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Dans cet entretien accordé à Guinée360, l’ancien ministre du Commerce sous Alpha Condé et membre du bureau politique national du RPG Arc-en-ciel, Marc Yombouno, a livré son analyse sur les sujets brûlants de l’actualité politique en Guinée, notamment le recensement électoral, l’organisation des élections et le projet de nouvelle Constitution.Il déplore l’absence de concertation avec les acteurs sociopolitiques, critique la gestion unilatérale du processus électoral, et dénonce ce qu’il considère comme une volonté manifeste d’exclusion. Marc Yombouno appelle aussi à une transition inclusive pour garantir des élections crédibles et transparentes qui seront acceptées par toutes les parties.
Guinée360 : Le gouvernement annonce le démarrage, ce mardi 15 avril, d’un recensement biométrique pour une période de 45 jours, après avoir abandonné le RAVEC. Quelle est votre réaction à ce sujet ?
Marc Yombouno : Nous attendons de voir, car nous ne sommes pas impliqués dans ce processus. Traditionnellement, l’État associait les acteurs sociopolitiques aux questions liées au processus électoral. Mais cette fois-ci, tout se passe uniquement à l’initiative de l’État. Nous sommes informés par voie de presse, notamment via la RTG. Concernant l’abandon du RAVEC, nous l’avions déjà anticipé et signalé depuis son lancement. Les Forces vives avaient démontré que ce mécanisme ne permettrait pas d’obtenir, à court terme, un fichier électoral fiable pour un retour à l’ordre constitutionnel. Cela aurait pris entre cinq et sept ans. Même au Sénégal, le processus lié au RAVEC n’est pas encore achevé. Il était donc évident qu’on allait vers un blocage. Finalement, les autorités l’ont reconnu tardivement. Aujourd’hui, elles changent de stratégie et annoncent une opération de recensement express en 45 jours.
Pensez-vous que 45 jours suffisent pour un tel exercice ?
Si c’est une simple révision du fichier électoral, c’est faisable. Le fichier électoral de 2020 avait été révisé et assaini par la CENI, l’État guinéen et les partenaires techniques. Nous avons toujours dit, depuis le début de la transition, qu’il serait judicieux de s’appuyer sur ce fichier existant et, comme le prévoit la loi électorale, d’ouvrir une période de révision avant les élections. Mais si l’objectif est de créer un nouveau fichier, alors c’est problématique. Il n’y a aucune précision à ce sujet, et aucun groupe d’experts neutres n’est en place pour superviser. Nous nous contenterons donc de constater le résultat.
Le Premier ministre a évoqué récemment la possibilité de coupler la présidentielle avec les législatives. Voyez-vous une volonté réelle de retour à l’ordre constitutionnel cette année ?
Nous avons toujours dénoncé cette approche unilatérale, consistant à écarter les acteurs sociopolitiques des décisions importantes, même lorsqu’il s’agit de l’avenir démocratique du pays. Rappelez-vous, le chronogramme de 10 points sur 24 mois a été conçu entre le gouvernement guinéen et la CEDEAO, sans aucune participation des acteurs politiques guinéens. Aujourd’hui encore, les annonces liées au processus électoral se font sans consultation. La CEDEAO semble satisfaite, mais nous, nous ne sommes pas impliqués.
Selon vous, que risquons-nous si les acteurs politiques ne sont pas associés à ce processus ?
Si le but est d’instaurer une bonne gouvernance, de corriger les erreurs du passé et de bâtir un État fort avec des institutions crédibles, alors il faut renforcer les organes existants. Je pense notamment à l’organe de gestion des élections. Or, cet organe n’existe pas encore. Des décisions sont prises à sa place, alors qu’il devrait être le moteur du processus électoral. Nous n’avons pas non plus de code électoral structuré qui définit clairement l’organisation des scrutins, la gestion des contentieux, etc. Malgré cela, on forme déjà des agents recenseurs sans l’implication des partis politiques. Pourtant, dans une transition, tout le monde devrait être associé. Cela garantit un processus inclusif, apaisé et crédible.
Le ministère de l’Administration du territoire devrait organiser les élections. Cela vous semble-t-il crédible ?
Encore une fois, cette décision a été prise sans concertation avec les principaux acteurs politiques. Est-ce une stratégie pour écarter certains acteurs ? En politique, on dit souvent que lorsqu’on n’est pas associé à un processus, c’est qu’il est dirigé contre nous. Le pouvoir devait associer toutes les sensibilités pour asseoir une base solide. Organiser les élections de manière unilatérale risque de créer des frustrations et de nouvelles revendications. La suite nous le dira.
L’avant-projet de la nouvelle Constitution fixe l’âge minimal pour être candidat à la présidentielle à 40 ans, et l’âge maximal à 80 ans. Quel regard portez-vous sur cette disposition ?
Encore une fois, nous n’avons pas été associés à ce processus. Aucune structure politique, à ma connaissance, ne détient une copie de cet avant-projet. Nous n’avons vu ni le document ni son contenu. Ce sont des informations qui circulent de manière informelle.
Vous y voyez une volonté d’exclure certains acteurs politiques ?
Si cela se confirme, oui, ce serait une volonté claire d’exclure une partie de la classe politique. Les grandes démocraties que nous prenons en exemple, comme les États-Unis, n’imposent pas de telles limites. Un jeune de 35 ans dynamique et compétent peut se présenter, tout comme une personne de 80 ans si elle est encore en pleine capacité. Ces critères devraient faire l’objet de débats inclusifs. Car vouloir imposer des barrières de cette nature sans discussion ni transparence, c’est encourager l’exclusion.
Le RPG arc-en-ciel ne tient plus ses assemblées depuis la menace brandie par le Haut commandement de la gendarmerie. Avez-vous décidé de ne pas aller en confrontation avec les autorités?
Le RPG n’est pas un parti violent. C’est un parti républicain qui a toujours donné l’exemple à tous les niveaux. Nous avons analysé la situation, nous avons réfléchi, et après de longues discussions, nous avons pris cette décision, même si les militants faisaient valoir que les assemblées se tenaient dans les enceintes du parti, et non sur la voie publique. Mais nous avons réussi à les sensibiliser sur les risques de tensions et l’impact possible sur la stabilité. C’est ainsi que nous avons décidé, dans un esprit de responsabilité, de suspendre les activités internes du parti.
L’article Marc Yombouno : “Les décisions liées au processus électoral se font sans consultation…” est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.