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À l’heure où notre nation s’apprête à tourner une page cruciale de son histoire politique, il est légitime que les voix s’élèvent, les idées s’opposent, et les convictions se confrontent. Toutefois, encore faut-il que ces débats s’inscrivent dans une logique d’objectivité, de vérité et de responsabilité. C’est dans cet esprit que je souhaite répondre fraternellement à Monsieur Ibrahima Diallo,acteur connu du FNDC, qui dans une tribune intitulée « Les 7 raisons fondamentales opposables à la candidature de Mamadi Doumbouya », formule une série d’arguments visant à délégitimer par avance toute velléité de candidature de l’actuel président de la République. En tant que citoyen, je respecte sa liberté d’opinion, mais il me semble nécessaire d’y apporter des opinions alternatives, fondées sur des arguments, à la lumière du droit, de la réalité guinéenne, de l’évolution politique et surtout du rôle central du peuple souverain. Voici une réponse structurée à chacune des sept raisons invoquées.
1. Le renversement d’Alpha Condé, une rupture pour refonder, pas une promesse restrictive
Il est exact que Mamadi Doumbouya et le CNRD ont mis fin au régime d’Alpha Condé au motif de restaurer l’ordre constitutionnel. Toutefois, prétendre que cet acte empêcherait à jamais celui qui l’a posé d’exercer ses droits politiques relève d’un raccourci. Le 5 septembre n’était pas une promesse de renoncement à vie, mais un acte de rupture contre une dérive constitutionnelle, une gouvernance accaparée et une confiscation du pouvoir par un troisième mandat imposé.
En réalité, cette rupture a permis de restaurer l’espoir d’un État impartial, d’ouvrir le champ des réformes, de rebâtir les institutions, et de jeter les bases d’une nouvelle République. Si demain le peuple souverain, dans un processus libre et ouvert, estime que General Mamadi Doumbouya est apte à poursuivre ce travail, pourquoi faudrait-il l’en empêcher au nom d’un événement qui visait précisément à remettre le peuple au cœur du jeu politique ?
La réponse à cette question, nous édifie que s’il venait à se porter candidat après une transition achevée et un retour à la légalité constitutionnelle, il ne s’agirait nullement d’une contradiction, mais d’un exercice de droit citoyen rendu possible par la refondation engagée.
2. L’engagement solennel, un serment évolutif dans un contexte politique mouvant
L’argument du serment prêté par le Président de la Transition, aussi solennel soit-il, ne peut être placé au-dessus du droit fondamental de tout citoyen guinéen de participer à la vie politique de son pays. Les engagements de transition ont une portée morale et contextuelle, mais ils ne sauraient confisquer le droit des peuples à choisir librement leurs dirigeants.
Cependant, tout engagement politique n’est pas gravé dans le marbre. La politique n’est pas une mécanique figée, elle obéit aux besoins du moment, à l’évolution du contexte et surtout à l’appel du peuple. Si, au terme d’une transition réussie, des millions de citoyens estiment que celui qui a initié cette refondation doit continuer à la conduire, cela relèverait d’un choix démocratique et non d’un parjure.
D’ailleurs, d’autres transitions en Afrique (Tchad, Burkina Faso, Soudan, Mali) ont vu évoluer les positions initiales en fonction des réalités du terrain. Ce n’est pas l’exception guinéenne qu’il faut dénoncer, mais la capacité à assumer avec lucidité la complexité du réel.
3. La Charte de la Transition, un texte transitoire, non un contrat à perpétuité
Effectivement, la Charte de la Transition mentionne la non candidature des membres du CNRD. Néanmoins, cette charte n’est ni une Constitution, ni un pacte irrévocable. Elle est un texte temporaire, destiné à encadrer une période exceptionnelle jusqu’à l’adoption d’une nouvelle Constitution. Or, ce que la Guinée s’apprête à faire. Dès lors, si le peuple adopte une nouvelle Constitution sans clause d’exclusion explicite, la Charte devient caduque, cela signifie que la page de la transition est bel et bien tournée, et que chacun peut participer à la vie publique dans le respect des nouvelles règles. Ce débat ne relève donc pas d’une trahison, mais d’une clarification juridique et politique.
Par ailleurs, dans un État démocratique, seul le suffrage universel peut valider ou invalider une ambition politique. Il ne revient pas à des engagements d’étape de substituer leur force morale à la volonté populaire exprimée dans les urnes.
4. La légitimité d’une Constitution ne dépend pas d’une candidature, mais de la souveraineté populaire
L’argument selon lequel la candidature de Président Mamadi Doumbouya entacherait la légitimité du texte constitutionnel, il mérite d’être relativisé. Car ce n’est pas l’identité d’un candidat qui fonde ou discrédite un texte constitutionnel, mais la participation populaire à son élaboration, sa clarté, son ambition républicaine, et la sincérité des consultations. Refuser à un citoyen le droit de se porter candidat sous prétexte qu’il a dirigé la transition, c’est juger le processus sur des intentions et non sur des faits. Ce serait aussi supposer que le peuple est incapable de faire la part des choses, alors même que c’est à lui qu’il revient d’apprécier librement les candidatures.
Réduire la crédibilité d’un texte à une seule hypothèse politique est une manière de détourner le débat des vrais enjeux, quels sont les droits et libertés garantis ? Quelle séparation des pouvoirs ? Quelle place pour la jeunesse, les femmes, les régions, les partis ? C’est là que se joue la légitimité d’un texte fondamental.
