Mohamed Tall : « Aucune élection ne peut être envisagée sans la participation de Sidya et Cellou »

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Mohamed Tall, chef de cabinet du président de l'Union des forces républicaines (UFR), Sidya Touré

Dans un entretien exclusif à Guinee360, Mohamed Tall, chef de cabinet du président de l’Union des forces républicaines (UFR), Sidya Touré, dresse un tableau sombre de la situation actuelle en Guinée sous le règne du Comité national pour le rassemblement et le développement (CNRD). L’ancien ministre de l’Élevage évoque son propre exil, la gestion de la transition, les implications du discours du Colonel Mamadi Doumbouya aux Nations-Unies, et les défis liés à l’organisation des prochaines élections présidentielles prévues pour la fin de 2024.

Guinée360.com : Depuis que vous êtes sorti du pays, vous vivez à l’étranger. Comment vivez-vous cet exil ?

Mohamed Tall : C’est toujours amer de vivre en exil, car cela signifie la privation de liberté en ne pouvant pas rentrer chez soi. Cependant, cela ne m’empêche pas de suivre de près l’actualité en Guinée. Je suis conscient que l’exil est difficile pour tout le monde, mais je suis chanceux d’avoir ma famille ici, ce qui atténue quelque peu la douleur de l’exil.

Qu’est-ce qui vous est reproché pour être en exil ?

Actuellement, vivre en Guinée en tant qu’acteur politique qui ne partage pas les opinions du CNRD est devenu risqué. Cela compromet la liberté d’expression, voire la vie. Depuis l’arrivée du CNRD, malgré les promesses de rupture, le régime s’est durci, en particulier envers les acteurs sociopolitiques et toute voix discordante par rapport au CNRD. Je ne suis pas le seul dans cette situation, de nombreux acteurs politiques ont été emprisonnés, contraints à l’exil, ce qui reflète la situation actuelle de notre pays.

Quand prévoyez-vous de retourner en Guinée ?

Dès que les conditions de sécurité seront réunies, et que les acteurs politiques contraints à l’exil auront la possibilité de reprendre leurs activités, je serai impatient de rentrer chez moi.

Comment percevez-vous la situation actuelle en Guinée depuis l’étranger ?

La Guinée est actuellement en danger, sous le contrôle d’une junte militaire dirigée par des individus inexpérimentés et sans formation. Cette junte est malheureusement caractérisée par une extrême violence. Nous assistons à la naissance d’une dictature militaire, et la situation sur le terrain est difficile. Sur le plan social, les tensions s’accumulent, les conflits communautaires ne sont pas apaisés, et sur le plan économique, des scandales financiers éclatent. Le processus électoral est totalement bloqué sur le plan politique, et rien n’a été accompli. Le pays est confronté à une impasse dans un contexte sous-régional très difficile.

Le Premier ministre Bernard Goumou a affirmé qu’aucun homme politique n’était inquiété par le pouvoir en place et que vous étiez libre de rentrer à tout moment. Qu’en pensez-vous ?

Le CNRD et le gouvernement ne sont pas crédibles. Les paroles du Premier ministre n’engagent que lui-même. Les observateurs sont conscients de la réalité actuelle. Depuis l’arrivée du CNRD, de nombreux hommes politiques ont été emprisonnés, placés sous contrôle judiciaire, ou contraints à l’exil pour les empêcher de s’exprimer. Les propos du Premier ministre ne correspondent malheureusement pas à la réalité. Si le CNRD et le gouvernement s’engagent réellement dans la bonne direction, cela devrait se refléter dans leurs actions, et nous devrions voir des changements. Malheureusement, nous n’en sommes pas encore là.

Quel type de changement attendez-vous ?

Il faudrait d’abord créer un cadre de discussion pour permettre aux acteurs politiques d’exercer librement leur métier. Les Guinéens doivent jouir de leurs libertés, garanties et effectives. Actuellement, ces garanties ne sont pas en place. Lorsque nous constaterons que les acteurs politiques peuvent agir librement, que les manifestations sont autorisées sans répression, et que les assemblées générales se tiennent sans entraves, avec un dialogue ouvert entre les acteurs politiques, en particulier les plus importants concernant le cadre institutionnel et juridique des élections, alors nous pourrons dire que la transition évolue positivement.

Le CNRD a célébré ses deux ans au pouvoir le 5 septembre dernier. Quel bilan faites-vous de sa gestion ?

Malheureusement, le bilan est un échec. Les engagements n’ont pas été tenus. Les services publics sont en déclin, l’économie est en souffrance, et le dialogue politique est inexistant. Les libertés sont bafouées. Le CNRD, malgré les espoirs suscités à son arrivée, est une déception pour les Guinéens.

Que pensez-vous du discours du Colonel Mamadi Doumbouya lors de la 78e Assemblée générale des Nations-Unies ?

