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Depuis l’indépendance, l’Afrique a adopté des modèles démocratiques inspirés de l’Occident. Pourtant, nos sociétés disposaient déjà de systèmes traditionnels de gouvernance basés sur le consensus, la consultation des sages, la primauté de la communauté sur l’individu et la cohésion sociale. Pourquoi, alors, nos démocraties modernes produisent-elles instabilité, violences électorales et crises de légitimité ?
I. Démocratie africaine traditionnelle : un modèle enraciné dans la culture
Dans l’Empire du Mali, la Charte de Kurukan Fuga au XIIIe siècle organisait la société sur la base de :
La dignité humaine et la solidarité
La consultation des clans et des sages
La régulation des pouvoirs pour l’équilibre social
Au Fouta Djallon, le royaume théocratique fonctionnait sur :
L’élection de l’Almamy parmi les érudits religieux
Le conseil des sages (Jama’atou) qui contrôlait et limitait le pouvoir
La primauté de la religion et de la moralité publique
II. De 1958 à nos jours : la démocratie importée et ses limites
Depuis l’indépendance, la Guinée a adopté un modèle de gouvernance inspiré du socialisme puis du libéralisme occidental. Toutefois :
- Les valeurs culturelles et religieuses sont restées dominantes (famille, islam, respect des anciens)
- Les institutions modernes (multipartisme, élections) peinent à asseoir leur légitimité populaire
- La démocratie reste souvent réduite à des élections, sans réelle culture participative ou consensus communautaire
III. Pourquoi les élections en Afrique sont-elles souvent violentes ?
1. Causes profondes
- Faible culture démocratique : le vote est vu comme un combat pour accéder aux ressources publiques plutôt qu’un choix de projet de société.
- Ethnicisation de la politique : l’appartenance ethnique prime sur l’idéologie, alimentant rivalités et violences.
- Institutions faibles ou partisanes : conseils électoraux, justice et forces de sécurité manquent d’indépendance, sapant la confiance citoyenne.
- Manipulation des jeunes vulnérables : chômage et pauvreté en font des instruments faciles de violences politiques.
- Discours haineux impunis : les propos ethnicistes et violents exacerbent les tensions avant, pendant et après les scrutins.
2. Conséquences
- Perte de confiance dans la démocratie
- Polarisation sociale et ethnique accrue
- Instabilité politique et crises répétitives
IV. Construire une démocratie africaine contextualisée et enracinée
Pour sortir de cette impasse, l’Afrique doit créer sa propre démocratie, non comme une copie de l’Occident, mais comme une synthèse intelligente de ses valeurs traditionnelles et des principes modernes de droits humains.
Composantes clés :
- Participation communautaire renforcée : impliquer conseils d’anciens, chefs coutumiers et religieux dans la gouvernance locale.
- Consensus plutôt que majorité brutale : privilégier la concertation pour éviter l’exclusion et la violence.
- Protection des droits fondamentaux adaptée : garantir les droits de tous, y compris des minorités, avec une stratégie éducative et graduelle respectant la sensibilité religieuse et culturelle.
- Justice ancrée culturellement : intégrer la médiation coutumière et la justice communautaire dans le système judiciaire, tout en les adaptant aux normes d’équité et de droits humains.
- Éducation civique contextualisée : enseigner la démocratie en s’appuyant sur l’histoire africaine (Kurukan Fuga, palabres, gouvernance communautaire) pour renforcer l’adhésion populaire.
V. Conclusion
La violence électorale en Afrique n’est pas une fatalité. Elle est le symptôme d’une démocratie importée, déconnectée des réalités culturelles et communautaires. Construire une démocratie enracinée, inclusive et pacifique nécessite :
- Une vision panafricaine contextualisée
- Des institutions fortes et crédibles
- Une culture politique basée sur la moralité, la sagesse et l’équilibre social
“La démocratie africaine de demain ne sera forte et durable que si elle est créée par nous, pour nous, enracinée dans nos valeurs et ouverte aux droits universels.”
Mohamed Chérif Touré