Interview- Dr Réné Tato Loua, DG Agence nationale Météo : « pourquoi Conakry est étouffée par une vague de chaleur…”

Conakry, la capitale guinéenne enregistre cette année une canicule plus élevée que les années précédentes avec une température qui varie autour de 33⁰ la journée et 23⁰ la nuit. Pour savoir les causes de cette vague de chaleur exceptionnelle, les conséquences et comment atténuer la situation, notre rédaction a eu un entretien jeudi 21 mars avec Dr René Tato Loua, directeur général de l’Agence nationale de la météorologie. Des risques liés à la santé, des conséquences pour l’agriculture et l’élevage,  tout a été discuté avec ce météorologue. Interview…

René Tato Loua: Pour comprendre cette intense chaleur que nous ressentons actuellement dans notre capitale Conakry il faut se référer à 2 analyses: la première analyse c’est la variation spéciale de la température au niveau national. Quand vous prenez Conakry, elle a un microclimat approprié et quand vous prenez Kankan, il y a un micro climat approprié. Pour Conakry la première raison en termes d’analyse est liée au microclimat.

Nous avons la proximité avec les côtes, Conakry est une ville côtière qui est allongée dans l’Océan Atlantique, qui est naturellement chaude. L’océan est globalement, naturellement chaud et la température varie plus ou moins entre 23⁰ et 24⁰ et étant allongée dans l’océan qui est naturellement chaud c’est ce qui fait que même si ce n’est pas à l’heure là, pendant la saison des pluies, il fait chaud même quand il pleut. La nuit, il pleut mais on a toujours les ventilateurs allumés.

René Tato Loua: Nous avons la chaîne de montagnes de Kakoulima qui forme une barrière. La chaleur qui se dégage et l’océan étant chaud et actuellement nous sommes dans la saison sèche et quand le soleil tape fortement l’océan il va y avoir une évaporation, la masse d’air évaporée va essayer de se diriger vers le continent, donc en contact avec la barrière cette masse d’air va subir une ascendance et ça va créer un micro climat au niveau de la capitale. Et quand vous dépassez Coyah et vous êtes vers Kindia vous n’allez pas ressentir la même chaleur que nous avons à Conakry…

Mais du point de vu variation temporaire il faut retenir que pour l’ensemble du pays  la variation de la température du 1er janvier au 31 décembre donne une certaine signature qui montre qu’au mois d’avril on observe la température la plus élevée. Donc le maxi dans l’année et on est en train de progresser vers cette valeur maximale, c’est ce qui fait qu’actuellement il fait chaud.

Mais on se dit que comparativement aux autres années on sent une chaleur intense,  pourquoi? Et l’explication ou la cause qu’on peut donner à ça est d’ordre planétaire qui vient envenimer la situation. Donc quand la température de surface de l’océan de cette zone qui se trouve dans cette portion de l’océan pacifique atteint un certain niveau pendant une période donnée (…)  On va parler d’un ignaux et quand cette surface atteint  une certaine valeur plus basse on va parler de la ligna. Donc depuis 2023 nous sommes en train d’enregistrer un épisode important d’un ingaux et les conséquences de cette situation est une d’une part le réchauffement de l’océan qui va impacter les autres parties de l’océan comme Atlantique. Vous savez il y a la circulation générale en micro chimie. Donc quand une chaleur est produit elle ne va pas rester sur place, la masse d’eau qui est chaude va essayer de se placer pour chercher une zone d’équilibre. Donc ce qui fait que la chaleur qui se dégage devient de plus en plus instance. Vous allez constater l’année 2023 l’OMS a même indiqué c’est l’année la plus chaude, donc c’est la raison qui démontre cette élévation de la température.

