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Le changement intervenu dans le secteur de la pêche lors du dernier remaniement ministériel a suscité beaucoup d’espoir chez les opérateurs économiques évoluant dans ce secteur. Mais, les difficultés persistent. Nous avons interrogé un acteur majeur de la pêche, Hassan Saadi, Directeur Général de Sonit-Pêche, pour en savoir davantage.
Guinéenews : Nous avons appris que votre société s’est débarrassée de deux bateaux de pêche pélagiques, pourquoi vous avez réduit votre armement ?
Hassane Saadi : Parce que le plan de pêche pour la pêche pélagique industrielle adopté depuis quelques années est mauvais. La zone autorisée pour ces bateaux est de 60 miles. C’est très loin et il n’y a dans cette zone que le poisson de basse gamme telle que la Sardinelle. Ce qui rend la rentabilité insuffisante par rapport aux charges avec un carburent qui coute environ 1.000 Dollars US la tonne. Par conséquent, actuellement nous ne disposons que des bateaux M/V BOFFA et le M/V WASSOU.
Guinéenews : Quelle est la zone de Pêche avantageuse pour vous ?
Hassane Saadi : D’abord ce n’est pas pour nous seulement en tant que SONIT. C’est pour toutes les sociétés qui ont des bateaux pélagiques. La zone avantageuse serait de 40 miles. A défaut à 50 miles.
Guinéenews : Si la zone est ramenée à 40 miles quels seront les avantages ou les impacts positifs pour les populations?
Hassan Saadi : Nous pêcherons en partie du poisson noble, tel que la dorade, le chinchard, le barracuda, le sompate, etc… Je dis bien en partie ce sont ces espèces nobles que les mareilleuses et les populations préfèrent. C’est un grand avantage et les bateaux seront plus rentables, et peuvent couvrir leurs charges.
Guinéenews : Avez-vous sollicité au ministre de la pêche de ramener la zone de pêche à 40 miles?
Hassan Saadi : Oui nous l’avons fait et nous sommes fatigués de continuer à renouveler notre demande. Nous ne comprenons pas l’hésitation du Ministère de la Pêche de corriger cette erreur qui dure car les pays de la sous-région autorisent les bateaux pélagiques à 30 miles.
Guinéenews : C’est peut-être les techniciens qui font les études et analysent qui préconisent cette politique?
Hassan Saadi : C’est possible, mais c’est une mauvaise politique qui mérite d’être corrigée. Ces techniciens doivent se poser la question, pourquoi le quota attribué annuellement pour la pêche pélagique n’a jamais été atteint ? Les armateurs pélagiques fuient les eaux guinéennes. Ils vont à Bissau ou en Sierra Léone ou en Gambie ou au Sénégal ou en Mauritanie. Par exemple en 2023 le quota pour les bateaux pélagiques attribué dans le plan de pêche était de 12 navires.
Et il n’y a eu en opération à peine 2 bateaux de SONIT et 3 autres petits glaciers soit 5.
C’est un échec total indiscutable. Ces techniciens doivent se poser la question et corriger l’erreur, car il y a un manque à gagner pour le trésor public guinéen et une mauvaise exploitation des eaux guinéennes. Pourquoi les quotas des autres types de licences sont toujours atteints et ceux de la pêche pélagique industrielle sont non atteints ? Oui ou non ces techniciens doivent se poser la question ?
Guinéenews : la CONAPEG qui représente le secteur ne peut pas intervenir ? Vous n’êtes pas membre de la CONAPEG ?
Hassan Saadi : Non seulement nous sommes membres de la CONAPEG mais mon Père actuellement à la retraite a été l’un des fondateurs de la confédération avec ses amis Thiangui Diallo, Sorel Doumbouya et autres . Mais la CONAPEG n’a pas d’influence et on ne l’écoute pas.
Guinéenews : Mais selon les informations que nous disposons, la CONAPEG assiste aux réunions pour l’élaboration du plan de pêche annuel.
Hassan Saadi : Peut-être, si c’est le cas, c’est du folklore. Leur présence n’a aucune influence.
Guinéenews : En dehors de la question de la zone de pêche y a-t-il d’autres points que vous contestez ?
Hassan Saadi : Je ne peux pas contester parce que je ne suis pas une autorité mais je peux critiquer pour être sincère et servir.
Oui, il y a d’autres points telle que l’exigence d’obtenir une autorisation de débarquer et aussi les charges élevées pour exporter le poisson et tant d’autres.
