Interview. Mohamed Ali Bathily : « le Dr Adama Traoré a déclaré une mauvaise guerre à l’AIPP »

il y a 12 heures 39
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La société AIPP (Agence internationale promo-pharma) se retrouve au cœur d’un bras de fer judiciaire en Guinée avec l’un de ses anciens délégués médicaux, le Dr Adama Traoré. Pour en savoir plus sur ce bras de fer, MédiaGuinee a approché le conseiller juridique de l’AIPP  pour une interview.

 

Mediaguinee :  Depuis maintenant plusieurs mois, l’AIPP est dans un procès intenté par un de ses anciens employés. Qu’est-ce que vous en savez ?

 

Mohamed Ali Bathily : Nous sommes dans un procès, effectivement. Mais si je peux me permettre de qualifier ce procès, c’est un mauvais procès. Nous sommes entraînés, malgré nous, devant une instance judiciaire, à différents niveaux pour des questions qui, me semble-t-il, ne devraient pas arriver là. Notamment avec l’AIPP et le docteur Adama Traoré. Adama Traoré, pharmacien de son état, a été employé comme délégué médical pendant plusieurs années par l’AIPP. Et au départ, son contrat était un contrat malien, parce que l’AIPP n’était pas encore installé en Guinée en tant que société de droit guinéen. De 2012 jusqu’en 2015, c’était une société de droit malien qui travaillait en Guinée ici. Et lorsque la Guinée a permis que la société puisse s’installer elle-même en son nom, sous l’égide du droit guinéen, elle l’a fait. Et c’est dans ce processus-là qu’Adama a pu travailler pendant plusieurs années, même plus de dix ans. Si je ne m’abuse, avec l’AIPP Guinée. Qu’est-ce qui s’est passé ? Le problème qui est advenu n’est pas de la faute de l’AIPP. Les délégués médicaux normalement ne doivent pas ouvrir et gérer des officines de pharmacie en leur nom. Les délégués médicaux se contentent de faire la promotion des produits pharmaceutiques, des médicaments auprès des hôpitaux, des cliniques et des soignants. Ils ne peuvent pas ouvrir des pharmacies et gérer des officines en leur nom. Pourquoi ? Parce que ce serait tout simplement de la concurrence déloyale. Cette déloyauté venant du fait que les délégués médicaux reçoivent des produits gratuitement. Et lorsqu’on leur donne ces produits, c’est pour aller les offrir aux médecins, afin que les médecins les essayent et apprécient si les produits sont bons ou pas bons. Donc ils reçoivent des produits gratuitement. Pour la petite histoire, le docteur Adama Traoré recevait pour le compte de la Guinée l’équivalent de 100 millions de francs CFA de produits gratuitement par an. Et il ne rendait pas compte. Il gérait ça sans jamais dire qu’est-ce qu’il en a fait, pour la société c’était pour la promotion. Et donc lui, il le gérait. Donc il y a un risque que si on donne 100 millions de produits gratuitement à quelqu’un qui va ouvrir sa propre pharmacie, il y a un risque qu’il aille vendre ces produits-là au lieu de les donner gratuitement dans les formations hospitalières, dans les cliniques. Ils étaient quatre dans ce cas, ils ont ouvert des pharmacies. Et à l’insu de AIPP, AIPP n’était pas au courant. C’est un fait fortuit qui a amené AIPP à être au courant que ces délégués avaient ouvert des officines de pharmacie ici à Conakry. Et qu’ils continuaient à recevoir de l’agence des produits gratuitement. Une fois, une connaissance du docteur Mantala Sangaré, qui est le promoteur d’AIPP, lui a dit on a manqué de produits. On l’a cherché et quelqu’un nous a conseillé d’aller dans ta pharmacie, c’est là-bas qu’on a pu aller acheter les produits. Lui il a dit non, moi je n’ai pas de pharmacie à Conakry, qu’est-ce que tu me racontes là ? Il dit si tu as une pharmacie, et tout le monde le sait, on a été là-bas. Lui aussi il a envoyé des gens vérifier, il a trouvé que la pharmacie existait. Et quand les gens ont vérifié, il a envoyé un huissier constater, et il s’est trouvé que cette pharmacie appartenait au docteur Adama Traoré. Donc Adama Traoré gère une pharmacie, il y reçoit, et c’est lui qui recevait les 100 millions de médicaments qu’il donnait aux autres.