René Tato Loua: Oui, mais pas que tout le monde et c’est là qu’il faut comprendre que les informations météorologiques sont très vitales, pour exemple: dans les hôpitaux il faut en tenir compte des conditions dans les quelles on maintient les malades. Est-ce que cette température peut-être tolérer dans certaines maladies? Je dirais  pas que tout le monde. C’est pourquoi quand on donne l’information chacun prend cette information et l’utilise au cas par cas en fonction des besoins, de sa situation. Cette hausse de chaleur n’est pas profitable à tout le monde, elle aggrave certaines maladies et quand il fait trop chaud ça favorise les cas de méningite, c’est pourquoi quand vous analyser les zones les plus chaudes sont le plus souvent concernés par les cas de méningite.

René Tato Loua: Oui, il faut en tenir compte parce qu’il faut voir la température des temps. Parce que pendant la saison il y a des cultures irriguées que nous faisons mais est-ce que cette température est tolérée parce certaines plantes ? Voici la question qui se pose. Les agronomes doivent en tenir compte quand la chaleur est intense. Il  y a certaines déjà il y a la pénurie d’eau qui se pose. Alors s’il y a manque d’eau ça va affecter obligatoirement l’agriculture et l’élevage. On ne peut pas dire qu’il n’y a pas d’impacts, il y en a mais à des degrés différents.

Mediaguinee.com: À date, est-ce qu’il existe des mécanismes permettant de prévenir cette chaleur intense pour les prochaines années ?

 

René Tato Loua: Déjà ce qui est important de savoir ce n’est pas seulement pour la Guinée, nous sommes inscrits dans la dynamique de mettre à disposition de chaque population une alerte d’ici 2027, ça c’est une vision globale définie par le système des Nations-Unies. Antonio Guterres a confié que l’organisation météorologique mondiale dont notre pays est membre de définir un plan stratégique qui permettrait à la disposition de chaque population d’ici 2027 une alerte, pour que chaque citoyen puisse avoir accès depuis son lit, depuis sa maison. Parce que si l’alerte est émise sur un risque à l’avance ça permet d’éviter ou d’atténuer les dégâts. Donc au niveau de chaque pays il est question de mettre en œuvre ce plan stratégique et ce service chargé de mettre en place ce plan stratégique pour nous la Direction Nationale de la Météorologie et une fois que tout est est mis en place il y n’aura beaucoup de bénéficiaires comme: le service de gestion des catastrophes, la Croix-Rouge, la protection civile, pour ne citer que ceux-ci , qui vont à la fois être préparés  pour prendre des dispositions pour limiter les dégâts liés à un tel phénomène et même dans les hôpitaux. Donc nous travaillons d’arrache-pied, vous savez depuis 2 ans déjà nous émettons des alertes même pendant la période des grandes pluies donc ce qui veut dire que notre pays est sur la voie d’être doté d’un mécanisme permettant de contrôler tout ce système. C’est-à-dire d’avoir un outil d’aide à la prise de décision, qui va permettre au gouvernement d’être efficace dans la protection de la population et des biens contre les risques liés aux phénomènes météorologiques extrêmes.

René Tato Loua: Ce que je conseille c’est que chacun doit d’abord penser à être bien hydraté, malheureusement nous sommes dans la période de Ramadan et de Carême mais il faut s’approcher de son médecin pour savoir quel type d’aliment faut-il préférer pour qu’il y ait une compensation en matière d’eau déjà perdue. Parce que avec une telle chaleur on va perdre une grande quantité d’eau. Donc pendant les ruptures il faut s’hydrater davantage, il faut boire suffisamment et chaque fois il faut prendre des douches. Grosso modo il faut s’approcher de son médecin pour des conseils pour mettre tout en état.

Mais vous savez Conakry est une ville non seulement proche de la mer mais aussi qui a besoin d’un bon reboisement pour éviter la forte chaleur.

Les forêts sont bien indiquées pour pouvoir atténuer la chaleur dans une ville. Il faut déjà penser à reboiser les bords des routes, est-ce que chez moi il y a un petit jardin ou un arbre au moins. Il ne faudrait pas que tout soit du béton, du goudron, les toits en tôles, des surfaces qui emmagasinent beaucoup de chaleur et dans la soirée qui dégagent énormément de chaleur, cela peut accentuer la situation. Mais si la ville est bien reboisée je pense que ça peut atténuer un peu la situation.