S’agissant de l’exigence d’autorisation, on exige à chaque armateur d’obtenir une autorisation de débarquement à chaque fois que le bateau accoste au port. Je ne comprends pas cette exigence parce que chaque bateau qui obtient une licence de pêche a l’obligation de débarquer les captures au port de Conakry et le plan de pêche exige cela et l’armateur s’est engagé pour cela. Cette formalité est inutile parce qu’elle fait perdre du temps pour rien. Bien sûr le bateau à son arrivée au port est soumis à un contrôle systématique par tous les corps au port ONSPA, CNSP, DOUANE, GENDARMERIE MARITIME, POLICE, EMIGRATION, L’ENVIRONNEMENT etc… pour procéder à un contrôle systématique, chaque service selon ses prérogatives. Aucun débarquement ne se fait avant tous ces contrôles. Alors à quoi sert l’autorisation délivrée par le Ministère de la Pêche ?
S’agissant des charges d’exportations, nous sommes le pays le plus cher dans la sous-région. Nous payons environ 180 USD pour chaque tonne à exporter. C’est énorme. Dans tous les pays du monde l’exportation est encouragée même subventionnée dans certains cas parce qu’elle rapporte des devises rapatriées qui consolident la valeur de notre monnaie nationale. Non seulement les charges sont énormes, mais la procédure administrative est longue et compliquée. L’autorisation d’exporter pourrait être exigée mais avec une procédure plus allégée.
Guinéenews : C’est peut-être pour empêcher ou décourager l’exportation du poisson en vue d’éviter un manque de ravitaillement aux populations en poisson qui est essentiel pour la ménagère?
Hassan Saadi: NON. Les autorisations d’exportation sont attribuées sous deux conditions essentielles. La première, le Ministère vérifie pour s’assurer que le marché est saturé en poissons. La seconde que l’exportateur dispose d’un grand stock de l’espace qu’il veut exporter. Par conséquent, le ministère a quand même une bonne politique qui consiste en priorité à ravitailler les populations en poisson et d’ailleurs durant le mois de carême par exemple les exportations sont interdites. Mais cela ne justifie pas les charges qui sont imposées à l’exportation lorsqu’elle est autorisée.
Guinéenews : Nous savons que la SONIT est le leader du secteur de la pêche. Elle est présente dans plus de 14 préfectures, elle dispose des bateaux, quels conseils vous donnez au CNRD pour accompagner le secteur de la pêche ?
Hassan Saadi : Le conseil le plus important et le plus précieux c’est de mettre dans le circuit une politique d’accompagner les pêcheurs avec les pirogues motorisée. Ce secteur est exploité exclusivement par les Guinéens. Il y a environ 40.000 pêcheurs dans ce secteur. Ils sont braves et méritent un accompagnement. Actuellement il ya plusieurs sociétés qui ont créé des projets de traitement de poissons frais. Ces projets constituent des clients précieux de ces pêcheurs guinéens.
Guinéenews : Comment les accompagner?
Hassan Saadi: L’obtention des pirogues et les équipements. L’Etat ne financera rien. Il pourra simplement émettre des garanties aux banques commerciales qui financeront les pêcheurs pour acheter une pirogue plus un moteur et des équipements dont le montant ne dépasse pas 25000 dollars en exigeant une formule d’hypothèque sous le contrôle des communes. On peut commencer par un lot de 300 pêcheurs choisis dans les différentes communes des zones de pêche soit pour un financement global de 7.500.000 USD seulement et au fur et à mesure on continue le même schéma. Cette stratégie est très importante et pourrait créer beaucoup d’emplois.
Ensuite je conseillerai au CNRD de créer un port de pêche indispensable pour notre environnement.
Guinéenews : Quelles sont les perspectives prochaines de SONIT pour ses investissements?
Hassan Saadi : Nous avons trois gros investissements à faire. Le premier c’est l’extension de notre projet de traitement de poissons frais. En effet il y a une année nous avons crée la première partie du dit projet qui consiste à acheter avec les pêcheurs guinéens le poisson frais, qui est traité chez nous, emballé et congelé. Cette première phase fait 25 tonnes en 8 heures de travail et actuellement nous prévoyons l’extension dudit projet pour atteindre 50 tonnes de congélation en 8 heures de travail.
Le second investissement, c’est l’achat de deux bateaux supplémentaires pour la pêche semi-Industrielle pour le poisson frais en vue de ravitailler le projet de traitement. En effet nous avons actuellement deux bateaux baptisés M/V FRIA et M/V BEYLA et nous allons porter le nombre à 4 bateaux durant cette année 2024.
Le 3ème investissement, c’est les infrastructures à terre. Nous avons crée à Siguiri des chambres froides importantes et nous allons commencer bientôt à N’Zérékoré et Beyla.