Tham Camara : “Nous allons continuer à négocier mais ça ne veut pas dire se compromettre”

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Amadou Tham Camara, président du Conseil d’administration de la Maison de presse de Guinée, a clarifié qu’aucun engagement écrit n’avait été signé lors de la récente rencontre entre le Premier ministre et les présidents des associations de presse, jeudi 2 mai 2024 à la Primature. Il précise que l’initiative de mettre en place une instance d’autorégulation des médias était une démarche des associations de presse pour s’autoréguler, similaire à ce qui se fait déjà au Sénégal et au Togo. Amadou Tham Camara rappelle aussi à ceux qui sont contre les négociations avec le CNRD pour obtenir la libération des médias brouillés que toutes les avancées légales en matière de liberté de presse en Guinée ont été obtenues par la négociation, notamment la loi sur la liberté de la presse adoptée en 2010. C’est pourquoi il a insisté sur le fait que les négociations sont essentielles pour progresser et éviter un retour en arrière, notamment en matière de dépénalisation des délits de presse. Cependant, relève-t-il, il n’est pas question de “se compromettre” en tant qu’acteur majeur de la liberté de presse dans le pays.

Ci-dessous l’intégralité de ses propos devant les journalistes ce vendredi 3 mai 2024 à la Maison de la Presse de Conakry :

Je voudrais faire une petite mise au point par rapport à la rencontre que vous avez certainement suivie hier entre le Premier ministre, chef du gouvernement, et les présidents des associations de presse, accompagnés par les directeurs des médias qui sont impactés. Il y a beaucoup de choses qui ont été dites et écrites. Je voudrais dire ici que nulle part un engagement écrit n’a été signé. Ce dont il est question, de l’initiative des associations bien avant qu’aujourd’hui, la mise en place d’une instance d’autorégulation des médias. C’est une initiative des associations de presse pour pouvoir s’autoréguler. Et ce n’est pas une invention de la Guinée. Le Sénégal le fait déjà à travers le CORED et le Togo le fait. Il a été dit que nous sommes allés dire que nous allons maintenant faire allégeance au régime et que nous allons vendre la presse. Et que la liberté de la presse est non négociable. Je voudrais répondre simplement que toutes les dispositions légales en matière de presse ont été obtenues par la négociation. J’en ai pour preuve la dernière loi, c’est-à-dire la loi L002 qui a été adoptée en 2010. Nous étions 7 journalistes à avoir fait cette loi-là au sein du Conseil national de la transition. Cinq journalistes ont été envoyés par des associations de presse. Le président, c’était le Doyen Diallo Souleymane qui a été envoyé par l’AGPI, le vice-président était Elhadj Fodé Bouya Fofana qui avait été envoyé par l’AJG, le rapporteur feu Sékou Mady Traoré qui a été envoyé par l’URTELGUI, Hadja Saran Touré qui avait été envoyée par l’APAC, Abdoulaye Condé de Nouvelle Tribune, Mourana Diallo et moi-même comme secrétaire qui avait été envoyé par l’AGUIPEL. C’est nous qui avons fait la loi sur la liberté de la presse. C’est moi personnellement qui ai saisi toute la loi. Alors, c’est un peu notre enfant. On ne peut pas vendre notre enfant. Il faut que les gens sachent de quoi on parle. Simplement, il faut être responsable. Il faut savoir que tout ce que la presse a obtenu dans ce pays, rien n’a été fait par des luttes désordonnées. Non! C’était par les négociations. Tout a été obtenu par les négociations. Il n’y avait que la RTG et le Horoya ici. C’est par les négociations qu’il y a eu la presse écrite [en Guinée]. Il n’y avait pas de radio privée ici. La libéralisation des ondes a été obtenue par des négociations. Lorsqu’un journaliste faisait une diffamation, il partait en prison. La dépénalisation a été obtenue par les négociations. La presse en ligne n’était pas reconnue. Elle a été reconnue par des négociations. La maison de la presse où nous sommes a été obtenue par des négociations. Donc, nous, associations, nous croyons aux vertus des négociations et c’est dans cette ligne que nous nous inscrivons. On n’obtiendra absolument rien d’autre par un autre moyen si ce n’est pas par les négociations. À commencer par les conventions collectives. Tant qu’on ne négocie pas, on ne les obtiendra pas. Ça ne s’obtiendra pas par la force. Il faut que ce soit très clair. Donc, nous nous allons continuer à négocier. Mais ça ne veut pas dire qu’on va se compromettre, qu’on va se dédire. Nous sommes responsables. Les instances d’autorégulation existent sous d’autres cieux. Il faut que nous reconnaissions que parfois nous n’avons pas tout bien fait. Au lieu que les gens prennent la décision aujourd’hui d’aller ré-pénaliser [les délits de presse]. Parce qu’il ne faut pas se mentir, c’est possible. Hier, lorsque vous diffamiez, vous alliez en prison. C’est ce qui était dans la loi. C’est ce que nous avons réussi à enlever dans la loi. Aujourd’hui, c’est de cette liberté que vous jouissez. Mais ce qui risque d’arriver aujourd’hui, il suffit simplement que les gens se décident, qu’ils fassent un projet de loi, qu’ils l’amènent au CNT, qu’on dise maintenant que la diffamation, au lieu que vous payiez 2 millions d’amende, vous allez faire 2 ans de prison. La loi va passer. Est-ce ce qu’on veut ? Je crois que non ! Il est bon qu’on négocie. Nous sommes perdants dans les rapports de force. Il faut que ce soit très clair.

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