 

Il ne se rendait pas compte, il a dit c’est grave. On a appelé les 3 autres pharmaciens qui avaient aussi leur officine, mais qui étaient des délégués. On leur a dit, vous avez des officines de pharmacie, ils ont tous reconnu. On leur a dit, maintenant vous choisissez entre votre statut de délégué médical, ou vous quittez AIPP, vous allez gérer vos pharmacies, mais vous ne pouvez pas faire les deux en même temps. Parce qu’il y a concurrence déloyale. En cas de problème, les lois stipulent en ce moment que l’entreprise, donc AIPP, qui ferme les yeux sur cette pratique-là, est aussi responsable que vous. Donc nous, on ne veut pas de problème avec l’Etat en Guinée, ni avec l’ordre des pharmaciens guinéens. Nous voulons que votre statut soit clair, ou vous êtes délégué médical, ou vous gérez vos officines de pharmacie. Ils ont choisi d’aller dans les officines de pharmacie. On leur a dit de choisir, mais au lieu de choisir, ils ont dit, nous on ne choisit pas, si ça ne vous convient pas que nous fassions les deux en même temps, il faut nous licencier. Ils ont refusé d’assumer leur choix, mais il faut nous licencier. Alors nous on a dit d’accord, on met fin au contrat entre nous. Et lorsqu’on a décidé de mettre fin au contrat, ils ont amené AIPP devant le juge du travail en disant qu’il y a licenciement abusif. Ce n’est pas tout le monde. Seuls, et tous, ils ont été chez le juge du travail pour dire qu’il y a licenciement abusif. Moi je suis le conseil juridique d’AIPP à Bamako, à Abidjan, à Lomé, un peu partout. On m’a dit, il faut venir à Conakry, il y a une situation qu’on ne comprend pas. C’est la première fois que je suis venu en Guinée. Et moi j’étais étonné, parce que je me suis dit, comment il s’est fait, ça il n’y a pas de quoi fouetter un chat. On est venu, et les responsables d’AIPP m’ont amené chez l’avocat des 4 délégués médicaux. Ils ont tous pris le même avocat.

 

J’ai été, je me suis présenté à lui. Je lui ai dit, écoutez, nous on veut un règlement à l’amiable. Ils ont travaillé plus de 12 ans pour certains, 5 ans, 7 ans, 8 ans. On ne veut pas vraiment qu’on se déchire en se quittant. Ce qu’ils ont fait, ce n’est pas normal. Nous pensions qu’ils allaient eux-mêmes démissionner, parce qu’eux-mêmes reconnaissent que ce n’est pas normal. Mais ils ont dit qu’ils ne vont pas démissionner, mais qu’ils nous demandent plutôt, nous, de les licencier. Bon, on l’a fait. Mais on ne pensait pas qu’ils allaient partir chez le juge, puisque c’est eux qui sont en faute. Et nul ne peut se prévoir de sa propre faute. Comment tu peux faire une faute, prendre cette faute et aller réclamer un droit avec ta faute, chez le juge ? On le dit en droit. Nul ne peut se prévoir de sa propre turpitude. Donc leur turpitude, c’est d’avoir cumulé les fonctions de délégué médical et les fonctions de gérant de pharmacie, de propriétaire d’officine de pharmacie. Voilà ce qui s’est réellement passé. On a dit qu’à cela ne tienne, On veut encore qu’on reste des bons amis. On a dit à leur avocat, calculez tous les droits, tous les droits que le Code guinéen du travail prévoit pour eux en cas de licenciement abusif. Nous allons payer. On évite les procès. C’est leur avocat qui a tenu la plume, qui a fait tous les calculs.

 

Et la seule chose que nous avons dit qu’on ne paiera pas, c’est les dommages intérêts. On dit, on ne vous a pas fait de choses, nous on ne vous a pas causé de tort, on ne vous paye pas de dommages intérêts. On vous paye les droits, mais c’est vous qui êtes partis tous seuls. Maintenant si vous exigez les dommages intérêts, allons-y devant le juge, on va s’expliquer. Nous on ne vous a pas licencié, c’est vous qui êtes partis. Ils ont dit d’accord, on renonce aux dommages intérêts. Et voilà, on a calculé tous les droits et on leur a payé tous les droits. Donc pour nous, dans le protocole qu’on a fait, on était convenu qu’après le paiement de leurs droits, après la signature de ce protocole, on ne va plus devant le juge. Et à notre grand étonnement, les trois autres ont respecté ce protocole d’accord et nous ne nous ont jamais interpellé ou que ce soit.

