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A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le Syndicat des professionnels de la presse de Guinée a dressé un bilan sombre de la liberté de la presse en Guinée sous le CNRD de janvier 2023 à mai 2024. Le rapport intitulé : “Les 23 péchés capitaux du CNRD”, énumère les agressions physiques et verbales des journalistes dans l’exercice de leur profession.
Dans ce document, le syndicat de la presse guinéenne peint un environnement très hostile à l’exercice du métier de journaliste. Il y est recensé 23 cas de violences :
– Atteinte à l’intégrité physique et morale de journalistes, arrestations et détentions arbitraires ainsi que des cas de destruction de matériels ;
– La suspension des journalistes par la HAC de façon illégale ;
– Le brouillage des ondes ;
– Et le retrait de certains médias dans les bouquets de diffusion.
Enfin, le rapport dans son volet recommandation invite les autorités à tous les niveaux à réhabiliter les journalistes suspendus et les médias brouillés.
LES 23 PÉCHÉS CAPITAUX DU CNRD (RAPPORT 2023 DU SPPG)
I-LES FAITS
L’an 2023 élargi aux 4 premiers mois de 2024 se présente comme l’année noire pour la presse guinéenne. Cette période marquée par la volonté de la junte militaire à avoir vaille que vaille une mainmise sur les médias et journalistes indépendants du pays a connu tout ce qui peut arriver aux professionnels de l’information à part du fait qu’on n’a pas, pour le moment, enregistré des cas d’assassinat de journalistes.
Dans le résumé de ce rapport qu’on a pas pu publier en janvier à cause de tout ce que vous savez, nous évoquerons quelques cas illustratifs de l’interminable campagne de destruction de l’écosystème médiatique lancée l’an dernier par le CNRD:
1-En 2023, les militaires au pouvoir n’ont pas attendu longtemps pour lancer les hostilités. Dès le 4 janvier déjà, Ousmane OC Cissé de radio Djoma Siguiri se fera sauvagement battu par des agents des forces de l’ordre sur ordre du commissaire central adjoint de Siguiri alors que ce journaliste couvrait une manifestation de rue ;
2-Le 22 janvier 2023, alors qu’elle couvrait les opérations de déguerpissement au bloc des professeurs de Donka, Adama Diallo; stagiaire à la radio 7 sur 7 a été arrêtée par des gendarmes et conduite à la gendarmerie de Hamdalaye avant d’être libérée après 1h et demie de séquestration ;
3-Le jeudi 9 janvier 2023, Charles Wright alors Ministre de la justice et des droits de l’homme, enjoint illégalement au procureur général près la cour d’appel de Conakry d’engager des poursuites judiciaires contre Mohamed Mara et Lamine Guirassy tous du groupe HADAFO Médias. Une démarche illégale finalement stoppée par le SPPG qui avait projeté un sit-in géant à la place des martyrs ;
4-Michel PIVI, Secrétaire Général de l’antenne régionale du SPPG-Kankan a été physiquement agressé par des agents de la garde du gouverneur de Kankan devant ce dernier qui n’a rien fait pour empêcher cette agression ;
5-Le lundi 3 avril 2023, l’interpellation et la séquestration par la Gendarmerie, de Sékou Bourgeois Camara de Radio Espace Kankan ;
6-Le samedi 8 avril 2023, Sayon CAMARA d’Africa Guinée est verbalement agressé par un conseiller communal de Ratoma puis, physiquement atteint par des policiers qui l’ont même conduit et séquestré au commissariat de Kaporo alors que le journaliste couvrait les opérations de déguerpissement des emprises de la route à Kipé ;
7-La triste réalité de rétention de l’information à la présidence de la République où l’accès est toujours refusé aux médias privés continue encore malheureusement ;
8-À peine une semaine après la célébration de la journée internationale de la liberté de la presse l’an dernier, soit le 9 mai 2023, Ibrahima Foulamory Bah du site d’information le Courrier de Conakry a été interpellé par des éléments de la garde présidentielle postés aux alentours de la primature où ils lui ont retiré le téléphone et supprimé les éléments de son reportage. Il y sera séquestré pendant 1h environ. Ensuite il est photographié contre son gré avec, à la clé, des menaces du genre “Gare à toi…!”. Dans la vidéo de son interpellation qu’il a fournie au SPPG, on l’entend crier désespérément “Je suis journaliste” en présentant son badge. Mais malgré ce cri de détresse, ses bourreaux ne l’ont pas lâché ;
9-Restriction de l’internet quelques jours avant, et le jour de la manifestation des forces vives de Guinée empêchée le 17 mai 2023 ;
10-Le 17 mai 2023, Aliou Maci DIALLO du site d’informations lagunee.info au moment des faits, et Mamadou Macka DIALLO de Guinée 114, sont agressés par des militaires non loin du rond-point de Bambéto. En plus des injures dont les 2 ont fait l’objet, Maci a reçu de violents coups à la tête, heureusement qu’il portait un casque de protection ;
11-Les équipements de Sabari et Lov fm démantelés par des cadres de l’ARPT accompagnés de gendarmes. Le Ministre des Postes et télécommunications d’alors Ousmane Gaoual Diallo avait nié ce cas de vol inédit mais finalement, c’est à l’ARPT que les équipements seront effectivement retrouvés ;
12-Le gouvernement, par la voix de son porte-parole, menace en conférence de presse de fermer tout médias selon lui, qui tenterait de dresser les communautés les unes contre les autres et déclare que l’internet n’est pas un droit ;
