Mamy Diaby, ex-DGA de l’ARPT : « c’est dangereux de continuer à garder les données des citoyens Guinéens à l’étranger »

il y a 11 heures 49
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La troisième édition du Forum économique d’Émergence magazine a été une opportunité pour les spécialistes de plusieurs domaines d’intérêt public, d’aborder des préoccupations des citoyens à travers quatre (4) panels.

Dans la matinée de ce vendredi 21 février 2025, le troisième panel a porté sur le thème « Impact de l’innovation et de la recherche dans la transformation de l’économie ».

Ce thème d’intérêt public a abordé par des spécialistes du secteur de la recherche et de l’innovation dont l’ancien Directeur général adjoint de l’Autorité de régulation des postes et télécommunications (ARPT) Mamy Diaby.

Dans son intervention, lui qui est actuellement PDG de la société HA2M Technologies, a d’abord soutenu que la Guinée a fait un grand pas dans le domaine du numérique depuis 2010.

« Le constat sur le numérique en Guinée, c’est qu’il faut relativiser. Ce qui reste clair, il y a beaucoup de chemins à faire. Certes beaucoup de choses ont été faites, moi je me rappelle pendant mon intervention il y a encore 15 ans, 20 ans, il n’y avait que 42 000 Guinéens qui avaient accès à l’internet. Aujourd’hui, à peu près 50% des Guinéens ont accès à l’internet. Ceci est dû bien évidemment au fait que l’État, entre guillemets, avec le secteur privé aussi, a investi énormément dans la mise en place des infrastructures structurantes de télécommunications, à savoir l’atterrissement du câble sous-marin qui ouvre la fenêtre d’un pays à la capacité internationale à l’internet, mais aussi le Backbone national à la fibre optique. Parce que vous savez, l’une des plus belles innovations au niveau du réseau de transport a été l’évolution de la fibre optique, parce qu’avant, on utilisait des faisceaux hertziens. Les faisceaux hertziens, ce sont des technologies qui sont tributaires des conditions climatiques. Quand il commence à pleuvoir, vous avez des réseaux qui sont instables. C’est comme Canal+, pour vous donner un exemple. Quand il commence à pleuvoir, vous perdez votre image. C’est parce qu’ils sont sur des technologies du faisceau hertzien. Donc, la fibre optique, c’est une technologie qui est stable, c’est une technologie où on peut transporter beaucoup de capacités. Donc, la Guinée, aujourd’hui, a quand même fait un bond spectaculaire. Nous sommes passés de 0,1% de la population qui utilisait Internet à plus de 50% de la population qui l’utilise aujourd’hui. Donc ça, c’est une très belle innovation. Il y a 10 ou 20 ans, je ne croyais pas que je pouvais rester à Conakry et envoyer de l’argent à mes parents à Dabola. Donc ça, c’est une innovation. Aujourd’hui, on peut être ici, même si on n’a pas une connexion Internet, avec juste une session qu’on ouvre sur votre téléphone pour faire vos transactions mobiles money, que ce soit Momo ou Orange Money. Il y a beaucoup d’autres qui sont venus sur le marché, Ymo, etc. Donc ça, c’est de l’innovation », a-t-il dit d’entrée.

L’ancien directeur général adjoint de l’ARPT a tout de même alerté sur le danger auquel la Guinée et les Guinéens sont exposés en continuant à héberger les données numériques dans un serveur logé à l’étranger.

Selon lui, ceux qui gardent ces données numériques peuvent les marchander.

« Malgré ces progrès indicatifs, il reste beaucoup à faire, surtout, il faut que l’Etat fasse un effort considérable. Il faut avoir une vision politique claire. On ne peut pas développer le secteur numérique si on n’a pas une vision claire de ce qu’on veut faire. Par exemple, il est inacceptable que jusqu’à présent, dans notre pays, nous n’ayons pas rapatrié le point GN, il n’est pas concevable que jusqu’à présent, dans notre pays, nous n’ayons même pas un opérateur de téléphonie mobile. Aujourd’hui, il y en a un seul qui est sur le marché. Donc ça, c’est le monopole. C’est ce que je disais. Le monopole crée la distorsion du marché en économie. Une entreprise qui est en monopole devient dangereuse. Entre guillemets, elle évolue dans le sens où elle fait ce qu’elle veut. Le point GN, c’est l’identité numérique de la Guinée. Aujourd’hui, le serveur se trouve à l’étranger. Donc, il faut faire rapatrier tout ceci en Guinée. Nous n’avons pas de data center, il n’est pas normal que nos données biométriques, votre passeport, notre carte d’identité nationale qui est biométrique, que toutes les données soient hébergées à l’étranger. Pour le passeport, c’est en Malaisie. Donc, ce n’est pas normal. Il faut que nous mettions en place des infrastructures pour permettre de rapatrier les données des Guinéens, de domestiquer les données des Guinéens sur le territoire national. Il reste donc des choses à faire. Par rapport à l’hébergement des données à l’étranger, c’est dangereux. Parce que vos données peuvent être monétisées, ils peuvent vendre les données. Deuxièmement, nous n’avons pas le contrôle sur ces données-là. C’est quand même votre identité, c’est quand même votre ADN, c’est quand même votre empreinte, c’est votre photo. Ils peuvent en faire ce qu’ils veulent. On n’a pas de contrôle sur ça. Il faut que nos données soient domestiquées au niveau national. C’est ce que font les pays modernes, c’est ce que font les pays qui innovent aujourd’hui et on ne peut pas rester à la marche du monde. L’avantage, c’est que l’État pourra gérer, contrôler les données de ses citoyens, au lieu de faire contrôler ça par des étrangers qui peuvent le monétiser à des entreprises », a-t-il souligné.

Connectivité

« C’est un scandale. Vous dites que la population n’est pas contente. Déjà, c’est un problème, n’est-ce pas ? Le fait qu’il y ait un seul opérateur, c’est qu’il ne pourra pas absorber toute la population guinéenne. Parce que son réseau n’est pas dimensionné pour absorber tous les Guinéens. Il y a des problèmes de congestion. C’est pour ça que, quand vous commencez à appeler, parfois le réseau n’est pas stable. Nous ne sommes pas en période d’hivernage. Il ne pleut pas. Les réseaux sont censés être stables. Mais s’il n’y a qu’un opérateur sur le marché, pour 12 ou 14 millions d’individus, à elle seule, cette société ne pourra pas absorber toute la population », a-t-il laissé entendre.

MohamedNana BANGOURA

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