 

Et parmi les quatre, seul Adama a cru bon saisir le procureur, je crois, de Kaloum, pour se plaindre contre le docteur Mantala Sangaré en disant qu’il y a fraude fiscale, abus de confiance et escroquerie. Bien, moi je vous dis très simplement, je suis étonné. La première infraction de fraude fiscale, à mon avis, aucun citoyen en Guinée ne peut pas se balader dans la rue et aller chez le procureur pointer du doigt un commerçant comme ça en disant, Monsieur le procureur, lui, il fait de la fraude fiscale. Non, il ne gère pas la situation fiscale du commerçant. La situation fiscale du commerçant est gérée par la direction des impôts. La fraude fiscale est une infraction spéciale. Elle est gérée par les impôts. C’est les impôts qui peuvent porter plainte pour fraude fiscale, pas le commun des gens dans la rue. Même si le commun des gens croit être au courant d’une fraude fiscale, il va la signaler à l’impôt et l’impôt instruit maintenant sa dénonciation. Tu vas dénoncer à l’impôt et l’impôt instruit et vérifie si oui ou non ce que tu as dit est vrai. Mais dans ce cas, on n’a pas saisi l’impôt. Directement, on a envoyé un service de police judiciaire soi-disant spécial et qui lui aussi appelle les gens et il a appelé qui ? Deux fonctionnaires de l’AIPP qui venaient d’arriver en remplacement de deux autres qui étaient rentrés. Donc les deux nouveaux arrivés, ils n’avaient même pas deux mois à Conakry. On les a arrêtés, on les a placés en garde à vue. Vous voyez ? En disant vous avez fait la fraude fiscale, vous avez fait ceci. Moi, du coup, j’ai dit je ne vais plus aller traiter avec ces gens-là parce que quelque part je suis étonné. En tant que juriste, je suis étonné. J’ai été voir un cabinet fiscal guinéen en disant j’ai besoin de savoir quelle est la situation fiscale de l’AIPP auprès du service des impôts. Est-ce qu’on nous reproche quelque chose ? Ils ont été, on était au mois de juillet, ils ont dit à date, vraiment, on ne vous reproche rien, vous ne devez rien au service des impôts. Les prochains impôts carrables qu’on peut vous demander, c’est à partir du mois de décembre à la fin de l’année. Or on est en juillet, on n’y est pas encore. J’ai dit au cabinet, allez-y demandez, est-ce que nous pouvons payer par anticipation l’impôt avant la date ? Ils nous ont dit, nous on a besoin d’argent, si vous êtes prêts à le faire. On a dit qu’à cela ne tienne, on a été payer l’impôt sept mois avant la date. On a pris ce quitus, on l’a donné au procureur pour dire, bon, voilà, nous on n’a pas fait de fraude fiscale, voilà ce que les impôts disent. C’est différent de ce qu’Adama fait. Bien, le docteur Adama a dit qu’il y a escroquerie et abus de confiance. L’escroquerie c’était quoi ? Alors, il dit que lui, au moment où on ouvrait AIPP Guinée, le docteur Mantala, lui était convenu qu’il allait donner ses documents en tant que pharmacien guinéen, parce que la loi guinéenne dit que pour faire de la promotion des médicaments, il faut être guinéen.

 

Donc, lui, il va demander l’ouverture de la société, mais il va demander l’agrément au nom de la société, pas au nom du docteur Adama, parce que la société ne lui appartient pas. Les statuts de la société sont clairs, il n’y a qu’un seul actionnaire, c’est le docteur Mantala Sangaré, et ça a été fait chez un notaire. Donc, ce statut n’a jamais bougé, et à l’époque, Adama, en tout cas, ne savait même pas chez quel notaire en Guinée la société avait été ouverte, ni quelle pouvait être le capital de la société. Voilà ce qui s’est passé. Adama, au mois de mai, a donné ses documents pour demander, pour l’AIPP, pas pour son compte personnel, mais pour l’AIPP, l’agrément pour pouvoir travailler ici. Quand Adama l’a fait, au mois de mai, il l’a fait, et au mois de novembre, on s’est aperçu qu’il y a tellement de législation. Il y a la libre circulation des personnes et des biens, les entreprises au sein de la CEDEAO peuvent tout simplement s’installer dans tous les pays de la CEDEAO selon les droits permis aux entreprises nationales. Il y a, en plus de cela, un accord entre la Guinée et le Mali qui date de 1963, signé par les feux Modibo Keïta et Ahmed Sékou Touré, et qui permettait que, sur le plan économique, politique, social, on puisse créer des choses les uns chez les autres. Et, en plus de cela, la loi avait évolué en Guinée, disant que, lorsqu’un pays accorde la réciprocité à la République de Guinée, les nationaux de ce pays peuvent s’installer en Guinée. Or, nous avons une loi au Mali qui accorde la réciprocité à tous les pays de la CEDEAO pour qu’ils puissent s’installer en tant qu’entreprises dans leur espace. Donc, cette loi au Mali, qui permet à tous les ressortissants de la CEDEAO d’aller créer des entreprises au Mali, était une loi qui accordait la réciprocité aux Guinéens. Et donc, la loi guinéenne venait conforter, maintenant, le droit pour AIPP, Mali, AIPP, de s’installer en Guinée ici. Et donc, nous avons formulé une nouvelle demande d’agrément faite par le docteur Salam Diara, le docteur en pharmacie Salam Diara qui était le représentant d’AIPP, adressé au ministre de la Santé et à la direction de la pharmacie et des médicaments de Guinée. Et voilà, l’agrément a été donné sur la base de cette nouvelle demande-là au docteur Mantala Sangaré. Maintenant, Adama dit, pourquoi l’agrément n’a pas été donné en son nom à lui, parce que lui, il a été le premier à introduire la demande et que la demande a été donnée, l’agrément a été accordé à Mantala au lieu de lui.

