Gomboya- Des familles menacées d’expulsion appellent à l’aide : « C’est le seul bien que notre papa nous a laissé” (Fanta Sacko)

À Gomboya Nord, en début de semaine, un violent conflit foncier a éclaté, opposant les héritiers de feu Mohamed Fofana à l’ancien directeur préfectoral de l’Habitat de Coyah, Karifa Bakayoko. Ce litige, marqué par des opérations de déguerpissement, menace de jeter des centaines de familles à la rue.
Parmi les victimes, Fanta Sacko, une jeune femme issue d’une des familles concernées, témoigne.
Dans un entretien accordé à Mediaguinee, elle raconte la journée bouleversante qu’elle et sa famille ont vécue ce jour-là : « C’est dans la matinée du mercredi que ma maman m’a appelée en pleurs pour m’informer que la famille Fofana était venue avec des gendarmes dans le quartier afin de déguerpir près de la moitié de la population. Sur le champ, je me suis précipitée chez ma maman. J’ai trouvé des gaz lacrymogènes un peu partout, des jets de pierre, et il y a même eu des coups de feu. Ils ont démoli des maisons, cassé des portes de boutiques et des fenêtres. Chez nous, ils sont venus enlever notre portail et nos fenêtres. Ma maman a fait une crise d’hypertension, ce qui a bouleversé tout le monde. »
Fanta Sacko affirme ne pas comprendre pourquoi sa famille serait concernée par ce litige foncier, car son père aurait acquis leur domaine il y a 28 ans : « Notre domaine, c’est notre papa qui l’a acheté en 1997. À l’époque, le propriétaire en question, monsieur Fofana, était vivant. »
Aujourd’hui orpheline de père, elle déclare que cette concession représente l’unique héritage familial :
« Mon papa est décédé quand j’étais très petite, je ne l’ai pas connu. Donc cette concession, c’est le seul bien qu’il nous a laissé. Notre maman est là-bas. Si nous venions à perdre ce bien précieux, nous aurions tout perdu dans notre vie. Pour le moment, nous ne savons pas où aller ni à qui nous plaindre. »
Selon l’huissier de justice en charge du dossier, un terrain de négociation a été ouvert pour éviter l’expulsion des occupants. Cependant, en coulisses, il est question d’une somme de 500 millions de francs guinéens ou plus. Pour Fanta Sacko, cette exigence est irréalisable :
« Eux-mêmes savent très bien que dans notre situation actuelle, avec la cherté de la vie, personne ne peut réunir une telle somme. Personne ne peut prendre un tel engagement. Ceux qui demandent cela, si on leur demandait de sortir 500 millions, où iraient-ils les trouver ? Ils voleraient ou tricheraient. Nous, nous n’avons nulle part où trouver cet argent. Nous n’avons personne qui puisse s’engager à payer cela pour nous. Nous sommes pour la plupart des jeunes qui nous débrouillons pour nourrir notre maman. Elle ne compte que sur nous, elle n’a personne d’autre dans sa vie que ses enfants. Donc, si nous perdons notre maison, nous n’aurons nulle part où aller. »
Ne sachant plus vers qui se tourner pour préserver leur concession, Fanta Sacko lance un appel aux autorités, en particulier au Président de la République, Général Mamadi Doumbouya :
« Nous demandons aux autorités de venir à notre aide, y compris le président de la République. Nous souhaitons vivement qu’il intervienne. Parce que la manière dont nous vivons dans ce pays n’est pas normale. C’est du laisser-aller. Dès qu’une personne a un petit poste de responsabilité, elle fait ce qu’elle veut, et ce n’est pas juste. Le peu que nous gagnions servait à nous nourrir, et si cela doit maintenant se transformer en loyer, comment allons-nous faire ? Que deviendrons-nous ? Nous lançons donc un appel pressant aux autorités concernées pour qu’elles nous viennent en aide et qu’elles fassent entendre raison à cette famille. Ils sont sans cœur, sans remords. Comment une personne peut-elle acheter un domaine, un terrain il y a 30 ans, sans que personne ne réagisse, et c’est maintenant qu’ils commencent à réagir ? Cela nous fatigue énormément et nous met dans un état de stress intense. »
En attendant, l’angoisse grandit dans le quartier, où la menace de perdre leur unique toit plane sur de nombreuses familles sans ressources.

Ahmed Sékou NABÉ 

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