Tensions au sein de l’armée nigérienne, intervention militaire de la CEDEAO, attaques djihadistes… Dr Niagalé Bagayoko à Guineematin

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Le chef de la junte nigérienne, le Général Abdourahamane Tchiani, a annoncé samedi dernier, 19 août 2023, le lancement d’un dialogue national et 3 ans comme durée maximale de la transition après qu’il a reçu une délégation de la CEDEAO pour la première fois, celle-ci a même pu rencontrer le président déchu Mohamed Bazoum. L’organisation sous-régionale rejette ce plan qu’elle juge « inacceptable ». L’option militaire semble désormais être la seule voie qui s’offre à la CEDEAO pour restaurer dans ses fonctions l’ancien président, Mohamed Bazoum, en tout cas si elle maintient toujours sa position de départ, rétablir l’ordre constitutionnel.

Dans un entretien téléphonique accordé à Guineematin.com hier, lundi 21 août 2023, Dr Niagalé Bagayoko, présidente de l’African Security Secteur Network (ASSN) livre son analyse sur les scénarios possibles d’une éventuelle intervention militaire au Niger, les divisions au sein de l’armée, la recrudescence des attaques djihadistes et les risques qu’encourent la CEDEAO dans cette crise traversée par ce pays d’un peu plus de 25 000 000 d’habitants depuis le coup du 26 juillet passé.

À l’issue de la réunion des chefs d’état-major les 17 et 18 août à Accra (Ghana), Abdel-Fatau Musah, commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l’organisation, indiquait que : « Nous sommes prêts à intervenir dès que l’ordre sera donné. Le jour de l’intervention a aussi été fixé ». Samedi soir lors de son allocution télévisée, le Général Tchiani a fait savoir que cette intervention ne sera pas « une promenade de santé comme certains semblent le croire ».

Mais comment cette opération pourrait-elle se faire sur le terrain si toutefois elle a lieu ?

 « Il y a plusieurs scénarios d’intervention possibles : il y a une opération coup de poing, qui viserait à exfiltrer le président Bazoum retenu en otage, mais qui semble de plus en plus difficile à mettre en œuvre à mesure que le temps passe. Il y a peut-être aussi la possibilité de recourir à des moyens aériens pour bombarder des cibles, mais là aussi avec des risques. Ce qui fait peur dans cette intervention, c’est la façon dont les civils pourraient eux-mêmes être impliqués. Et donc du nombre de victimes collatérales puisque l’on voit que la junte bénéficie d’un soutien populaire, et que des mouvements de recrutements au sein des populations civiles ont été lancés récemment. C’est à mon avis le volet le plus périlleux d’une intervention sur le plan strictement militaire », a estimé Dr Bagayoko.

Alors autant dire que l’issue de la crise au Niger reste très incertaine surtout que des divisions semblent exister au sein de son armée.

« Il est difficile de faire une projection bien entendu sur la façon dont va évoluer la crise, mais ce qui est très préoccupant, c’est que l’on voit une grande diversité d’acteurs en jeu. Bien entendu l’armée, mais en son sein il semble y avoir des divisions possibles entre cette fameuse garde présidentielle et des unités plus opérationnelles comme les forces spéciales. C’est aussi le cas des divisions entre les forces armées et les forces de sécurité intérieures. On sait que le président Bazoum avait souhaité rééquilibrer en faveur des secondes, les effectifs notamment en dotant d’effectifs supplémentaires par recrutements spéciaux la garde nationale », a poursuivi la politologue.

Depuis l’arrivée au pouvoir du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) le 26 juillet dernier, une dizaine d’attaques djihadistes ont été enregistrées, avec notamment la plus meurtrière perpétrée le 15 août à Koutougou (région de Tillabéri) faisant 17 soldats tués et 20 blessés.

« Il faut aussi beaucoup s’inquiéter des tensions que l’on constate du côté des groupes armés. Non seulement les groupes armés djihadistes qui ont repris de la vigueur depuis le coup d’État, mais aussi il faut prendre en considération cet appel qui a été lancé par Rhissa Ag Boula (ancien rebelle et qui était ministre d’État dans le gouvernement de Mohamed Bazoum) , qui a appelé à la défense de la République en prenant de nouveau les armes. À cela s’ajoute le risque d’affrontements entre armées, d’une part avec celles de la force de la CEDEAO, et celles des États dirigés par des juntes », a expliqué la présidente de l’African Security Secteur Network.

L’enjeu est grand pour la CEDEAO dans la crise au Niger, puisqu’elle y joue tout simplement son avenir désormais. Au-delà de la défiance des putschistes en place à son égard et le soutien des populations civiles à la junte, certains des ses États membres sont opposés à l’intervention militaire.

Dr Niagalé Bagayoko, présidente de l’African Security Secteur Network (ASSN)

« C’est aujourd’hui à mon avis l’avenir même de la CEDEAO qui se joue. D’une part sa crédibilité puisque l’on sait qu’elle a perdu beaucoup d’aura aux yeux des opinions publiques, non seulement parce qu’elle n’a pas été en mesure d’intervenir militairement contre les groupes armés djihadistes, en tout cas depuis 2016. Ensuite, parce qu’elle est perçue comme ayant été beaucoup trop indulgente envers les manipulations constitutionnelles qui ont été opérées par un certain nombre de chefs d’État, dont le président déchu de la Guinée, Alpha Condé. Mais aussi parce que l’on voit que certains États qui sont opposés à l’intervention menacent de la quitter comme le Mali et le Burkina Faso. On voit aussi que le Cap-vert s’oppose à cette intervention », a rappelé Dr Niagalé Bagayoko.

Entretien réalisé par Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com 

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