 

Mais c’est Mantala le propriétaire d’AIPP, jusqu’à preuve du contraire. Les statuts sont là, chez le notaire. Comment donner l’agrément d’une société qui ne t’appartient pas en ton nom ? Il demandait l’agrément au nom de l’AIPP, il ne le demandait pas pour lui, mais il le demandait au nom de l’AIPP. Et l’AIPP, c’est pour Mantala, donc le ministère a accordé l’agrément au docteur Mantala.

 

Voilà ce qu’Adama appelle une escroquerie. Et il dit en plus que Mantala lui avait promis 2% des actions de sa société. Mais pendant 12 ans, il a travaillé pour Mantala, il n’a jamais soulevé ce problème de 2%. Il a attendu son départ pour dire que Mantala lui devait 2%. Mais il n’a jamais réclamé ça. C’est quand il est sorti de la société qu’il vient et dit tu m’avais promis 2%. Mais on est en matière de société commerciale, c’est les statuts qui emportent la modification. Si 2% avait été accordé à Adama, on aurait dû aller constater ça chez le notaire et modifier les statuts en conséquence en disant Adama est désormais actionnaire à AIPP et il a 2% des actions. Mais cela n’a pas été fait du tout. Alors il dit que là, c’est un abus de confiance. Vous voyez, moi je crois que tout est tiré par les cheveux. Et c’est un abus de langage juridique que de parler d’escroquerie, d’abus de confiance et de fraude fiscale. Voilà ce qui nous a opposés au seul docteur Adama Traoré et qui continue de nourrir des articles de presse en disant que le peuple de Guinée doit se mobiliser pour défendre un citoyen guinéen contre un citoyen malien. Je crois qu’on n’en est pas là. Le monde moderne évolue. Les sociétés sont des sociétés commerciales. Un Malien peut faire une entreprise ici et il n’a pas l’équivalent au Mali. Il crée de la richesse en Guinée, il distribue sa richesse en Guinée mais pour autant il est Malien. La société utilise au moins 40 personnes, des Guinéens qui sont salariés. Mais pourquoi venir poser le problème en termes de Guinéens ou de Maliens ? Et ils mobilisent l’ordre des pharmaciens guinéens, non pas en disant que j’ai violé, il y en a même qui ont écrit que Mantala est venu, il prend des jeunes pharmaciens guinéens, il les exploite après, il les licencie sans aucun droit. Mais il a payé tous ces messieurs-là, aucun d’eux n’a un mois d’arriéré de salaire chez lui. Mieux, ils ont même refusé au départ d’être payés en tant que Guinéens, ils ont voulu être payés en tant que Maliens, parce qu’au départ c’était une société de droits maliens. Leur salaire était fait en franc CFA, ils ont toujours refusé d’être payés en franc Guinéens. Et voilà, ce sont ces gens qui disent, certains parmi eux disent, ils ont fait croire même à des pharmaciens que je respecte, que Mantala exploite les jeunes pharmaciens guinéens, et une fois qu’il a fini avec eux, il les licencie sans droit, qu’il va falloir se mobiliser, c’est créer un nationalisme qui n’a pas de sens.

 

Mediaguinee: Vous dites avoir signé un protocole d’accord. Selon vous, pourquoi ce rebondissement ?

 

Mohamed Ali Bathily: Le rebondissement est dans une certaine forme de prétention mal fondée, parce que je crois que jusqu’à preuve du contraire, Adama n’a pas pensé qu’on pouvait lui demander de choisir entre sa position de délégué médical et son droit d’ouvrir une officine de pharmacie. Pour lui, le cumul était possible et de droit. Et selon eux, en Guinée, il y a même d’autres délégués qui le font. Donc pour eux, on n’avait pas à leur reprocher d’avoir ouvert leur propre officine de pharmacie. Donc quelque part, il perd une situation financière, celle de délégué médical, avec un salaire à la clé et des primes qu’il touchait chaque année. Les primes de vente, il les touchait. Chaque année, il avait un salaire. Tout cela, ça lui était payé en franc CFA, comme il l’exigeait. Du jour au lendemain, il voit qu’il perd cela. C’est un avantage qu’il perd. Est-ce que ses gains propres en pharmacie équivalent à ce salaire-là ? Est-ce qu’il n’a pas perdu des ressources ? Deuxièmement, il recevait des médicaments pour une valeur de 100 millions de francs et AIPP ne lui demandait jamais « qu’est-ce que tu as fait de cela ? » Pour AIPP, il devrait les donner gratuitement.

