Dossier Damaro: dépourvu de preuves, la Crief enjoint la BCRG, l’EDG et la SEG à lui fournir des pièces justificatives

il y a 11 mois 322
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Amadou Damaro Camara avait été inculpé et placé en détention provisoire depuis 1 an et 7 mois pour des faits présumés de détournement des deniers publics portant notamment, sur un montant de 15 milliards Gnf, destiné aux travaux de construction du futur siège du parlement guinéen. Malgré cette longue durée de détention préventive, la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) est encore à la phase de recherche des preuves contre l’ancien président de l’Assemblée nationale guinéenne.

Amadou Damaro Camara a comparu devant le juge Kova Zoumanigui pour la première fois, lundi 9 octobre 2023. Dès l’entame, il rappelle tacitement au président de la chambre de jugement qu’il doit être confronté aux preuves de ceux qui l’accusent de détournement. « Sous d’autres cieux, l’État (le poursuivant, ndlr) aurait commencé par commanditer un audit dans tous les points de gestion… Un rapport est établi et est opposé au gestionnaire. C’est seulement après, si des points incriminés n’ont pus être expliqués que l’État envoie le dossier devant la justice pour procéder à des poursuites», explique l’ancien président de l’Assemblée nationale.

Amadou Damaro Camara rejette en bloc les accusations de détournement des 15 milliards Gnf. Il explique qu’à l’origine, ce montant faisait partie d’une subvention exceptionnelle. Selon lui, elle est « non remboursable et n’est pas nomenclaturée».

Et puisqu’on suppose qu’il a détourné ce montant, le président de la 9e législature, donne des détails jusque-là inconnus du juge. «Nous avons bénéficié d’un don pour le palais de l’Assemblée nationale estimé par le partenaire chinois à 40 millions de dollars. Un premier site avait été attribué à l’Assemblée nationale juste derrière le ministère des Affaires étrangères à Koloma depuis 2015 et des maquettes ont été élaborées. Au compte de la partie guinéenne, en plus de la viabilisation du terrain, les Chinois ont demandé à ce qu’il y ait une ligne électrique de haute tension et un transformateur autonome sur le site. Qu’il y ait de l’eau en abondance pour les travaux. J’ai écrit à l’EDG (Électricité de Guinée). Elle évalue les travaux qui devrait partir de Centre émetteur (Kipé) à Koloma à 750 millions. Je fait la commande des travaux et j’ai payé le montant. J’ai fait la même chose pour la SEG (Société des eaux de Guinée) qui a évalué ses travaux à 350 millions et j’ai payé ».

Ensuite, Damaro indique avoir fait recours à la société de M. Kim (Jun Sen Cheng alias Kim, ndlr) son co-accusé. Celui-ci se serait montré désintéressé, en raison de ses travaux antérieurs non payés au temps du feu général Lansana Conté et d’autres sous Pr Alpha Condé. Face à la garantie à lui faite, Kim réalise finalement les travaux à hauteur de 1 milliard 800 millions Gnf.

«En trois séances, la gendarmerie a pu obtenir les chèques de paiement et le solde qui restait dans le compte à la Banque centrale, à la date du 5 septembre 2021. Il y avait, je pense, un peu moins de 6 milliards. Monsieur le président l’utilisation des 15 milliards ne relève même pas de la comptabilité : 6 milliards se trouvent dans le compte à la Banque centrale ; 3 milliards pour la réalisation de la clôture et quelques travaux (eaux, électricité et guérite pour la sécurité) ; et nous avons clôturé la session ordinaire de l’Assemblée nationale le 5 juillet 2021 avec les 6 autres milliards GNF. Nous avons payé les primes des députés. Monsieur le président, depuis 18 mois, je croupis en prison pour juste voir est-ce que les 15 milliards ont été utilisés. Je n’ai pas pris un franc et personne d’autre. C’est très facile Monsieur le président, demandez les services (de l’Assemblée nationale, ndlr), ce sont les mêmes qui sont là-bas. Ils vont vous donner les émargements des députés. Il y en a 114. Appelez au moins une dizaine pour vérifier s’ils ont été payés ou non . C’est tellement simple qu’on veut compliquer par un langage juridico-politique».

Après l’exposé de l’ancien président de l’Assemblée nationale, le président de la chambre de jugement, Francis Kova Zoumanigui, n’avait pas d’autre choix. Il se rend compte qu’il n’avait jamais reçu certains détails et ordonne aux entités concernées de lui fournir les pièces lui permettant de vérifier les déclarations de Amadou Damaro Camara à la barre.
Le juge enjoint, entre autres, au chef comptable de l’Assemblée nationale actuel Conseil national de la transition (CNT) de lui fournir les pièces comptables relatives au contrats de fourniture d’eau et d’électricité sur le site qui abritera le futur parlement guinéen ainsi que les preuves de paiement des primes des députés.

Au gouverneur de la Banque centrale de fournir à la chambre de jugement tous les relevés de mouvement bancaire liés à l’utilisation des 15 milliards et les différents bénéficiaires, de la date de versement du montant jusqu’au 30 décembre 2021. Cela prend en compte les montants antérieurs et les relevés de quatre mois après le départ de Damaro de l’Assemblée nationale. L’objet de l’allocation des 15 milliards devra être également communiquer à chambre de jugement.

À leur tour, le directeur général d’EDG et celui de la Société des eaux de Guinée (SEG) devront fournir les preuves de paiement des travaux que leurs sociétés respectives auraient réalisé sur le site de Koloma.

L’ancien président de l’Assemblée détenu depuis le 27 avril 2022 a plaidé «absolument non coupable» dans cette affaire. Il appartiendra à la partie civile et au parquet spécial ainsi qu’à la chambre de jugement de prouver le contraire. Pour l’instant Kova Zoumanigui court après les preuves.

Rendez-vous le 16 novembre 2023 pour la suite de ce feuilleton judiciaire.

L’article Dossier Damaro: dépourvu de preuves, la Crief enjoint la BCRG, l’EDG et la SEG à lui fournir des pièces justificatives est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.

Lire l'article en entier