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Alors que le pays traverse depuis plus d’un mois une sévère pénurie de liquidités, les divergences entre le gouvernement et la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG) se font de plus en plus visibles. Le gouverneur de l’institution monétaire, Karamo Kaba, plaide pour l’impression de nouveaux billets, tandis que le Premier ministre, Bah Oury, s’y oppose fermement.
« La question n’est pas encore d’imprimer des billets de banque pour permettre de satisfaire la demande. Maintenant, si vous imprimez, vous mettez en circulation une monnaie fiduciaire de plus en plus importante. Mais si les circuits financiers et bancaires ne fonctionnent pas, si nous ne collectons pas ces ressources au niveau des banques pour qu’en termes de ressources, chaque banque puisse avoir de manière suffisante, il va de soi que la crise ne sera pas réglée. (…) C’est comme si à chaque fois, vous serez obligé encore d’imprimer, d’imprimer. Ce n’est pas du tout, à la longue, soutenable », a averti le chef du gouvernement lors d’une interview accordée à un pool de journalistes, ce samedi 16 juin 2025.
Cette position contredit celle défendue par Karamo Kaba le 2 juillet dernier, lors de la présentation à Conakry du rapport du FMI sur les perspectives économiques régionales de l’Afrique subsaharienne. « En août, on va recevoir beaucoup de billets. Et en septembre, beaucoup, beaucoup, beaucoup de billets », avait alors annoncé le gouverneur.
Bah Oury, lui, privilégie une approche alternative : la modernisation des moyens de paiement dans un pays encore trop dépendant du cash. « Si de part et d’autre, les opérateurs font un travail de formation et de sensibilisation, vous n’avez pas besoin d’avoir du cash pour faire vos transactions. D’une opération à une autre, vous pouvez passer votre avoir via un transfert pour régler une opération et ainsi de suite. Donc, sans que le cash puisse être utilisé. C’est une approche nouvelle, ça nécessite une explication et une sensibilisation pour que nos approches traditionnelles, de ce point de vue, évoluent », a-t-il expliqué.
Le bras de fer entre le Premier ministre et le gouverneur de la BCRG ne date pas d’hier. Au début de la crise, Karamo Kaba avait minimisé l’ampleur du problème, affirmant qu’il ne s’agissait pas d’une crise structurelle mais d’un déséquilibre conjoncturel lié à une surutilisation du cash. « Il y a un problème d’excès d’usage de cash en Guinée. Celui qui est bancarisé ou qui utilise Orange Money, PayCard, Kulu ou Soutra Money vit normalement », avait-il déclaré, insistant sur la nécessité d’accélérer la transition vers les paiements numériques.
De son côté, Bah Oury avait reconnu dès le 20 juin, lors d’une réunion stratégique au ministère des Affaires étrangères, l’existence d’« une crise de liquidité ». Il avait alors annoncé une mesure forte : « Nous faisons tous face à cette difficulté liée au manque de liquidités, quel que soit le type de règlement concerné. (…) Aucune prime, aucun salaire ne sera distribué en espèces. Tous les paiements se feront par virement bancaire », avait-il tranché, indiquant que la Primature mettrait fin aux paiements en cash dès fin juin.
Ce désaccord illustre les tensions persistantes entre une vision classique, centrée sur la création monétaire, et une volonté de réforme structurelle misant sur la bancarisation et la digitalisation. Au-delà du débat technique, il révèle surtout l’urgence pour la Guinée de moderniser son système financier afin de sortir durablement du cycle des crises de liquidités qui fragilise l’économie et mine la confiance des citoyens.
L’article Bah Oury contre Karamo Kaba : duel au sommet sur la gestion de la pénurie de liquidités est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.