 

Qu’il les ait donnés ou pas, on ne lui demandait pas de compte. Ces médicaments étaient à sa disposition pendant plus de 5 ans. Il reçoit 100 millions de francs CFA de médicaments et c’est lui qui les donne aux autres délégués. C’est lui qui gère ce stock de médicaments gratuits. Subitement, il est privé de ce stock gratuit-là. Quelque part, j’ai dit que c’était inconfortable pour lui. Peut-être qu’il n’avait pas mesuré toutes ses conséquences, mais c’est inconfortable. Est-elle ? Adama, au moment même où il signait le protocole, puisqu’il était très énervé, a dit que ce n’étaient pas les maliens qui viendront faire leur loi en Guinée. Donc quelque part, il est entré dans une autre bataille, pas celle de son départ de l’AIPP, mais d’un combat contre Mantala. Peut-être pense-t-il que Mantala n’a pas été suffisamment reconnaissant avec lui parce qu’il était là au départ avec Mantala, mais ce n’est même pas le premier délégué de Mantala. Il y a eu d’autres délégués qui sont partis, qui n’ont jamais fait de guerre contre Mantala. Il est le seul sur combien de délégués qui sont partis. Il a amené un délégué qu’on a recruté à cause de lui, M. Sylla, et qui est aussi parti pour les mêmes raisons après lui. Je vois quelques interventions de Sylla sur les réseaux sociaux, mais Sylla n’est pas dans les procédures contre l’AIPP.

 

Dans les réseaux sociaux, il essaie de témoigner de son soutien au docteur Adama Traoré. Mais moi, je ne vois pas d’autres raisons. Est-ce qu’il n’y a pas d’autres raisons ? Peut-être que, selon Adama, l’AIPP doit disparaître de la Guinée. Si lui, il n’est pas là-dedans comme il le veut, il fera tout pour que l’AIPP s’en aille de la Guinée. Et peut-être qu’il peut avoir le soutien des concurrents. Je dis bien, il pourrait avoir, je le dis au conditionnel, le soutien des concurrents de l’AIPP sur le territoire guinéen. Mais je trouve que c’est une mauvaise guerre. C’est une mauvaise guerre. Tout simplement, on a travaillé des années pour une société. Je crois que la société peut être même dans un partenariat différent avec le changement de dynamique des relations. Il n’est plus délégué, il est pharmacien. Il pourrait venir à l’AIPP et dire, écoutez, moi, je vais ouvrir une grande pharmacie. Je vais m’installer à un endroit plus accessible de la ville. Est-ce que je peux avoir votre soutien ? Non seulement pour louer un bon local bien placé et achalander le local avec beaucoup de produits. Moi, je suis sûr que Mantala a la capacité de l’aider à le faire. Cela valait mieux qu’entrer en guerre. Il valait mieux demander une sorte de partenariat qu’entrer en guerre. Je trouve que ça procède d’un esprit qui a mal jugé et mal apprécié la situation.

 

Mediaguine : Dans ce dossier, le plaignant, le Dr Adama Traoré qui était délégué médical de l’AIPP réclame désormais des milliards de FCFA à la société. Selon vous, que cache cette envie d’en découdre avec Mantala en République de Guinée ?

 

