Quel sens donné au recours administratif de l’AVCB contre le décret de rébaptisation de l’aéroport international Conakry-Gbessia ? (Tribune)

il y a 5 mois 190
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Le 16 décembre 2022, le Président de la transition, via un décret, a rébaptisé l’aéroport international Conakry-Gbessia du nom de feu Président Ahmed Sékou Touré, père de l’indépendance de notre patrimoine commun. Cette décision de rébaptisation continue de faire naître des polémiques notamment au sein des membres de l’association des victimes du Camp Boiro (AVCB) qui a même saisi la Cour suprême pour l’annulation de cet acte qui, pourtant, a été salué par la majorité écrasante des guinéens. Une vaine bataille judiciaire s’engage entre l’Agent de l’Etat et cette association. Sur les réseaux sociaux, les commentaires vont tous azimuts entre pro Sékou Touré et l’infine minorité qui voit ce décret de rébaptisation d’un mauvais œil.

Justement, des questions surgissent à propos de cette démarche de l’AVCB que certains qualifient même de tartarinade, à savoir : Y a-t-il des règles à connaitre pour rébaptiser une voie ou un lieu public du nom d’une personne en Guinée ? Pourquoi l’AVCB s’oppose-t-elle à ce décret de rébaptisation de l’aéroport international Conakry-Gbessia? Y a-t-il interdiction d’usage du nom de feu Président Ahmed Sékou Touré en Guinée ? A-t-il fait l’objet d’une peine infâmante pour qu’un édifice ne porte pas son nom ? Donner son nom serait-il contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs pour qu’on intente une action en annulation ? Porte-t-il atteinte à l’image de la Guinée ? Heurte-t-il la sensibilité des personnes ? Est-il de nature à provoquer un trouble à l’ordre public ? Faut-il obtenir l’autorisation d’une association pour donner un nom à une voie ou un lieu public en Guinée ? N’est-il pas un acte unilatéral, à la seule discrétion d’un chef d’Etat, comme l’a toujours été dans notre tradition républicaine guinéenne ?

L’Etat a pour mission la satisfaction de l’intérêt général. À ce titre, il pose deux types d’actes : un acte de gouvernement et celui du gouvernement. Les actes de gouvernement sont des actes inattaquables que pose un Chef de l’Etat ou un Président de la République. Au nombre de ces actes, on peut citer entre autres les nominations, les désignations comme la rébaptisation de l’aéroport international de Conakry-Gbessia par exemple, et les distinctions honorifiques comme la chancellerie nationale en décerne à tout moment au nom du Chef de l’Etat.

En d’autres mots, rien n’interdit au Chef de l’Etat ou au Président de la Transition de rébaptiser une voie ou un édifice public en Guinée. En tout cas, à date, aucune disposition, aucun texte législatif ou réglementaire en Guinée ne fait obligation au Président de la Transition d’une consultation ou d’une demande d’autorisation à une éventuelle association ou d’une quelconque personnalité pour dénommer un lieu public.

Bref, la rébaptisation d’une voie ou d’un édifice public fait partie du pouvoir souverain du Chef de l’Etat ou des ministères autorisés par lui. A dire juste, les membres de l’association des victimes du Camp Boiro feraient mieux de se ressaisir et de se reconcentrer sur leurs traditionnelles revendications relatives aux dépouilles et à la réhabilitation de leurs parents (pour ceux qui ne sont pas auteurs des infractions à eux leur reprocher).

De toutes les façons, quoi qu’on dise, cette démarche de l’AVCB qui consiste à faire des recours en contentieux administratif vient enrichir une jurisprudence d’ordre prétorien que le justiciable guinéen en use très peu.

Sayon MARA, Juriste

Lire l'article en entier