Journée de la liberté de la presse : les journalistes guinéens célèbrent cette journée entre fermeture des médias, division, chômage et disparition

il y a 7 heures 29
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Le monde de la presse a célébré ce samedi 3 mai 2025 la Journée internationale de la liberté de la presse. Une journée entière qui permet chaque année depuis 1993 de rappeler les atteintes portées contre les journalistes et la nécessité de défendre ce droit d’expression fondamental pour l’instauration d’une démocratie. En République de Guinée, cette journée est célébrée dans un contexte sociopolitique assez tendu où près de 1000 journalistes se retrouvent au chômage, et où l’on déplore des disparitions de journalistes et d’acteurs de la société civile. Cet après-midi, notre rédaction a recueilli les réactions de professionnels des médias et de syndicalistes.

Mamadou Boulléré Diallo, journaliste, reporter d’images, responsable de la section langue nationale à Espace TV, au chômage depuis 12 mois, célèbre cette journée dans un contexte assez difficile. « Nous n’avons pas célébré, nous avons plutôt commémoré les 12 mois de chômage, les 12 mois d’indignité, les 12 mois d’abandon, les 12 mois doublés de regrets, les 12 mois sombres, les 12 mois surtout de la dégringolade que la Guinée a subie. La Guinée a le triste record de chutes dans le monde entier, 25 points perdus dans le classement de Reporters Sans Frontières », a-t-il expliqué.

À en croire Mamadou Boulléré Diallo, « Ça fait honte pour tout Guinéen, qu’il soit journaliste ou pas, parce que cela semble dur, les gens vont se méfier de nous, étant donné qu’on pouvait éviter cela, c’est ça le problème, on pouvait éviter mais on ne l’a pas évité. Et ce qui est triste, c’est de savoir que ceux qui dirigent le département du journalisme et de la communication sont des journalistes. On ne peut pas dire qu’ils sont à la base de ces problèmes, mais qu’est-ce qu’ils ont fait pour empêcher que cela n’arrive ? », a-t-il rappelé tout en ajoutant qu’ils ne vivent plus mais qu’ils existent tout court.

De son côté, Mamadou Karakan Diallo, chroniqueur à Radio Nostalgie FM, déplore la division entre les professionnels de la presse, les patrons de médias et les autorités : « Ce que je déplore aussi, dans cette célébration, c’est bien entendu cette division que nous avons pu constater au niveau de la presse. Si vous avez constaté avec les différents discours, le syndicat a lu son discours à part, les associations patronales ont lu leur discours à part, chose que je trouve vraiment déplorable et dommageable, parce que ça n’honore pas aujourd’hui la corporation. Si on essaie d’aller en rangs dispersés, nous donnons la possibilité à ceux qui veulent aujourd’hui nous faire taire à jamais de pouvoir le faire. C’est pourquoi nous interpellons les autorités guinéennes par rapport à cet aspect-là, et notamment les journalistes aussi par rapport à cet aspect, parce que nous devons conjuguer le même verbe. »

Poursuivant, ce jeune journaliste interpelle la Haute Autorité de la Communication par rapport à la situation actuelle des web-télés, qui sont aujourd’hui dans le viseur de cette instance de régulation des médias en République de Guinée. « Nous avons vu les menaces qui ont été brandies par la Haute Autorité de la Communication concernant ces web-télés, alors qu’aujourd’hui, ce sont les textes qui doivent s’adapter aux réalités, ce n’est pas aux réalités de s’adapter aux textes. Donc, il faudrait essayer de voir la façon dont on a fait avec les sites dans les années 2010 où pratiquement ça n’était pas reconnu par les textes de loi. Il y a des radios aussi qui sont brouillées, qui existent toujours. Tout à l’heure, je parlais avec un haut responsable au niveau de l’URTELGUI qui m’a laissé entendre qu’il y a une menace aujourd’hui qui plane sur des médias audiovisuels, pratiquement sur 78 à peu près, il n’y en a que 5 qui sont en règle. La quasi-totalité des médias audiovisuels sont menacés aujourd’hui de fermeture, et chose qui n’honore pas la République de Guinée, parce que vous entendez parler de démocratie dans un pays quand les différentes opinions s’expriment, tout le monde n’est pas appelé à partager le même avis que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui », a-t-il laissé entendre.

Abdoulaye Cissé, premier secrétaire chargé de la communication du SPPG (Syndicat des Professionnels de la Presse de Guinée), a fait savoir qu’ils célèbrent cette journée dans un contexte un peu particulier, dans la mesure où la presse guinéenne traverse une période très difficile avec la fermeture des médias et la disparition de journalistes. « Donc, c’est un contexte particulier parce que nous estimons avec beaucoup de regrets que la liberté de la presse n’évolue pas, surtout en Guinée. Et c’est vraiment dommage pour notre pays. Nous espérons seulement peut-être que les autorités prendront conscience de la situation pour essayer de gérer le problème avec beaucoup de responsabilité. C’est très important. Parce que ce que nos autorités ne comprennent pas aujourd’hui, pour elles, vouloir museler la presse peut-être que ça peut les arranger, oui, d’une part. Mais de l’autre côté aussi, n’oubliez pas, ça peut aussi porter préjudice, comme c’est ce que nous vivons aujourd’hui avec ce recul, par rapport à ce rapport de Reporters Sans Frontières. »

Par ailleurs, ce responsable du SPPG pense que la fermeture des radios et télévisions d’Espace, de Djoma et de FIM est un frein à la liberté d’expression en Guinée. « D’ailleurs, c’étaient les médias les plus écoutés en Guinée, ayons le courage de le dire. Donc, si vous remarquez, aujourd’hui, souvent les gens nous disent : « Mais actuellement, on ne vous voit plus, maintenant, vous ne réagissez pas ». Ce n’est pas parce qu’on ne réagit pas. Ils ont fermé les médias les plus écoutés, vous comprenez un peu. Donc, ce n’est pas facile. C’est vrai, nous communiquons, mais l’impact n’est pas comme avant. Donc, c’est pour autant dire que la fermeture de ces médias joue énormément, non seulement sur le syndicat, mais sur toute la Guinée, parce que même la population guinéenne était tellement habituée à ces médias, tout le monde prenait des informations à travers ces médias. »

Mamadou Yaya Barry

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