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La volonté affichée du président de la République, le général Mamadi Doumbouya, de remettre de l’ordre dans le secteur minier guinéen ne fait aucun doute. Il s’agit d’un engagement fort, en cohérence avec son ambition de refonder les bases d’un État plus juste, plus transparent et plus souverain. Le secteur minier, pilier de l’économie nationale, a longtemps souffert de pratiques opaques, d’attributions de permis sans rigueur et d’un encadrement institutionnel trop souvent inefficace.
La décision de retirer, depuis mai 2025, plus de 300 permis miniers en plusieurs vagues successives s’inscrit dans cette réorganisation stratégique du secteur. Toutefois, la méthode interpelle. La poursuite de réformes ne peut se faire au détriment de l’État de droit et du respect des principes de justice procédurale.
Bien que la législation minière guinéenne soit claire et fortement prescriptive, ses procédures ne semblent pas toujours avoir été respectées par les autorités. Plusieurs entreprises affirment avoir appris le retrait de leurs permis par voie de presse, sans notification préalable ni explication des griefs retenus à leur encontre.
Le cas d’Axis Minerals illustre parfaitement ces préoccupations. Présente en Guinée depuis 2013, bien avant l’essor spectaculaire de la bauxite, cette entreprise a été un acteur pionnier et fidèle du secteur. Malgré les turbulences — notamment l’épidémie d’Ebola et les périodes d’instabilité politique — Axis est restée engagée dans le pays, convaincue du potentiel de la Guinée et désireuse d’établir une relation de long terme avec l’État et les communautés locales.
Son permis, qui représentait la deuxième source de production de bauxite du pays, a permis l’exportation de près de 40 millions de tonnes de bauxite entre 2023 et 2025. La production au cours des cinq premiers mois de 2025 — avant la révocation — s’élevait à 17 millions de tonnes, contre 18,3 millions de tonnes extraites en 2024. Ce projet a également généré des retombées concrètes : la construction d’une route de 75 kilomètres, de trois ponts totalisant 350 mètres, de six unités de traitement déjà opérationnelles, d’une septième en construction, ainsi que d’un autre pont en phase d’achèvement. Le permis d’Axis soutenait environ 5 000 emplois directs et indirects dans la région de Boffa, qui ont été perdus à la suite de la décision des autorités.
Le partenariat entre Axis Minerals et son partenaire local, AGB2A, avait été structuré de manière à favoriser le développement de compétences nationales tout en respectant les normes internationales. À ce jour, aucune explication n’a été donnée quant à l’interruption brutale d’un tel projet. Un protocole d’accord, qui aurait été signé en juillet 2025 entre le ministère des Mines et de la Géologie et la société SD Mining — permettant à cette dernière d’obtenir le permis minier d’Axis Minerals — soulève de nouvelles interrogations sur les intentions du ministère.
Il ne s’agit pas ici de contester la souveraineté de l’État, mais bien d’interroger le processus ayant conduit à ces décisions, ainsi que la qualité des conseils et des informations transmis aux plus hautes sphères du pouvoir. Le président Doumbouya, reconnu pour sa rigueur et son attachement à la souveraineté, n’aurait-il pas intérêt à exercer une supervision plus étroite du ministère des Mines et de la Géologie, ainsi que de la Commission nationale des mines ?
Une réforme bien conduite inspire la confiance ; une réforme brutale et opaque, en revanche, peut nuire à l’attractivité du pays, décourager les investisseurs les plus sérieux et ternir l’image d’un État en transition.
La Guinée dispose d’une occasion historique de bâtir un modèle minier exemplaire. Toutefois, l’exigence de rigueur ne doit ni conduire à l’injustice, ni à un manque de transparence, encore moins fragiliser l’État de droit. L’élimination de l’arbitraire et la préservation de la confiance des acteurs engagés et crédibles devraient constituer les fondements de l’action publique dans ce secteur stratégique.
Stephane Koffi, journaliste Generaliste
L’article Entre rigueur présidentielle et zones d’ombre : le cas Axis Minerals interroge est apparu en premier sur Mediaguinee.com.