13-En reportage à Coyah le 16 juin 2023, Lamine Kaba d’Espace TV est physiquement agressé à Toguiron vers Condéyah par la garde rapprochée du procureur du tribunal de première instance de Coyah sur ordre de ce dernier. Après l’avoir terrassé, les éléments l’ont neutralisé à terre sous le regard impuissant de son collègue de l’équipe de reportage ;
14-Le 22 juin 3023, Saliou Benjamin CAMARA du site d’information Guinée Souverain est brutalement interpellé derrière la clôture de la primature où il couvrait une manifestation des guinéens rapatriés de la Tunisie. Le journaliste sera embarqué et conduit au commissariat central de Kaloum avant d’être libéré et mis à la disposition du Général Sékou Jamal PENDESSA ;
15-En Août 2023, un élément des forces spéciales agresse un journaliste à N’Zérékoré et endommage son téléphone qu’il a délibérément broyé à l’aide de ses rangers ;
17-Août 2023, toujours à N’zérékoré, un journaliste attaqué par des inconnus qui l’ont suivi jusqu’à domicile ;
18-Courant septembre, Ansou Bailo Baldé et Mariama Bhoye tous de Cavi Médias sont empêchés de continuer un reportage à Dubréka, leurs badges retirés par des policiers alors qu’ils faisaient le constat sur la dégradation de la route qui traverse cette ville pour la région de Boké ;
19-En Août 2023, les sites GuinéeMatin et inquisiteur sont illégalement fermés. Et Guinée Matin le restera pendant 3 mois pratiquement. Alors que le SPPG avait programmé une autre manifestation après celle reprimée le 16 octobre 2023 à Kaloum, le site a finalement été libéré 72h avant le jour-j ;
20-Manipulée à souhait par la junte militaire, la haute autorité de la communication a battu le triste record de suspensions illégalement prononcées contre les journalistes Abdoul Latif Diallo et son site Dépêche Guinée suspendu le 11 septembre pour un mois puis, pour 9 autres mois. Bouka Barry aussi a été suspendu le 13 septembre 2023 pour un mois. Ensuite, Mohamed Kouyaté du groupe Évasion, Habib Marouane CAMARA du Révélateur 224 et Mamoudou Babila Keita d’inquisiteur sont également victimes des suspensions illégales de la HAC ;
21-Utilisée comme instrument de répression par le CNRD, une partie des magistrats a été mise à contribution pour casser l’élan de résistance du SPPG dans sa lutte pour la liberté de la presse. Ainsi, le 16 octobre 2023 alors qu’ils manifestaient pour demander la libération de Guinée Matin, 13 journalistes dont des membres du bureau national du syndicat ont été sauvagement battus à la cité chemin de fer et conduits au commissariat central de Kaloum avant d’être inculpés par le tribunal de première instance de Kaloum. Parmi les blessés graves, 2 femmes journalistes(Mariama SALL d’HADAFO fracturée au coup comme Foula Mory et Mariama Bhoye BARRY de Vavi Médias touchée au bras par un projectile du gaz lacrymogène). Le porte-parole du gouvernement Ousmane Gaoual avait déclaré devant les caméras qu’il n’y a pas eu de violences contre les journalistes avant d’être démenti par une vidéo particulièrement violente ;
22-Le 19 janvier 2024, soit le lendemain de la manifestation empêchée qu’il a pilotée la veille, le Général Sékou Jamal PENDESSA (S.G du SPPG) et 3 autres journaliste dont 2 membres du bureau national(Abdoulaye Cissé et Amadou Oury BARRY) sont arbitrairement arrêtés en pleine circulation à la terrasse de Dixinn alors qu’ils revenaient du tribunal où une dizaine de journalistes arrêtés la veille venaient d’obtenir un classement sans suite de leur dossier. Arrivé à la brigade de recherche de Kipé, les trois autres ont été libéré mais le Général PENDESSA sera placé en garde à vue jusqu’au 22 janvier; date à laquelle il sera présenté au tribunal de Dixinn où le procureur va décerner un mandat de dépôt qui le conduit à la maison centrale de Coronthie. Au total, il a passé 40 jours de privation de liberté. Il sera injustement condamné à 6 mois de prison dont 3 assortis de sursis avant d’être libéré en appel le 28 février sur fond de pression sociale marquée par la grève générale du mouvement syndical guinéen ;
23-L’une des plus sombre pages de la gouvernance du CNRD, c’est cette campagne de musellement des médias et de destructions d’emplois matérialisée par le brouillage des ondes Fm et le retrait des chaînes de télé des bouquets de distribution d’images qui a duré 6 mois depuis novembre 2023 ;
Conséquence, plus de 500 emplois détruits dans les entreprises de presse à Conakry et à l’intérieur du pays. Parmi les travailleurs contraints au chômage technique, figurent des femmes enceinte dont les grossesse restent exposées aux risques de complications à l’accouchement.
II-RÉCOMMANDATIONS
-À l’occasion de la commémoration de ce 3 mai, journée internationale de la liberté de la presse, le SPPG recommande aux autorités de libérer les médias sans conditions ;
-Le SPPG recommande aux autorités le payement des dommages et intérêts que ces restrictions illégales ont causés aux journalistes et médias victimes ;
-Le SPPG recommande à la Haute autorité de la communication de rapporter toutes les décisions de suspension qu’elle a illégalement prises contre des journalistes dont les noms sont mentionnés ci-haut ;
-Le SPPG appelle les professionnels de l’information à rester collés à l’éthique et à la déontologie de notre noble métier ;
-Le SPPG demande la réhabilitation de son Secrétaire Général arbitrairement arrêté et condamné pour avoir demandé légitimement la libération des médias et de l’internet.
Conakry, le 3 mai 2024
Le Bureau National
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