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Au début des années 90, nous étions étudiants dans différentes institutions d’enseignement supérieur du pays – ça ne nous rajeunit pas bien sûr – dont les plus en vue étaient l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry et l’Université Julius Nyéréré de Kankan.
À l’époque, la vie politique de la plupart des pays francophones d’Afrique était rythmée par des manifestations plus ou moins violentes pour la démocratisation, la fin du parti unique etc. C’était au lendemain du célèbre discours de la Baule. La Guinée n’était pas en marge de cette quête de démocratie, de liberté et de bonne gouvernance. Pour l’histoire, il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que le régime d’alors n’avait pas ce discours de François Mitterand pour annoncer les jalons d’un système libéral sur le double plan politique et économique.
Les universités guinéennes dont les deux citées plus haut étaient en quelque sorte l’épicentre de nombreuses manifestations contre le régime du Général Lansana Conté.
Les étudiants que nous étions à l’époque étaient fascinés par les membres de l’Opposition d’alors. C’était l’époque où nous prenions part à tous les meetings organisés par les opposants. Nous croyions tellement en leurs discours qu’il suffisait simplement que nous apprenions que l’un d’entre eux tenait un meeting quelque part à Conakry pour que nous nous y rendions même si nous n’étions de son parti. L’essentiel pour nous était de les entendre pourfendre le régime du Général Lansana Conté. Nous écoutions leurs discours avec une telle délectation que nous retournions au campus ragaillardis prêts à assister aux prochains meetings qu’on attendait avec impatience. Certains de ses opposants nous aidaient même organiser nos manifestations. Ils avaient des relais dans les différentes institutions, tellement le lien était fort entre les étudiants et les opposants politiques.
En réalité, les universités étaient fortement politisées. Il nous arrivait même d’organiser des débats à caractère politique sur le campus.
Mais beaucoup d’entre nous ont été déçus des années plus tard au vu des actes posés par eux une fois au pouvoir.
Nous avons compris que l’élite guinéenne et surtout l’élite politique ou plus exactement une certaine élite guinéenne constitue une part essentielle des problèmes de la Guinée. Une élite qui défend des principes dans un contexte donné et qui, sans véritable changement de contexte, défend des principes totalement contraires à la faveur d’un simple changement de statut. On peut comprendre que les discours changent en fonction des contexte et qu’ils s’adaptent à un contexte nouveau. Mais changer de discours parce que sa situation ou son statut personnel a changé, est difficile à comprendre. Ces revirements, ces reniements, ces volt-face sont d’une gravité telle que les jeunes, les citoyens de manière générale finissent par n’avoir plus de modèles et ne croient plus aux discours.
Malheureusement, cela continue. Les discours de certains acteurs politiques varient selon leurs intérêts du moment.
La crise de convictions, l’inconstance et l’incohérence sont telles que finalement toute l’élite politique est rangée dans la même catégorie. C’est triste.
Me Mohamed Traoré
Ancien Bâtonnier