Faya Millimouno : “ Si cette Constitution est adoptée, c’est de facto un parjure et une violation du serment”

il y a 3 heures 26
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Alors que le Conseil national de la transition (CNT) propose dans le projet de nouvelle Constitution de porter la durée du mandat présidentiel de 5 à 7 ans renouvelables, Faya Lansana Millimouno, président du Bloc Libéral, tire la sonnette d’alarme. Dans un entretien accordé à Guinée360.com, il fustige l’“arrogance” d’un organe non élu qui s’arroge le droit de “redéfinir les règles du jeu démocratique”, au détriment des aspirations profondes du peuple guinéen.

Guinée360.com : Quelle est votre réaction à la proposition du CNT d’instaurer un mandat présidentiel de 7 ans renouvelable ?

Faya Millimouno : C’est une grande déception. Cette proposition donne le sentiment que le CNT ne s’adresse pas au peuple de Guinée, un peuple pourtant marqué par une histoire douloureuse de présidences à vie. Or, ce ne sont pas les longues durées au pouvoir qui garantissent le bonheur des citoyens. Regardez l’exemple du Général Conté ou d’Ahmed Sékou Touré : des décennies de pouvoir qui n’ont pas empêché l’instabilité, la pauvreté et la corruption. D’ailleurs, nous avons déjà connu le septennat. En 2001, une révision constitutionnelle l’a réintroduit, permettant à Conté d’être élu en 2003 pour un mandat de sept ans. Résultat : cinquante ans après l’indépendance, la Guinée n’avait eu que deux présidents. Est-ce que cela a rendu notre pays plus stable ou plus développé ? Non. La tendance en Afrique, c’est de réduire les mandats. Même le Sénégal, souvent cité en exemple, est revenu à un mandat de 5 ans. Pourquoi la Guinée ferait-elle le chemin inverse ?

Le président du CNT justifie ce choix par la nécessité d’une stabilité institutionnelle. Cet argument vous convainc-t-il ?

Pas du tout. L’histoire de la Guinée démontre le contraire. Sékou Touré a régné pendant 26 ans, Conté pendant 24 ans, et pourtant chacun a été remplacé par un coup d’État dès sa mort. La longévité au pouvoir n’a jamais assuré la stabilité en Guinée. Je suis déçu par les déclarations de Dansa Kourouma. On aurait pu espérer que cette transition rompe avec les logiques du passé. Malheureusement, on assiste à une répétition des erreurs historiques.

Voyez-vous dans cette proposition une manœuvre pour permettre à des acteurs actuels de la transition de rester au pouvoir ?

Absolument. Lorsque le CNRD est arrivé au pouvoir, le président Doumbouya a juré de ne pas se présenter à l’élection. La charte de la transition interdit également toute candidature des membres du CNRD, du gouvernement ou du CNT. Pourtant, tout ce qui se passe aujourd’hui semble vouloir ouvrir la voie à une présidence à vie pour le CNRD. Si une telle Constitution est adoptée, ce serait un parjure, une violation du serment du président Doumbouya. Cela ressemblerait étrangement à ce qu’a fait Alpha Condé en 2020. Il avait aussi promis de respecter la Constitution, avant de la modifier pour briguer un troisième mandat.

Quelles conséquences redoutez-vous si cette disposition est maintenue dans la future Constitution ?

Les risques sont énormes. Cela pourrait entraîner de nouvelles instabilités politiques et sociales. La Guinée est déjà le premier pays d’Afrique francophone en nombre de demandes d’asile en France, le troisième au monde, alors qu’elle n’est pas en guerre. Si cette nouvelle Constitution passe telle quelle, avec des ouvertures à la manipulation comme sous Alpha Condé, nous allons droit vers une crise. On ne peut pas jouer avec l’avenir de 14 millions de Guinéens pour des ambitions personnelles.

Que comptez-vous faire pour vous opposer à ce que vous qualifiez de dérive?

Nous allons informer et sensibiliser. Le Bloc Libéral, avec la CPR, mènera une campagne d’explication en français et en langues nationales. Le peuple doit comprendre que ce chemin est contraire aux engagements initiaux de la transition et dangereux pour l’avenir démocratique de notre pays.

L’article Faya Millimouno : “ Si cette Constitution est adoptée, c’est de facto un parjure et une violation du serment” est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.

Lire l'article en entier