Mohamed Ali Bathily : C’est la transcription d’un message qu’il a envoyé à un responsable du ministère de la santé, lequel est d’ailleurs poursuivi, il l’a poursuivi devant les tribunaux où il dit qu’il veut une négociation à l’amiable pour mettre fin à tous ces procès. Il nous a donné les contacts d’un notaire à Lomé, son grand-frère serait à Lomé là-bas qui connaîtrait ce notaire et il demandait qu’on lui paye cinq milliards de francs CFA en quarante-huit heures et que Mantala lui lève la gestion de AIPP et commande les produits mais lui il gère ici pendant cinq ans. Bon, moi j’ai lu cette feuille-là parce que c’est la transcription d’un message, on m’a dit que le message serait de lui, je l’ai lu, j’ai rigolé parce que ça a l’air d’être loufoque, ça n’a pas l’air d’être sérieux, on ne se réveille pas un beau matin pour demander cinq milliards de francs CFA à quelqu’un en quarante-huit heures sans raison, juste parce qu’il veut qu’on arrête les procès, mais nous on est prêt à faire tous les procès avec cinq milliards en Guinée, si on n’a pas de satisfaction, on ira devant la cour africaine de justice, il y a d’autres instances judiciaires qu’en Guinée et donc avec cinq milliards nous avons les moyens d’y aller, mais je trouve que c’est pas raisonnable Moi, ce qui m’étonne, j’allais dire, c’est qu’il fait appel à son pays, au patriotisme des Guinéens, pour aider un Guinéen, il fait appel à l’ordre des pharmaciens guinéens pour se solidariser avec lui, mais le patriotisme commence par le respect des lois du pays, c’est pas un vain mot, c’est pas un mot creux, on essaie de se situer dans la raison, or tout ce que je viens de dire, pas en droit malien, mais en droit guinéen, il a tort, est-ce qu’il va engager son pays dans le tort, par rapport aux lois guinéennes même, il va engager son pays à le soutenir, il va engager l’ordre des pharmaciens à le soutenir quand il a tort par rapport à la loi de la Guinée, juste parce qu’il y a, qu’il est Guinéen et que Mantala est malien, peu importe, malien ou guinéen, on est des êtres humains, nous nous avons accepté de passer devant la loi guinéenne, donc la loi de son pays, nous respectons la loi de son pays, et pourquoi lui il veut pas respecter la loi de son pays, il s’en va, s’en prendre parfois même à la moralité des juridictions, en disant les juridictions ne veulent pas m’aider parce que je suis un Guinéen contre un Malien, il n’a pas d’argument, sauf dire qu’il est Guinéen, que nous nous sommes Maliens, moi je trouve que c’est pauvre, et je trouve que c’est ne pas respecter l’ordre des pharmaciens de Guinée, que d’appeler son soutien dans des cas comme ça, lui si vraiment il respecte son ordre, il doit veiller à ce que l’ordre ne s’implique pas, lorsque lui il a tort.

 

Mediaguine :  L’ordre national des pharmaciens vous a-t-il saisi autour de cette affaire que bon nombre d’observateurs qualifient de « dispute autour de nationalité » ?

 

Mohamed Ali Bathily : L’ordre des pharmaciens a écrit à l’ordre des pharmaciens du Mali, qui lui a exposé tout le contenu du problème tel que nous nous le savons, et à mon avis l’ordre des pharmaciens n’a pas eu une attitude négative vis-à-vis de l’ordre des pharmaciens du Mali, et jusqu’à preuve du contraire l’ordre à mon avis n’a pas marqué son soutien sinon il aurait pu se constituer parti civil dans les procès, il ne l’a pas fait, mais toujours est-il que le monde d’aujourd’hui est un monde de communication, et dès que vous ne communiquez pas vous avez tort, et Adama s’est fait foire de communiquer sur sa part de vérité qui n’est en fait qu’une part tronquée de la vérité, une partie tronquée de la vérité, il ne dit pas aux gens j’ai pris l’argent correspondant à tous mes droits, il ne dit pas aux gens j’ai violé la règle qui veut que je ne puisse pas être délégué médical en même temps propriétaire et gérant d’une pharmacie, c’est moi qui ai violé cette règle, il n’a pas dit aux gens AIPP m’a dit si je veux revenir continuer à être délégué médical reviens prendre ton boulot, c’est moi qui ai dit j’en veux pas je vais gérer ma pharmacie, et j’ai pris tous mes droits, il ne le dit jamais aux guinéens par respect de son pays, par respect pour ses concitoyens, par respect pour la loi de son pays, il devrait dire ces choses-là qui sont des faits consignés par écrit et les écrits ont été faits dans le cabinet de son avocat, mais pourquoi il cache tout ça et il croit qu’on lui mène une guerre soi-disant Mantala est riche, il est corrompu, il est ceci, je ne veux pas entrer dans certains détails parce que lorsque je me suis présenté au moment où on a arrêté deux personnes, c’est que j’ai entendu défiait la compréhension des normes de bon sens parce qu’on ne parlait plus du dossier, on parlait des conditions pour libérer nos gens, on ne parlait plus est-ce qu’ils sont coupables, quelles sont les conditions et qu’est-ce que vous voulez faire pour qu’on les libère, mais heureusement nous avons été compris, les autorités nous ont compris, les autorités nous ont écouté avec beaucoup de bienveillance et de compréhension, on nous a jamais empêché de nous expliquer et nous avons été écouté, c’est le moment de les saluer et c’est le moment de dire vraiment merci à un tel niveau de compétence et de professionnalisme.

