Guinée : le retour à l’ordre constitutionnel déjà biaisé ?

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Si l’on se réfère aux engagements pris par les autorités de la transition, en particulier par le président Mamadi Doumbouya, le pays devrait renouer avec un ordre constitutionnel d’ici la fin de l’année, à travers l’organisation d’élections. Mais ce retour annoncé à la normalité institutionnelle soulève une question essentielle : se fera-t-il dans le respect des principes démocratiques ?

Cette interrogation est d’autant plus pertinente que plusieurs signaux inquiètent observateurs et acteurs politiques. Beaucoup estiment que les conditions d’un processus électoral libre, inclusif et transparent ne sont pas encore réunies.

L’un des griefs majeurs porte sur la centralisation du pouvoir au sommet de l’État. Actuellement, toutes les communes rurales et urbaines sont dirigées par des délégations spéciales nommées par décret présidentiel, en lieu et place de conseils élus. En outre, les huit gouverneurs de région, les 33 préfets et l’ensemble des sous-préfets sont issus des rangs des forces de défense et de sécurité.

“Sachez que le CNRD, c’est l’ensemble des forces de défense et de sécurité : la gendarmerie, l’armée de terre, l’armée de l’air, la marine, les corps des conservateurs de la nature et la police. Maintenant, si vous voulez connaître les têtes pensantes du CNRD, une liste vous sera livrée très bientôt”, avait déclaré le général Aminata Diallo lors de la première conférence de la junte en septembre 2021.

Ce mode de gestion alimente les craintes quant à l’impartialité de l’administration dans la conduite du processus électoral.

Le climat politique est également marqué par des prises de position publiques en faveur d’une éventuelle candidature du président de la transition, bien que celui-ci n’ait pas encore déclaré ses intentions.

Lors d’une conférence de presse tenue le 5 mars 2025, le Premier ministre Bah Oury a exprimé son alignement avec le président de la transition : “Le Général Doumbouya, en fonction de ce qui sera adopté par la Constitution, s’exprimera pour dire s’il est candidat ou non. Mais vous ne pouvez pas ignorer que le Premier ministre sera en phase avec le président de la République. Il faut que vous le sachiez.”

Quelques semaines plus tôt, le 1er février, lors d’un grand rassemblement de soutien tenu à Kankan, le ministre secrétaire général de la présidence, le général Amara Camara, avait été encore plus explicite : “La candidature prochaine du président Mamadi Doumbouya est la seule alternative pour garantir l’unité des Guinéens et poursuivre l’élan de développement amorcé. Si vous souhaitez qu’il soit candidat, vous êtes les seuls à pouvoir le fédérer, et il vous écoutera.”

Autre sujet de préoccupation : l’organisation des élections incombera au ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation (MATD), dirigé par un ministre nommé par le président Doumbouya. Ce détail institutionnel devient d’autant plus sensible dans un contexte où de nombreux administrateurs et membres du gouvernement affichent ouvertement leur soutien à une candidature du chef de la transition. Le foisonnement de mouvements de soutien, souvent portés par des personnalités ministérielles, renforce cette impression d’un processus verrouillé.

Alors que le référendum constitutionnel est prévu pour le 21 septembre 2025, ces signaux contradictoires nourrissent un climat de méfiance et laissent planer un doute sur la sincérité de la transition. La promesse initiale d’une phase neutre, temporaire et apolitique semble aujourd’hui remise en question.

Eu égard aux situations évoquées ci-dessus, il est important de souligner qu’à moins de six mois de l’échéance, le respect des standards démocratiques sera déterminant pour asseoir la légitimité du futur ordre constitutionnel. Faute de garanties solides, ce retour à la légalité pourrait être perçu comme une reconduction du pouvoir par d’autres moyens.

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