PLACEZ VOS PRODUITS ICI
CONTACTEZ [email protected]

La route Kankan–Kissidougou, en passant par Tokounou, autrefois un axe vital pour l’économie nationale, est aujourd’hui méconnaissable. Longue d’environ 195 kilomètres, cette voie relie la Haute-Guinée à la Guinée forestière. Elle servait de passage privilégié pour l’acheminement des marchandises, notamment les produits agricoles, miniers et ceux du commerce transfrontalier. Mais aujourd’hui, elle n’est plus qu’un long ruban de poussière, de nids-de-poule et de désolation.
Sur le terrain, le constat est accablant. Les camions peinent à avancer, les véhicules particuliers se frayent difficilement un chemin entre les ornières, tandis que la poussière rouge recouvre tout sur son passage.
« Cela fait vingt ans que je conduis entre Kissidougou et Kankan, mais jamais je n’ai vu cette route dans un état aussi lamentable. Les camions se renversent parfois dans les trous. On perd du temps, du carburant, et souvent même des marchandises. Pendant la saison sèche, on suffoque dans la poussière, et pendant la saison des pluies, la route devient impraticable », confie Mamadou Camara, chauffeur de camion.

Pour Alpha Cissé, du syndicat des transporteurs de Kankan, la situation est devenue intenable.
« Cette route est avant tout économique. Elle relie deux grandes régions commerciales. Mais aujourd’hui, elle est abandonnée. Nos véhicules s’usent vite, les pièces coûtent cher, et les clients se plaignent des retards », déplore-t-il.
Selon lui, la dégradation du tronçon influe directement sur les prix du transport et, par ricochet, sur le coût des marchandises dans les marchés de Kankan et de Kissidougou.
Au cœur de cet axe meurtri, Tokounou -sous-préfecture relevant de Kankan et située à 125 kilomètres du chef-lieu- vit au rythme des passages de véhicules soulevant d’épais nuages de poussière.
« Regardez nos maisons, nos boutiques, nos champs : tout est recouvert de poussière rouge. Les enfants tombent souvent malades. Nous sommes oubliés », témoigne Mansa Diawara, citoyen de Tokounou.
Pour lui, la route n’est plus seulement un problème de mobilité, mais une véritable question de santé publique.
À cette dégradation s’ajoute une insécurité croissante. Des usagers affirment que les embuscades et braquages sont devenus fréquents sur certaines portions isolées.
« Les bandits profitent du mauvais état de la route. Quand les véhicules ralentissent ou tombent en panne, ils attaquent. Aujourd’hui, certains préfèrent contourner par Faranah, passer par Dabola et Kouroussa avant de rejoindre Kankan, plutôt que d’affronter cette route infernale », explique Abdoulaye Kanté, usager régulier de la route.
Pourtant, la réhabilitation de cette voie avait été financée par l’ancien régime, selon des informations recueillies auprès de l’Inspection régionale des Travaux publics de Kankan. Les travaux avaient été confiés à une entreprise burkinabè, mais celle-ci n’a jamais achevé le chantier.
« Le financement avait été débloqué, mais les travaux se sont arrêtés brusquement. Le responsable de l’entreprise aurait quitté le pays », confie un ingénieur local sous anonymat.

Aujourd’hui, cette route, censée être un corridor économique majeur entre la Guinée forestière et la Haute-Guinée, est devenue un véritable frein au développement régional. Les opérateurs économiques s’en plaignent, les transporteurs s’épuisent, et les populations s’enfoncent dans l’isolement.
« Ce n’est pas seulement une route, c’est une artère vitale pour toute la Guinée intérieure », résume Mamadou Camara avant de redémarrer son vieux camion, avalé par la poussière rouge de Tokounou.
Les populations de Kankan, Tokounou et Kissidougou appellent de tous leurs vœux les nouvelles autorités à relancer ce chantier stratégique.
.png)
il y a 2 heures
10



















English (US) ·