Les dirigeants mondiaux doivent relancer la coopération internationale pour aujourd’hui et demain [Antonio Guterres, SG ONU]

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Les négociations à New York sont dans la dernière ligne droite, avant la tenue ce mois-ci du Sommet de lavenir, au cours duquel les chefs dÉtat conviendront des réformes à mener en ce qui concerne les piliers de la coopération mondiale.

Si lOrganisation des Nations Unies a convoqué ce Sommet unique en son genre, cest parce quil faut voir la réalité en face : les problèmes mondiaux évoluent plus vite que les institutions conçues pour trouver des solutions.

Il ny a quà regarder autour de nous. Les conflits féroces et la violence infligent de terribles souffrances ; les divisionsgéopolitiques se multiplient ; les inégalités et linjustice sont partout, minant la confiance, aggravant les griefs et alimentant le populisme et lextrémisme. Les défis séculaires que sont la pauvreté, la faim, les discriminations, la misogynie et le racisme prennent de nouvelles formes.

Dans le même temps, nous sommes aussi confrontés à de nouvelles menaces existentielles, quil sagisse de lemballement du chaos climatique et de la dégradation de lenvironnement ou des technologies telles que lIntelligence artificielle, qui se développent dans un vide éthique et juridique.

Le Sommet de l’avenir reconnaît que les solutions à tous ces défis sont entre nos mains. Mais nous avons besoin d’une mise à jour des systèmes que seuls les leaders mondiaux peuvent apporter.

Le processus décisionnel international est figé dans le temps. De nombreuses institutions et outils mondiaux sont le produit des années 1940 avant la mondialisation, avant la décolonisation, avant que les droits humains universels et le principe de légalité des genres aient été consacrés, avant le premier vol humain dans lespace sans parler du cyberespace.

Les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale conservent leur prééminence au sein du Conseil de sécurité de lOrganisation des Nations Unies, alors que lensemble du continent africain ne dispose même pas dun siège permanent. Larchitecture financière mondiale pèse lourdement sur les pays en développement et ne leur offreaucun filet de sécurité lorsquils rencontrent des difficultés, les laissant crouler sous les dettes, quils sont contraints de rembourser au lieu de pouvoir investir pour leur population.

En outre, les institutions mondiales n’offrent que peu de place à de nombreux acteurs majeurs du monde actuel, qu’il s’agisse de la société civile ou du secteur privé. Les jeunes, qui hériteront de l’avenir, sont presque invisibles, tandis que les intérêts des générations futures ne sont pas représentés.  

Le message est clair : il est impossible de bâtir un avenir digne de nos petits-enfants dans le carcan dun système construit pour nos grands-parents. Le Sommet de lavenir sera loccasion de relancer la collaboration multilatérale pour ladapter au XXIe siècle.

Entre autres solutions, nous avons proposé un Nouvel Agenda pour la paix, axé sur la modernisation des institutions internationales et des outils de prévention et de règlement des conflits, y compris le Conseil de sécurité des Nations Unies. Le Nouvel Agenda pour la paix appelle à redoubler d’efforts pour débarrasser notre monde des armes nucléaires et autres armes de destruction massive, et à lélargissement de la définition du concept de sécurité pour englober les violences de genre et la violence des gangs. Il tient aussi compte des menaces qui pèseront sur la sécurité à lavenir, compte tenu de lévolution des conflits et des risques que pourrait poser la militarisation des nouvelles technologies. Nous devons par exemple conclure un accord mondial pour interdire les armes autonomes létales, qui peuvent décider de la vie ou de la mort dautrui sans intervention humaine.

Les institutions financières mondiales doivent refléter le monde daujourdhui et être dotées des moyens nécessaires pour mieux répondre aux défis contemporains : dette, développement durable, action climatique. Il faut donc prendre des mesures concrètes pour lutter contre le surendettement, accroître les capacités de prêt des banques multilatérales de développement et modifier leur modèle économique afin que les pays en développement aient un accès beaucoup plus large aux financements privés à des taux abordables.

Sans ces financements, les pays en développement ne seront pas en mesure de répondre à la plus grande des menaces : la crise climatique. Ils ont besoin de ressources de toute urgence pour passer des combustibles fossiles, qui détruisent la planète, à des énergies propres et renouvelables.

Et comme les leaders mondiaux lont souligné lannée dernière, la réforme de larchitecture financière mondiale est également essentielle afin d’accélérer les progrès vers les Objectifs de développement durable dont notre monde a désespérément besoin.

Le Sommet se penchera également sur les nouvelles technologies ayant un impact mondial, en cherchant des moyens de réduire la fracture numérique et d’établir des principes communs pour un avenir numérique ouvert, libre et sûr pour tout le monde.

LIntelligence artificielle est une technologie révolutionnaire dont nous commençons à peine à entrevoir les applications et les risques. Nous avons présenté des propositions spécifiques pour que les gouvernements, les entreprises technologiques, les universités et la société civile travaillent sur des cadres de gestion des risques liés à l’IA, sur le suivi et l’atténuation de ses effets néfastes, ainsi que sur le partage de ses bénéfices. La gouvernance de lIA ne peut être laissée aux riches ; tous les pays doivent y participer et lOrganisation des Nations Unies est prête àrassembler tout le monde.

Les droits humains et légalité des genres représentent le fil conducteur de toutes ces propositions. Le processus décisionnel mondial ne peut être réformé que dans le respect de lensemble des droits humains et de la diversité culturelle, en garantissant la pleine participation et le leadership des femmes et des filles. Nous demandons de nouveaux efforts pour supprimer les barrières historiques juridiques, sociales et économiques qui excluent les femmes du pouvoir.

Les artisans de la paix des années 1940 ont créé des institutions qui ont permis dempêcher léclatement dune troisième guerre mondiale et ont accompagné de nombreux pays de la colonisation à lindépendance. Mais ils ne reconnaîtraient pas le paysage mondial daujourdhui.

Le Sommet de lavenir est loccasion de mettre en place des institutions et des outils de coopération mondiale plus efficaces et plus inclusifs, qui soient adaptés au XXIe siècle et à notre monde multipolaire.

J’invite les dirigeants à saisir cette chance.

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