PLACEZ VOS PRODUITS ICI
CONTACTEZ [email protected]

Dans un entretien accordé à Guinée360 le vendredi 11 juillet et initialement prévu pour publication le dimanche 13 juillet, une voix engagée dans la vie politique nationale a réagi à la signature du pacte d’entente nationale pour la paix et la cohésion sociale, conclu entre les autorités coutumières et le gouvernement. Si l’intention est saluée, l’interviewé estime que l’initiative restera sans effet réel sans un respect strict des engagements pris et une priorité donnée à l’intérêt général, au-delà des calculs politiques. Le samedi, cette personne a contacté notre rédaction pour demander la non-publication de l’interview, évoquant des menaces reçues. Par souci de sécurité, Guinée360 a choisi de diffuser cet échange sous anonymat. Nous l’appelons “l’interviewé et remplaçons sa photo par une image lors de la signature du Pacte.
Guinée360 : Que pensez-vous de la signature du pacte d’entente nationale par les autorités coutumières et le gouvernement ?
Interviewé : C’est très beau de mettre de jolis discours sur le papier. C’est très beau de rédiger une constitution à la mesure d’un homme. C’est très beau de parler de paix. Mais il faut comprendre que la paix n’est pas un mot, c’est un comportement. Elle se manifeste par des actes concrets. Pendant qu’on parle de paix, des innocents croupissent en prison. Pendant qu’on parle de paix, certaines personnes sont arrêtées et conduites vers des destinations inconnues. Pendant qu’on parle de paix, la justice ne joue pas son rôle. Dans un tel contexte, au lieu de parler simplement de pacte de paix, d’unité ou de cohésion, tout cela doit se traduire par des actes tangibles. Nous voyons bien ce qui se passe aujourd’hui en Guinée : la justice reste indifférente face à certaines situations. On peut même dire qu’elle est déjà morte. Sinon, dans un pays en difficulté, ce sont les avocats qui doivent hausser le ton pour dire non. Tout récemment, on a vu ce qui est arrivé à l’ancien bâtonnier de la République. Il est temps de sortir de ce marasme, d’arrêter de rédiger de beaux discours pour séduire l’opinion nationale et internationale, et enfin poser des actes concrets.
Ce pacte peut-il, selon vous, avoir un impact concret sur la cohésion sociale en Guinée ?
À l’allure où vont les choses, ce pacte n’aura aucun sens. Ce ne sont pas les écrits qui comptent, mais les actes posés sur le terrain. Avant même de parler de ce pacte, où sont Foniké Menguè, Billo Bah, Marouane Camara ? Si leur libération avait eu lieu avant la signature, suivie d’un engagement clair disant “plus jamais ça en Guinée”, là on aurait pu comprendre. Mais aujourd’hui, toutes les personnes qui osent s’exprimer ont peur, parce qu’on nous a imposé la violence et la haine. Il n’y a plus d’égalité entre les Guinéens. Nous sommes traités de manière inégale. Ceux qui sont au pouvoir profitent du système. Et chaque fois qu’ils commettent des erreurs, ils posent un acte symbolique, comme ce qu’ils appellent ici un pacte de paix. Le mot “pacte” est très fort, mais dans les faits, il n’a aucun sens.
Comment votre parti conçoit-il le dialogue et la réconciliation nationale dans le contexte actuel ?
Nous avons toujours prôné la paix et encouragé la cohésion sociale en Guinée. Nous avons été l’un des premiers à appeler à un dialogue inter-guinéen, en invitant les Guinéens à s’asseoir autour de la même table pour régler les différends en famille. Nous sommes donc une partie prenante d’un dialogue inclusif entre Guinéens, mais d’un dialogue franc et sincère, pas d’un dialogue tenu aujourd’hui pour être contredit demain.
Les autorités morales et religieuses peuvent-elles jouer un rôle neutre et efficace dans la prévention des conflits ?
Dans d’autres pays, les autorités religieuses et morales interviennent dès qu’un conflit pointe à l’horizon. Mais chez nous, c’est malheureusement le contraire. Elles attendent que la situation dégénère avant de se lever pour dire : “il y a ceci, il y a cela”. Pourquoi ne prennent-elles pas leurs responsabilités dès les premiers signes de tension, en disant la vérité à qui de droit ? Pour rappel, c’est justement ce silence complice qui a conduit à la condamnation de mon frère, Aliou Bah. Il est temps de sortir de cette attitude attentiste pour faire avancer ce beau pays.
Dans les conditions politiques actuelles, ce pacte peut-il être appliqué de manière crédible et efficace ?
Je dirais non. Aujourd’hui, le climat politique de notre pays est complètement calciné. Les grandes figures politiques comme Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré ont été contraintes à l’exil. Regardez dans quelles conditions ces deux personnalités ont été chassées de leur domicile. Plus récemment encore, elles ont été empêchées de se faire recenser. Mais franchement, dans quel pays sommes-nous ? Cela montre clairement que le climat politique actuel est totalement défavorable à ce pacte. Des mesures concrètes doivent être prises avant de parler de paix.
L’État de droit et l’indépendance de la justice sont-ils aujourd’hui garantis pour donner du sens à ce pacte ?
Je dirais tout simplement qu’il est nécessaire de revoir le fonctionnement de la justice. Quand on est juge ou avocat, il faut avoir le courage de dire le droit. Malheureusement, ceux qui osent sont souvent malmenés. C’est le cas de M. Traoré, qui a toujours prôné le respect de la loi. Comme lui, il y en a d’autres qui défendent une justice véritable. Mais beaucoup cherchent plutôt leur intérêt personnel, et c’est là tout le problème de la Guinée aujourd’hui. Il n’y a plus d’esprit d’intégrité ni de patriotisme. La patrie est abandonnée. Personne ne la défend réellement. Ceux qui devraient la protéger sont réduits au silence, parfois emprisonnés. Franchement, le système judiciaire mérite une sérieuse remise en question.
L’article Signature du Pacte d’entente national : «Cela n’a aucun sens sans justice», selon un acteur politique est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.