Satire à vue- Canossa sur Potomac [Par Top Sylla]

il y a 4 heures 25
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La Maison Blanche, comme chacun le sait, est la résidence, le lieu de travail et de réception de tous les présidents américains depuis John Adams en 1800. À l’image de l’Élysée en France, ou des palais de Koulouba (Mali), Kossyam (Burkina Faso) et Roume (Sénégal). Chez nous, en Guinée, comme d’habitude on se distingue : le siège de la plus haute institution de la République porte le nom de son premier président. Fait rarissime, voire inédit dans le monde. Mieux ou pire, depuis 2021, ce qui tient lieu de palais présidentiel honore quant à lui… un ancien souverain étranger !

En 2025, la Maison Blanche évoque un peu ce château de Canossa où, voici près d’un millénaire, un empereur tremblait dans la neige pour implorer le pardon papal. Aujourd’hui, ce sont des présidents venus, entre autres, d’Ukraine, d’Afrique du Sud, puis du Liberia, du Gabon, du Sénégal, de la Guinée-Bissau et de la Mauritanie qui font le pèlerinage. Sans marcher pieds nus dans la neige, heureusement, mais le cœur battant parfois la chamade.
Des visites officielles ? Disons plutôt des parcours du combattant diplomatiques. Sous le regard condescendant du maître des lieux, Donald Trump himself, ces chefs d’État rivalisent d’humilité, tel un pénitent sollicitant la miséricorde. On imaginerait presque un écriteau à l’entrée : « Prière de déposer son orgueil ici ».

Ce mini-sommet africain nourrit les médias et les réseaux sociaux, où certains se délectent à moquer nos pauvres dirigeants. Trump, homme d’affaires avant tout, vante les « incroyables richesses naturelles » de ces pays, tout en brandissant la carotte d’exemptions douanières enrobée d’un bâton bien palpable. Un tango où le leader africain doit montrer patte blanche, ou plutôt, comme le Libérien Joseph Boakai, s’exprimer « dans un anglais impeccable », méritant un satisfecit quelque peu surprenant. Subtile démonstration de qui mène la danse ? Ou simple compliment ? Car maîtriser la langue officielle de son pays n’est pas toujours acquis, le président sénégalais Diomaye Faye en sait certainement quelque chose.

La diplomatie trumpienne ressemble à une partie de poker où l’on bluffe en gardant son sérieux, sauf que l’hôte semble oublier que ses invités connaissent aussi les règles. Eux ont joué le jeu, multipliant les éloges : ses talents de golfeur, son génie de faiseur de paix « digne d’un Nobel ». On aimerait bien avoir, à propos, l’avis des populations martyrisées de Gaza, ou celui des mollahs iraniens qui ont lancé une fatwa contre l’occupant de la Maison Blanche.

La rencontre avec Ramaphosa, quant à elle, aurait pu être intitulée « Tensions à la Truman Show » : des accusations sans fondement, projection d’images et des rapports de force intenses. Zelensky, quant à lui, connaît parfaitement le scénario, alternant supplique, promesses floues et pression psychologique.

Un nouveau sommet entre le président Trump et ses homologues africains (mais pas ses égaux ?) se profile à l’horizon de septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies. En attendant, ces visites prennent des allures de « Canossas modernes » revisitées au bord du fleuve Potomac : plus de neige à fouler, car le tapis du Bureau est trop precieux, mais le même ballet d’allégeance contrainte. Les dirigeants africains, tous en costumes impeccables, défilent comme sur une scène de théâtre, sourires figés sous l’éclat des flashs, encaissent les piques présidentielles, et repartent en espérant glisser dans leurs valises un trésor diplomatique, ou, à défaut, prendre date dans l’espoir d’une « déclaration commune avantageuse » qui brille autant qu’un mirage.
Top Sylla

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