Me M. Traoré reprécise : « la Guinée comme beaucoup d’autres pays africains, n’ont pas un problème de textes mais un problème de respect de ces textes »

il y a 6 mois 223
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Personne ne peut dire qu’un pays n’a pas besoin de constitution. Mais l’erreur, c’est de croire qu’une constitution serait la panacée.

On peut avoir la meilleure constitution du monde, mais si elle n’est pas respectée, elle ne sert absolument à rien. C’est pourquoi, le président de la République prête serment, notamment, d’une part, de respecter la constitution, et d’autre part, de la faire respecter.

Le Royaume-Uni n’a même pas une constitution écrite ou entièrement écrite. Mais c’est l’un des pays les plus démocratiques au monde. Il y a des pays où la constitution est partiellement coutumière.

En 2020, on avait une constitution qui aurait pu permettre à la Guinée d’avoir, pour la première fois, une alternance démocratique et d’éviter un troisième mandat qui est cité aujourd’hui comme l’un des motifs de la prise du pouvoir par l’armée le 5 septembre 2021.

Une constitution, comme toute œuvre humaine, ne peut être parfaite. C’est pourquoi, il existe une possibilité de révision ou de changement constitutionnel. L’essentiel est que la révision ou le changement de constitution contribue à renforcer la démocratie et à consolider les institutions. Mais si la révision ou le changement de constitution a pour but ou pour effet de satisfaire uniquement les desiderata d’un homme ou d’un groupe d’hommes, c’est la démocratie qui en pâtit. Malheureusement, c’est ce qui s’est passé souvent dans notre pays : en 2001, une révision constitutionnelle en vue de permettre au Général Lansana Conté de briguer un troisième mandat (même si le nombre de mandats ne faisait partie des règles intangibles), et 2020, adoption d’une nouvelle constitution qui permettait au Président Alpha Condé de contourner la règle de la limitation du nombre de mandats.

Encore une fois, la Guinée comme beaucoup d’autres pays africains, n’ont pas un problème de textes mais un problème de respect de ces textes.

Ce qui est le plus important, c’est d’avoir ce qu’on appelle  » l’esprit des lois », le terme « loi » pris ici dans un sens générique. Une loi n’est jamais parfaite; elle peut comporter des lacunes, une maladresse de rédaction, un vide sur certaines questions. Malheureusement, des petits malins, laissent souvent l’esprit d’un texte, pour s’accrocher à des détails qui les arrangent.

En 2020, l’argument phare utilisé par les partisans du changement de constitution était le manque de légitimité de la constitution de 2010 qui n’avait pas été adoptée par voie référendaire. Ce n’était pas faux sur le plan juridique. Mais cet argument n’avait été invoqué très curieusement qu’à l’approche de la fin du second mandat du Président Alpha Condé. Celui-ci avait prêté serment par deux fois sur la base du même texte et n’avait jamais remis en cause sa légitimité. C’est dire qu’on avait mis à profit une « faille », qui pouvait s’expliquer dans le contexte de 2010, pour faire un forcing en engagement un processus de changement de constitution.

Me Mohamed Traoré

Ancien Bâtonnier

Conseiller National

Lire l'article en entier