C’est un discours malheureux qui ternit l’image de la Guinée. On ne devrait pas utiliser la tribune des Nations-Unies pour s’attaquer à la démocratie. Cela démontre une ignorance grave, car les Nations-Unies ont pour mission principale la préservation de la paix et de la sécurité, et la démocratie favorise la paix. Il est absurde de suggérer que l’ONU puisse résoudre les problèmes mondiaux tout en rejetant la démocratie, qui est essentielle à la réussite de sa mission. De plus, l’idée selon laquelle la démocratie serait la cause de la corruption en Afrique est fausse. Le discours de Doumbouya ne présente aucune alternative à la démocratie, ce qui est inquiétant. Sa montée au pouvoir par les armes remet en question la voix de la population et l’importance des élections. Son discours laisse entendre que pour accéder au pouvoir, il faut recourir à la force, ce qui est alarmant.

Doutez-vous de la sincérité du président Mamadi Doumbouya à respecter la durée de transition de 24 mois ?

Il ne fait plus aucun doute que Mamadi Doumbouya a levé tous les doutes possibles lors de son discours aux Nations-Unies. Il a clairement exprimé son intention de s’accrocher au pouvoir, car il rejette la démocratie. Les détails financiers des élections deviennent secondaires à la lumière de sa position anti-démocratique. Il est temps que tous les acteurs nationaux et internationaux tirent les conclusions qui s’imposent. Doumbouya a choisi de confisquer le pouvoir, mais il n’a pas proposé d’alternative démocratique.

Lors du cadre de dialogue, les acteurs ont évoqué la limitation de l’âge des candidats à 70 ans. Votre président Sidya Touré, s’il reste éligible, envisage-t-il de se présenter, et travaillez-vous à trouver son successeur ?

La démocratie exige que ce soient les électeurs qui choisissent leurs dirigeants. L’UFR est un parti où la démocratie est vivante. Nous soutenons notre candidat et leader, Sidya Touré, qui est notre choix volontaire. Si l’UFR décide un jour que Sidya Touré n’est plus le candidat idéal, les militants en décideront. Pour l’instant, il bénéficie de la confiance totale de nos membres. La limitation d’âge pour écarter des candidats n’est pas une pratique démocratique. Les Guinéens devraient pouvoir choisir leurs dirigeants, et ce n’est pas à Mamadi Doumbouya de décider qui peut se présenter.

Envisagez-vous une élection présidentielle en Guinée sans la participation de votre leader et de Cellou Dalein Diallo de l’UFDG ?

Ce sont actuellement les deux principaux leaders en Guinée, et aucune élection ne peut être envisagée sans leur participation. Les écarter serait compliqué, voire impossible.

Si ces deux leaders venaient à être écartés, quel autre politicien considérez-vous comme un bon dirigeant ?

Nous ne sommes pas encore à ce stade, et il est inutile de spéculer. Nous sommes confrontés à une junte militaire qui refuse de céder le pouvoir.

La Guinée célèbre ses 65 ans d’indépendance. Que représente cette date pour vous ?

C’est le symbole de notre indépendance, mais malheureusement, après 65 ans, le bilan est largement négatif. Il est temps pour un sursaut national, pour que les Guinéens réalisent que leur pays peut être autonome et qu’il existe des individus compétents capables de le gérer de manière à améliorer la vie de la population. Notre principal défi est le leadership, et il est temps que les Guinéens comprennent l’importance de choisir des leaders compétents, que ce soit dans l’armée, en politique ou dans la société civile.

Vous avez vu un bain de foule accueillir le Président Mamadi Doumbouya malgré l’interdiction des manifestations. Qu’en pensez-vous ?

C’est une tactique typique des régimes populistes qui n’ont rien à offrir et cherchent à tromper l’opinion publique. Ils mobilisent l’administration avec de l’argent, voire par contrainte, pour donner l’impression d’être populaires. Cependant, les Guinéens sont conscients que le CNRD ne répond pas à leurs attentes, et ils aspirent à un régime responsable qui tienne compte de leurs préoccupations.

Si vous aviez l’opportunité de rencontrer le président de la transition aujourd’hui, que lui diriez-vous ?

Il se peut que ce soit déjà trop tard pour une telle rencontre. Nos points de vue sont très éloignés, et je ne sais pas ce que je pourrais lui dire.

Il y a des rumeurs selon lesquelles Sidya Touré aurait été nommé en Côte d’Ivoire. Est-ce vrai ?

Non, cela n’est pas vrai. Sidya Touré est le président de l’UFR, notre candidat pour les prochaines élections présidentielles en Guinée. Ses ambitions sont nationales, et il se concentre sur son parti et l’avenir de notre pays. Il n’a reçu aucune nomination en Côte d’Ivoire.

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