Guinée, le Piège Constitutionnel : Une Rigidité Exorbitante qui Étouffe la Démocratie et le Développement

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L’article 198 de l’avant-projet de la nouvelle constitution guinéenne encadre le processus de révision constitutionnelle. Bien que ce processus vise à assurer une certaine stabilité et à encadrer les modifications de la Constitution, plusieurs aspects méritent une critique acerbe à la lumière des principes de droit constitutionnel. Voici une analyse critique structurée autour des principales préoccupations :

  1. Concentration des Pouvoirs et Risques de Manipulation Politique

L’article 198 confère au Président de la République une influence considérable sur le processus de révision constitutionnelle. En particulier, le fait que l’initiative de révision puisse être annoncée uniquement par le Président, et que celui-ci puisse choisir de soumettre un projet uniquement au Parlement, concentre une partie significative du pouvoir de révision entre ses mains. Ce pouvoir d’initiative exclusif pourrait être utilisé pour manipuler le processus en fonction des intérêts politiques du moment.

La concentration de ce pouvoir entre les mains de l’exécutif peut compromettre le principe de séparation des pouvoirs, essentiel à une démocratie équilibrée. Le processus de révision constitutionnelle devrait impliquer un consensus plus large et inclure des mécanismes pour limiter le risque d’abus de pouvoir par l’exécutif. Une révision constitutionnelle devrait idéalement être déclenchée par un large éventail d’acteurs, y compris des organes législatifs et judiciaires, afin de garantir un équilibre des pouvoirs et une représentation plus équitable des intérêts nationaux.

  1. Exigences de Participation au Référendum et Démission du Gouvernement

L’article impose une exigence de participation de 60% des électeurs inscrits pour que le référendum soit pris en considération, ce qui est très élevé. En outre, la démission obligatoire du Gouvernement et l’interdiction de promotion des membres du Gouvernement après le référendum, indépendamment du résultat, peuvent être perçues comme des mesures punitives qui ne favorisent pas un débat démocratique sain.

Exiger un taux de participation aussi élevé peut rendre le processus de révision constitutionnelle extrêmement difficile, voire impossible, à moins que la participation soit exceptionnellement élevée. Cela pourrait empêcher des révisions nécessaires ou souhaitées par une majorité significative de citoyens. En outre, la démission automatique du Gouvernement peut être perçue comme une mesure coercitive qui pourrait décourager les responsables politiques d’engager des révisions nécessaires pour le bien public, nuisant ainsi à la stabilité gouvernementale et à la continuité des politiques publiques.

  1. Procédures de Pétition et Exclusion de la Révision en Dernière Année de Mandat

L’introduction d’une procédure de pétition permettant aux citoyens de s’opposer à une révision constitutionnelle est une innovation intéressante, mais la condition de recueillir un dixième des signatures des électeurs inscrits est une exigence lourde et pourrait être inatteignable. De plus, la prohibition de la révision constitutionnelle pendant la dernière année d’un mandat pourrait être utilisée pour éviter des changements nécessaires dans des périodes critiques.

Le seuil élevé pour les pétitions peut rendre le mécanisme de contrôle citoyen inefficace, surtout si le processus de collecte de signatures est complexe et non accessible à tous les citoyens. Par ailleurs, interdire la révision constitutionnelle durant la dernière année du mandat peut empêcher des ajustements nécessaires qui pourraient être cruciaux pour adapter la constitution aux évolutions politiques ou sociales récentes. Ce genre de restriction pourrait nuire à la flexibilité et à la réactivité de la Constitution face aux besoins de la société.

  1. Révisions Interdites Avant 30 Ans et Implications

L’interdiction de réviser la Constitution pendant une période de 30 ans pourrait sembler excessive et rigide. Cela peut rendre difficile l’adaptation de la Constitution à des évolutions politiques, sociales ou économiques imprévues.

Un intervalle de 30 ans sans possibilité de révision peut être trop restrictif. Les constitutions doivent pouvoir évoluer avec le temps pour rester pertinentes et efficaces. La rigidité excessive peut entraîner une discordance entre la Constitution et les réalités sociétales, rendant la loi fondamentale inadaptée aux besoins changeants de la société.

  1. Absence de Mécanismes de Contrôle des Révisions

L’article ne mentionne pas de mécanismes indépendants ou de garde-fous pour vérifier que les révisions ne violent pas des principes fondamentaux ou des droits humains. L’absence d’une telle supervision peut ouvrir la voie à des révisions qui pourraient compromettre les valeurs démocratiques ou les droits fondamentaux.

Une révision constitutionnelle devrait inclure des mécanismes de contrôle pour garantir que les changements apportés ne portent pas atteinte aux principes constitutionnels fondamentaux, comme les droits humains et la séparation des pouvoirs. La supervision par des organes indépendants ou des commissions constitutionnelles pourrait aider à prévenir les dérives et à assurer que les révisions servent l’intérêt général.

En conclusion, l’article 198 de l’avant-projet de constitution guinéenne présente plusieurs problèmes potentiels en matière de concentration des pouvoirs, de rigueur des exigences de participation, de flexibilité dans le processus de révision, et de mécanismes de contrôle. Pour garantir une révision constitutionnelle efficace et démocratique, il est crucial de veiller à ce que le processus soit équilibré, transparent, et adaptable aux besoins évolutifs de la société tout en respectant les principes fondamentaux de la démocratie et des droits humains.

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