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Après la Directrice de l’hôpital national de Donka, c’est le tour du chef des services de gynécologie à comparaître devant le tribunal criminel de Dixinn. Pr Namory Keita, en qualité de témoin, a qualifié ce qui s’était au stade du 28 septembre 2009 de “la bêtise humaine”. Des militaires, dit-il, ont introduit des canons de fusil et de morceaux de bois dans le vagin de certaines femmes.
À l’entame de son témoignage, Pr Namory Keita a expliqué comment la décision de se rendre au stade annexe des ambulances pour récupérer des blessés, mais qu’ils ont été empêchés d’accéder au stade : “[…] Dans l’après-midi, je suis retourné [au service des urgences]. La situation était un peu grave. On a discuté et décidé de prendre des ambulances vers le stade et voir si on pouvait directement prendre des blessés. On a pris l’ambulance de l’hôpital. Et puis il y avait deux assureurs de Médecins sans frontières, une ambulance de la Croix-Rouge et l’ambulance des sapeurs-pompiers. Ce qui fait au total cinq ambulances. Nous avons pris la direction du stade. Arrivés à l’esplanade [du stade], il n’y avait pas grand-chose. Mais les grilles du stade étaient fermées. Je suis descendu avec l’infirmière anesthésiste pour demander au policier qui était là, je crois que c’était des Antigang. Je me suis présenté à l’un d’entre eux et lui ai dit que nous voulons entrer au stade pour récupérer les blessés, s’il y en a. Il m’a regardé dans les yeux et m’a demandé d’attendre parce qu’il doit informer sa hiérarchie. Il a pris le téléphone et s’est retiré un peu. Il est revenu vers nous et nous a dit de ne pas nous inquiéter, qu’ils ont tout ce qu’il faut pour prendre en charge les blessés et qu’ils vont nous les amener à l’hôpital.”
Devant ce refus de la hiérarchie militaire, les médecins ne pouvaient que replier. Ils ont alors décidé de sillonner les quartiers environnants du stade pour trouver des blessés : “Nous avons décidé de sillonner les quartiers parce qu’on nous avait informés qu’il y avait des blessés qui étaient couchés dans les quartiers de Dixinn Bora, Landréah port, Dixinn centre. À Landréah port, nous avons été stoppés par une équipe de patrouille de bérets rouges. Ils nous ont dit que tous ceux qui ont fait des conneries, ils vont les arrêter et les sanctionner à hauteur de leur forfaiture. Je leur ai dit que moi je suis médecin et que je n’ai rien à voir avec quoique ce soit. On est passés.”
Le quartier était fortement militarisé. Cela a empêché que des blessés partent à l’hôpital pour se faire soigner. Pr Namory Keita indique que ceux qui gardaient des blessés avaient peur : “Dans le quartier, comme il y avait beaucoup de bérets rouges, les gens avaient peur de dire qu’ils avaient hébergé des blessés. Ils nous faisaient des signes pour nous dire qu’ils avaient des blessés. Nous leur disions qu’allons revenir un peu plus tard quand il y aura une situation un peu plus sereine. On a continué vers Dixinn Bora où nous avons commencé a ramasser les blessés et les embarquer pour les amener vers l’hôpital.”
Alors que les médecins se démerdaient à soigner les blessés, des militaires ont lancé une grenade lacrymogène à l’enceinte de l’hôpital et d’autres se sont même introduits dans le service des urgences où des blessés étaient pris en charge : “J’ai appelé la Directrice qui venait de quitter son bureau. Mais son adjoint était là aux urgences. Avec lui nous avons essayé d’organiser la prise en charge des blessés. Entre temps, il y a des militaires qui ont essayé de s’introduire dans l’hôpital et ils ont même jeté une grenade lacrymogène dans la cour. Les médecins et les personnels infirmiers se sont frustrés et sont allés vers la porte de l’hôpital et ont demandé d’être tous tués si c’était ça leur vœu. Après la situation s’est calmée. Il y avait des militaires, deux je crois, dans la salle des urgences. L’équipe les a fait chasser pour qu’ils sortent de l’hôpital. Entre temps un officier est venu leur instruire de partir immédiatement. Ils sont partis. Et puis on a commencé à voir les femmes qui ont subi des sévices.”
Le Pr Namory Keita a affirmé que des agents de son service lui ont rapporté que des débris de morceau de bois ont été été retrouvés dans les vagins de certaines victimes de violences sexuelles.
Sur le cas de viol collectif qu’ont subi des femmes lors des événements, Pr Namory Keita a soutenu que des victimes lui ont dit que certains militaires les tenaient pour permettre aux autres de violer.
Plus loin, le témoin dit qu’il retient une chose qui le marque toujours, c’est ce qu’a subi une jeune fille de 20 ans qui venait d’avoir son bac. Cette jeune fille, dit-il, a été violée et contaminée au VIH puis est tombée enceinte suite à ce viol. La fille en question était vierge. “Selon les examens, il y a eu une défloration récente”.
Ce témoin était le seul de la journée et il ne reste que deux autres au compte du ministère public. Ceux-ci devront comparaître le mardi et le mercredi.