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La mise en place des délégations spéciales par le Cnrd n’a pas obéi à la loi en la matière, selon Abdoulaye Bah, membre du politique de l’UFDG. Cet ancien président de la délégation spéciale de Kindia [2014-2018] accusé les autorités de la transition d’avoir placé des hommes sans expérience et à la moralité douteuse pour la plupart à la tête des maires. Cela n’est pas sans conséquences, a-t-il averti, puisque ceux-ci ne seront pas acceptés par les populations à la base. Cette situation va exacerber la crise sociopolitique dans le pays. Interview!
Guinee360.com : Quelle est votre réaction suite à la mise en place des délégations spéciales ?
Abdoulaye Bah : Je crois que le CNRD est en train de répondre à l’illégalité par l’illégalité. Le fait que le mandat des conseils communaux ait expiré ne justifie pas qu’un acte illégal c’est-à-dire le décret soit pris pour nommer des délégations spéciales en violation de la loi. Le Code des collectivités en son article 80 précise que la mise en place d’une délégation spéciale répond à deux conditions : La première, c’est lorsqu’un tier des conseillers est déclaré coupable par un tribunal compétent d’avoir commis des actes délictueux sur le plan économique et financier ou qu’un conseiller communal soit rappelé à l’ordre à trois reprises par la tutelle par rapport à la gestion. Ce qui n’est pas le cas ici. Il serait préférable que les communes rurales et urbaines soient maintenues comme telles jusqu’à l’organisation prochaine des élections communales pour satisfaire l’exigence de la loi qui stipule clairement que les mairies en Guinée sont meublées par des élections. Ce qui n’est pas le cas. Donc, la démarche est illégale et elle est contraire aux engagements et promesses pris par M. Doumbouya lors de son discours du 5 septembre 2021 promettant de respecter les lois nationales et de respecter la souveraineté du peuple.
Quelles conséquences cela peut avoir?
Premièrement, nous allons accuser un retard dans l’organisation des élections communales ce qui n’est pas souhaitable parce que quoi qu’il arrive, on finira par faire ces élections. Autant commencer par ce qu’on doit faire aujourd’hui et ne pas attendre demain. Deuxièmement, c’est sur le plan de la gestion administrative. Les gens qu’on a cooptés dans les villes qui connaît leur background intellectuel, leur moralité, qui connaît leur engagement patriotique et leur professionnalisme pour leurs localités? quelle intention ont-ils pour leurs localités? Il y aura un désordre dans les mairies parce qu’ils ne sont pas des gens que l’ont connaît auxquels on confie la destinée des centaines des milliers de personnes. Troisièmement, c’est le refus avéré et assumé des populations qui ne vont pas accompagner des gens désignés de manière illégale et illégitime. Parce que la démocratie répond à un principe très simple : pour que vous soyez gouvernants, il aurait fallu que la population ait décidé de vous accorder et de vous confier un mandat électif à travers une élection dûment établie et à travers des urnes. Ils ne vont pas accompagner des gouvernants qui ne sont pas un choix du peuple. Il y aura un boycott dans certaines villes. Les remous ont déjà commencé avec le cas de Boké. C’est pour dire qu’en démocratie ne peut prétendre diriger les destinées des citoyens que ceux là qu’ils ont choisis. Quatrièmement, elle est liée à la politique. Nous aurons des gens qui seront dans l’esprit du CNRD au lieu d’être dans l’esprit de la République. Quand on est gouvernant, nous devons être dans l’esprit de la République qui surplombe toutes les entités officielles ou non officielles de la nation. Ils seront des marionnettes, nous aurons là des hommes et des femmes qui, au lieu de travailler pour la population de leurs municipalités, vont plutôt être au service du CNRD.
Est-ce que le remplacement des maires peut freiner le processus de développement à la base?
La réponse à cette question rejoint celles liées aux conséquences puisque évidemment, la question du développement va se poser. Il n’y aura pas de développement parce que ce ne sont pas des gens choisis par le peuple, que le peuple est censé accompagner dans l’exécution de leurs actions en faveur du peuple. De toutes les façons, une délégation spéciale, dans les conditions normales n’a pas le mandat de développer une ville parce qu’elle n’a pas le mandat officiel des populations. Donc ne parlons pas de développement lorsque l’illégalité est posée.
Au cas où le CNRD n’organise pas les élections dans le délai prévu par la loi, à quoi peut-on s’attendre ?
Il y aura une crise politique grave, parce que les entités officielles, (société civile, partis politique et syndicat) sont en train de s’organiser pour conjuguer le même verbe afin de remplir leur devoir citoyen face à la bonne marche de la République. Une transition a pour vocation ultime l’organisation des élections pour que le peuple puisse remplir ses droits légitimes. Si cela n’est pas fait c’est la loi qui sera violée et la violation de la loi en droit amène le désordre, puisque la loi a pour mission de maintenir l’ordre. Partout, vous avez des crises, partout où vous avez l’anarchie c’est parce que quelqu’un quelque part a décidé de ne pas appliquer la loi et faire autre chose que ce que la loi a prévu. Donc, c’est ce qui attend la Guinée si le CNRD ne tente pas de prévaloir la raison sur les passions.
Quelles recommandations faites-vous pour améliorer la gouvernance locale en Guinée ?
Les mairies sont le symbole de la décentralisation. On a créé les communes pour décentraliser pour ne pas que tout soit concentré sur un gouvernement national, on a crée des gouvernements locaux, des entités locales, gérées par un Code appelé le Code des collectivités pour décharger le gouvernement national dans sa mission de satisfaction des préoccupations de la population à la base. La condition pour améliorer la gouvernance au niveau des collectivités, c’est d’abord l’organisation des élections locales, transparentes, crédibles acceptées par tous, parce que le peuple aura choisi ces dirigeants locaux. De ce fait, ce peuple va accompagner l’équipe gouvernante pour que les localités puissent progresser. Également, la levée des impôts, donc l’économie, lorsque vous aurez choisi vos gouvernants, lorsqu’ils vous demandent de remplir vos obligations financières vis-à-vis de la mairie, naturellement, vous allez être content de payer les taxes pour que l’équipe que vous avez choisie pour diriger puisse être en possession des moyens financiers pour satisfaire les besoins qui sont les vôtres. Troisième proposition, que le gouvernement national respecte la liberté, l’autonomie et l’indépendance que la loi accorde aux mairies avec leurs gouvernants en les attribuant des moyens financiers prévus dans la loi des finances pour être en même de gérer leurs localités. Ensuite, la coopération puisque nous sommes dans un monde ouvert, la coopération est aussi un moyen pour améliorer la gouvernance locale en allant vers d’autres villes du monde mieux développées que nous, pour demander leurs expertises et leurs assistances. La loi en Guinée prévoit que les mairies peuvent aller chercher des partenariats bénéfiques pour leurs villes. Mais tout cela ne peut être possible que si la loi électorale et démocratique est respectée.
L’article Abdoulaye Bah avertit la junte : “Il y aura une crise politique grave” est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.