 

Ils ne se sont pas laissés avoir par le champ du docteur Adama Traoré, moi je crois que le docteur Adama Traoré au fond de lui sait bien que personne ne lui a causé de tort et qu’il est en train de se causer un tort, pour quelles raisons je ne le sais. Ils ont été quatre à signer ce protocole d’accord le même jour, comment se fait-il que seul lui il a tous ces greffes là et après trois autres ont signé, aucun des trois n’est allé en justice, ça fait sept délégués, ils n’ont jamais dit on a refusé de nous payer nos droits, non ils sont tous partis, aucun d’eux n’a soulevé un greffe, sur cette personne vous voyez quand même une seule personne, il y a un problème à ce niveau, il y a un problème, mais Adama ne dit pas ça, il se présente comme la seule victime, il ne dit pas que les autres sont satisfaits, mais lui seul, il dit qu’on n’est pas satisfait de Mantala, les sept autres qui sont satisfaits il n’en parle pas, c’est à croire que lui il a autre chose en tête que le respect de ses droits par rapport à ce qu’ils sont dans la réalité de la trame contractuelle des relations qu’il a eu avec AIPP.

 

Mediaguinee : Il se raconte que les nombreux biens du Dr Mantala Sangaré en Guinée étaient aussi visés…

 

Mohamed Ali Bathily : Bon il y a eu un moment où on a voulu même demander qu’on fasse des investigations sur la propriété foncière de Mantala, Mantala achetait des maisons ici il y a longtemps, je crois que c’était dans les années 90, il achetait des maisons ici, la Guinée lui a plu, vraiment, sinon il a construit à Dakar, il a construit à Abidjan, il a construit à Cotonou, il a acheté des maisons ici, ok, parce qu’il utilise des équipes dans tous ces pays-là et souvent il ne veut pas envoyer des gens en location, il construit et donc quand les gens vont il occupe ses bâtiments, il installe ses services dans ses propres bâtiments donc il a acheté des maisons. Mais dans une histoire de contrat de délégué médical on est allé jusqu’à vouloir faire une enquête sur ces biens ici, à la limite, vous m’excuserez, on connaît ce genre de mécanisme, moi franchement j’ai œuvré dans les systèmes judiciaires de nos pays et parfois il arrive que malheureusement on fixe des objectifs à des procédures qui n’ont rien à voir avec le droit. Peut-être aurait-on voulu pousser le docteur Mantala à abandonner ses biens ici, à créer des fausses situations judiciaires, à saisir ses biens et ces biens-là auraient été peut-être saisis même pas pour la république des guinées. Les agents qui auraient saisi ces biens, sachant bien qu’ils font dans le cadre d’une procédure qui n’en n’est pas en réalité une, auraient pu aussi saisir ces biens et les vendre à leur compte pour leur propre compte. Parce que ces biens sont nombreux, ces biens sont très nombreux, ça atteint plusieurs valeurs donc peut-être ont-ils voulu tout simplement lui faire peur, abandonner ses biens et s’en saisir. Mais ce n’est pas aussi facile que ça. Nous sommes au mois des carêmes. Cela me fait dire qu’il y a Dieu partout en Guinée et au Mali et que la chose à mon avis qui est la plus importante, même quand on fait du droit, c’est que c’est la vérité qui finit par triompher et Dieu dit c’est lui la vérité, la seule vérité c’est lui. Et la justice humaine ne fait que dupliquer un peu la justice divine. Et quelle que soit les malhonnêtetés qu’on y introduit, les velléités de tricher, évidemment ça restera toujours une mauvaise justice si cela aboutit. Mais dites-vous que ça ne peut pas s’arrêter là. Et c’est ce que je dis. Vraiment, ça m’étonnerait qu’on puisse faire certaines choses aujourd’hui. On le fait à des gens qui peut-être peuvent se laisser faire. Mais je vous dis, quand je vous parle des investissements du docteur Mantala Sangaré, vous croyez qu’il manquera de moyens de se défendre et de mettre tout ça à nu sur la place publique, avec tout ce que cela peut comporter, qu’on risque de ternir l’image de la justice ici. Et les juges l’ont compris. Ils sont en train de travailler dans le droit chemin de la loi guinéenne et nous nous en félicitons.

 

Mediaguinee : Beaucoup craignent que ce dossier pendant devant la Cour suprême et appelé à la CRIEF ne détériore les relations si solides entre la Guinée et le Mali. Êtes-vous d’avis ?

