Conférence ministérielle des diplomaties féministes à Paris : le message de la Guinéenne Oumou Khaïry Diallo

il y a 4 heures 22
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La capitale française abrite depuis ce mercredi, 22 octobre 2025, la Conférence ministérielle des diplomaties féministes, un rendez-vous international d’envergure organisé au Centre des conférences ministérielles de Paris. Cette rencontre de deux jours (les 22 et 23 octobre) réunit des responsables politiques, des diplomates, des militantes et acteurs institutionnels autour d’un objectif commun : promouvoir un multilatéralisme et des diplomaties féministes ambitieuses, inclusives, décoloniales et financées, solidement ancrées dans les réalités nationales.

Selon les organisateurs, cette initiative vise à encourager les États à intégrer une diplomatie féministe au cœur de leurs politiques nationales et internationales, dans un contexte mondial où les droits des femmes demeurent fragilisés par les inégalités, les conflits et la montée des mouvements anti-droits.

La cérémonie d’ouverture a connu la participation de plusieurs personnalités de premier plan, notamment Jean-Noël Barrot, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères ; Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères ; José Manuel Albares Bueno, ministre espagnol de l’Union européenne et de la Coopération ; Ararat Mirzoyan, ministre arménien des Affaires étrangères ; Sima Bahous, directrice exécutive d’ONU Femmes ; Aurore Bergé, ministre déléguée française chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes ; Amina J. Mohammed, vice-secrétaire générale de l’ONU (intervenue par message vidéo), et Delphine O, ambassadrice et secrétaire générale du Forum Génération Égalité.

Mais l’un des moments les plus marquants de cette première journée fut sans doute l’intervention d’Oumou Khaïry Diallo, militante féministe guinéenne et directrice exécutive du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée, qui a pris la parole au nom de la société civile féministe francophone lors de la séance inaugurale. Dans son allocution, Oumou Khaïry Diallo a ouvert son discours par un témoignage bouleversant, mettant en lumière la brutalité des violences subies par des jeunes filles en Guinée et ailleurs.

Oumou Khaïry Diallo, militante féministe guinéenne et directrice exécutive du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée

« Sayon, 11 ans, violée par son oncle, arrachée à la vie avec ses rêves jamais accomplis, ses désirs inexplorés,

Aïssatou, 5 ans, morte des suites d’excision, privée du droit de grandir, de jouer, d’apprendre, d’exister pleinement.

Mariama, contrainte d’obtenir l’accord de son mari pour accéder à une contraception. Et moi, excisée à 12 ans, heureusement encore debout, vivante, et aujourd’hui devant vous. Ce que nous avons en commun, c’est d’être des femmes. Mais surtout, d’avoir été, à un moment ou un autre, réduites au silence, privées de choix, ou rendues invisibles dans des décisions qui concernaient pourtant nos vies. Ces réalités, je ne les ai pas lues dans un rapport. Je les ai vécues, dans ma chair. Et je les ai entendues, dans les voix tremblantes de celles que j’accompagne chaque jour », a-t-elle dit d’entrée de jeu.

Les mots de la militante guinéenne ont profondément ému l’assistance, rappelant que les violences faites aux femmes et aux filles demeurent une urgence mondiale nécessitant des réponses politiques fortes et concrètes.

Oumou Khaïry Diallo, également représentante de l’Alliance Féministe Francophone, a ensuite livré un plaidoyer lucide sur le rôle crucial des organisations féministes de terrain, souvent confrontées à la précarité et au manque de soutien financier.

Oumou Khaïry Diallo, militante féministe guinéenne et directrice exécutive du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée

« Aujourd’hui, si je me tiens ici, c’est parce que la société civile féministe n’est pas seulement une actrice d’exécution de politiques pré-déterminées pour elle : elle est porteuse de solutions. Nous sommes celles qui voient, qui écoutent, qui soignent et qui reconstruisent, souvent avec très peu, mais avec conviction. Lorsque les budgets se réduisent, lorsque les priorités se déplacent, ce sont nos actions qui s’arrêtent, nos vies qui vacillent, et nos progrès qui reculent. Chaque financement interrompu arrache de l’espoir à celles qui n’ont plus que nous. C’est une main que l’on retire à une femme en difficulté : une porte qui se ferme devant une famille en détresse. Notre architecture s’écroule et, avec elle, la confiance et l’avenir. Car lorsqu’une seule ligne est coupée dans un budget, je ne peux plus assister Sayon, ni Aïssatou. Et Mariama perd le droit de choisir », a-t-elle ajouté.

Son message, porteur d’espoir et de révolte, a souligné la nécessité pour les gouvernements et partenaires internationaux de financer durablement les initiatives locales qui œuvrent pour l’autonomisation des femmes et la justice sociale.

Poursuivant son intervention, la militante Oumou  Khaïry Diallo a appelé à une refondation des politiques internationales autour de l’expérience et de la parole des femmes elles-mêmes.

« Instaurer une diplomatie féministe, c’est redonner justice à celles à qui la société l’a volée. C’est rééquilibrer nos sociétés, sans laisser personne pour compte. Mais une diplomatie féministe ne peut exister sans nous, celles dont les réalités forgent les politiques. Elle doit partir de nos vécus, de nos luttes, de nos propositions. Et se construire avec nous, pas à notre place. Parce qu’une diplomatie féministe qui ne reconnait pas la société civile féministe comme partenaire à part entière reste un idéal, pas une transformation. Nous sommes témoins, aujourd’hui, de la montée inquiétante des mouvements anti-droits, de la remise en cause des libertés acquises et du recul des financements dédiés à l’égalité. Ces menaces prospèrent là où nous avons laissé une brèche. Il est temps de la combler. Il est urgent de redonner à nos sociétés, à nos femmes et à nos filles, la dignité et la liberté qu’elles méritent », a-t-elle indiqué.

Ce passage a résonné comme un signe fort pour une diplomatie participative, fondée sur la justice et la reconnaissance des luttes féministes dans leur diversité culturelle et géographique. Pour clore son intervention, Oumou Khaïry Diallo a interpellé les décideurs politiques et les bailleurs de fonds internationaux sur leur responsabilité historique face à l’égalité de genre.

« Alors, à vous, responsables politiques, partenaires techniques et financiers, je ne demande pas de compassion. Je demande de la cohérence et de la constance. Parce que les droits des femmes ne sont pas un sujet secondaire dans les relations internationales : ils en sont la base, la condition même de la paix, du développement et de la justice. Une véritable diplomatie féministe, c’est celle qui place les femmes et les filles au cœur des décisions, qui écoute leurs voix, qui finance leurs actions et qui protège leurs libertés. La déclaration de la société civile, présentée hier à Son Excellence Madame l’Ambassadrice Delphine O, le réaffirme sans équivoque. Unissons nos forces, gouvernements, Nations Unies et société civile féministe, pour construire une diplomatie qui répare les injustices, protège les droits et libère les vies. Parce que tant qu’une femme, quelque part dans le monde, est privée de liberté, aucune d’entre nous n’est vraiment libre », a-t-elle conclu.

Cette conférence de Paris s’annonce ainsi comme un tournant majeur dans la réflexion mondiale sur la diplomatie féministe, où la voix des femmes africaines notamment celles de la Guinée, s’affirme désormais avec force et légitimité.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com

Tel: (+224) 666919225

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