coton pour soutenir les artisans locaux et préserver les savoir-faire traditionnels :
« Au lieu de dépendre d’autres pays, pourquoi ne pas produire chez nous ? Je tends la main au gouvernement pour nous aider à obtenir les matières premières nécessaires au tissage. »

Son appel intervient alors que les autorités cherchent à promouvoir le tourisme culturel et artisanal autour des Monts Nimba, inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. La relance de la filière coton pourrait devenir un levier de développement pour les femmes rurales, l’artisanat et l’économie locale.

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