Et puis, pourquoi redouter une compétition ouverte ? Si les forces politiques du FNDC ou d’ailleurs estiment avoir une vision plus convaincante que celle du CNRD, qu’elles se présentent et la défendent devant les citoyens.
5. Le respect de la parole donnée, oui, mais jamais au détriment de l’intérêt national
Le respect de la parole est une valeur sacrée, c’est indéniable. Mais il convient aussi de reconnaître que la grandeur réside parfois dans la capacité d’adapter ses engagements aux réalités nouvelles. Un proverbe mandingue dit aussi : « Si ton engagement devient un piège pour ta communauté, il faut savoir parler de nouveau »
La politique n’est pas l’art de rester figé dans une position, mais celui de faire évoluer ses décisions pour mieux servir le peuple. Général Mamadi Doumbouya n’a, à ce jour, trahi aucun engagement, il n’a pas manipulé les institutions, il n’a pas changé la Charte en cours de transition pour s’octroyer des privilèges. Il prépare un retour à l’ordre constitutionnel, et il revient au peuple et au peuple seul de dire s’il peut ou non poursuivre.
L’histoire regorge de leaders qui, confrontés à l’appel du devoir ou à une exigence populaire forte, ont su reconsidérer leurs positions. Et cela ne les a pas rendus moins honorables. Le respect de la parole est important, mais il ne doit pas devenir une prison morale lorsqu’il s’agit de répondre à une aspiration nationale.
6. L’honneur d’un homme ne se mesure pas à une renonciation, mais à son bilan et à sa vision
Certains redoutent une perte de confiance du peuple si Mamadi Doumbouya changeait d’avis. Or, à observer la réalité du terrain, de nombreux Guinéens voient en lui une figure de stabilité, d’ordre et de rupture avec les pratiques anciennes. Ce soutien populaire réel ne peut être ignoré. La confiance ne se décrète pas, elle se mesure dans les actes. Et pour beaucoup, Général Mamadi Doumbouya a apporté de la dignité à l’État, un certain apaisement sécuritaire, et une volonté de rupture saluée, même au-delà des clivages politiques.
Ce que les Guinéens respecteront demain, ce n’est pas qu’il ait renoncé à se porter candidat ou non. Ce qu’ils retiendront, c’est, a-t-il fait avancer la Guinée ? A-t-il lutté contre la corruption ? A-t-il remis l’État debout ? A-t-il redonné confiance à l’administration, à l’armée, à la jeunesse ?
Le prestige politique, dans nos sociétés, ne vient pas seulement de la parole donnée, mais aussi de l’œuvre accomplie. Nul ne doute que Président Mamadi Doumbouya ait posé les bases d’un renouveau institutionnel. S’il décidait demain de solliciter un mandat, ce serait à la lumière de cette œuvre que le peuple jugerait, et non par simple attachement à une promesse faite dans une période exceptionnelle.
7. Les erreurs du passé doivent inspirer la vigilance, pas nourrir la peur
Enfin, l’argument de l’histoire et des précédents dramatiques est sérieux. Mais toute analogie a ses limites. Comparer General Mamadi Doumbouya à Moussa Dadis Camara ou à Alpha Condé, c’est faire abstraction des différences de contexte, de posture, de méthode et de vision. Le premier a sombré dans l’improvisation, le second dans l’obsession du pouvoir.
En revanche, le chef de la transition actuelle a conduit une gouvernance sans culte de la personnalité, sans répression massive, sans enrichissement ostentatoire.
Il a permis aux Guinéens de reparler de Constitution, de justice, de souveraineté, de réforme de l’État. Reproduire les erreurs du passé serait effectivement suicidaire, mais empêcher un homme d’État de servir par crainte des fantômes d’hier serait tout aussi contre-productif. Le passé doit éclairer le présent, pas l’entraver, car le risque d’instabilité ne vient pas d’une candidature en soi, mais du refus de reconnaître la légitimité des règles du jeu démocratique. Si les institutions sont fortes, si les élections sont libres et crédibles, alors tout candidat a le droit de se présenter, sans menace pour la paix.
En conclusion, le débat sur une éventuelle candidature du président de la transition ne doit pas être verrouillé par des interdits moraux unilatéraux. Il doit être ouvert, pluraliste, et tranché par les urnes. C’est cela, la démocratie, un régime dans lequel le peuple choisit, sans injonction, sans exclusion, sans intimidation. Personne ne doit se sentir dépossédé de ses droits civiques, y compris General Mamadi Doumbouya, si les Guinéens estiment qu’il peut poursuivre son œuvre à la tête du pays.
La vraie question n’est pas « A-t-il promis de ne pas se présenter ? »
Mais plutôt « Est-il le mieux placé pour diriger la Guinée demain, dans la paix, la justice et la stabilité ? »
À cette question, seule la voix du peuple apportera la réponse, dans les urnes.
Opposer une interdiction morale rigide à une éventuelle volonté populaire reviendrait à nier l’essence même du suffrage universel.
Or, la vraie démocratie ne consiste pas à empêcher des candidatures, mais à garantir des élections libres.Laissons les Guinéens choisir.
Par : YAKOUBA DEVA KONATE
Membre du Collectif Un Pour Tous Pour Un
L’article En face de la critique, la conscience : réponse citoyenne aux 7 raisons opposées à la candidature du Général Mamadi Doumbouya (Par Yacouba Konaté) est apparu en premier sur Mediaguinee.com.