 

Mohamed Ali Bathily : Moi, je serai au Mali quel que soit le tort que Mantala peut subir ici. Cela ne m’amènerait pas à détériorer mes relations avec la Guinée. Ce sont des relations de géographie, c’est-à-dire que Dieu a voulu. Les relations géographiques sont très importantes dans la vie des nations. Cela veut dire qu’aucune des deux nations ne peut se déplacer pour aller ailleurs. Donc vous n’allez pas ternir vos relations à cause de deux personnes. Non, moi je ne crois pas. Et ce dossier n’est même pas connu au Mali. Donc on ne va pas se venger sur qui que ce soit au Mali, parce qu’il est Guinéen. Parce que ce dossier, personne n’en parle au Mali. Nous, on n’en a pas parlé. On n’a pas fait d’article de presse. On n’a jamais dit qu’on nous a fait ça ou ça en Guinée. Nous venons en toute confiance en Guinée. La preuve, moi je suis là et je parle librement et je vais devant les juridictions et je rencontre les autorités judiciaires et je discute avec eux du contenu des dossiers, s’il y a lieu. Et donc moi je me dis que ce dossier n’est pas de nature à ternir ou à affecter les relations entre la Guinée et le Mali, qui doivent être des relations qui vont au-delà à la fois des hommes, des générations et du temps. Moi, j’ai envie tout simplement de dire au docteur Adama Traoré de revenir à des meilleurs sentiments. D’avoir le courage de dire à l’ordre des pharmaciens la vérité. L’ordre des pharmaciens a été approché par le représentant des Maliens de Guinée, qui lui a donné aussi notre version des choses en lui disant que nous sommes ouverts à toute enquête, ils peuvent venir à tout moment, on leur montrera tous les documents, on leur cachera aucun document. Les 2% de Adama, on est prêt à les amener chez le notaire s’il y a un moment ou pas, Adama a bénéficié de 2% des actions de la société. C’est faux. La fraude fiscale, on est prêt à leur donner les quitus que la direction régionale des impôts nous a donnés et le paiement par anticipation de l’impôt. On est prêt à leur donner. L’escroquerie, l’agrément, le docteur Salam a introduit sa demande auprès du ministre de la Santé et dans l’agrément, les visas, vu, vu, vu, le ministre, le numéro affecté à la demande du docteur Salam, en tout cas sur l’arrêté d’exploitation. Peut-être l’agrément, peut-être qu’ils l’ont fait pour Adama, mais tu as l’agrément pour une société qui ne t’appartient pas. Eh bien, il peut prendre son agrément, il va l’utiliser, mais ce n’est pas AIPP. L’agrément, s’il l’a obtenu, c’est pas AIPP en tout cas, puisqu’AIPP ne lui appartient pas. S’il est parti d’AIPP, il est parti d’AIPP. Mais moi, j’ai vu les actes du ministère de la Santé. Le ministre de la Santé a visé la demande introduite par le docteur Salam en novembre, alors que la demande d’Adama date du mois de mai. Et les numéros qu’on a donnés au ministère et à la direction de la pharmacie et des médicaments, les deux numéros qu’on a donnés à la demande du docteur Salam, ce sont ces deux numéros qui sont visés, à ma connaissance, dans les arrêtés ayant permis à AIPP Guinée de travailler ici. Voilà.

 

C’est tout ce que je peux dire en disant au docteur Adama, mieux vaut une mauvaise transaction qu’un bon procès. Dans ce procès-là, nous, nous avons voulu l’éviter en disant, vous avez cumulé deux fonctions, c’est vous qui êtes en faute. On vous a dit de prendre vos responsabilités, vous n’avez pas voulu. Vous avez été tellement calculateur que vous avez dit, on a tort, mais on ne va pas démissionner. On attend qu’il nous licencie pour aller devant le tribunal. Où a-t-on vu ça ? Si ça, c’est de la bonne foi ou de la mauvaise foi ? Je demande à tous les pharmaciens qui sont passés par des études, qui ont appris la rationalité comme nous tous, qu’ils jugent eux-mêmes. Le jugement n’est qu’une question de bon sens en réalité. Les règles, le droit, les articles et tout ça, on évoque ça pour justifier, mais c’est le bon sens. Quelqu’un qui est en faute, qui dit je suis en faute, mais je refuse de démissionner licenciez moi pour que j’aille devant le juge. Qui est de bonne foi, qui est de mauvaise foi ? Qui se moque de la République de Guinée, qui ne se moque pas de la République de Guinée ? Qui se moque de l’ordre des pharmaciens, qui ne se moque pas de l’ordre des pharmaciens ? N’a-t-on jamais vu un adulte se comporter comme ça et être à l’aise avec ce comportement ? Je ne l’ai jamais vu dans ma vie. Je ne suis pas à l’aise si je me mets dans la peau de Adama, parce que de toute part, c’est de la mauvaise foi. Je m’excuse de le dire comme ça, c’est de la mauvaise foi.

 

Interview décryptée par Ahmed Sékou Nabé

L’article Interview. Mohamed Ali Bathily : « le Dr Adama Traoré a déclaré une mauvaise guerre à l’AIPP » est apparu en premier sur Mediaguinee.com.

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