Le procès du 28 septembre : « Joli », un témoin clé avec des révélations accablantes

il y a 10 mois 121
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Youssouf Touré, alias « Joli », est un haut fonctionnaire civil étroitement lié aux cercles de pouvoir de Conté et de Dadis. Devant le tribunal criminel de Dixinn le 9 janvier 2024, Youssouf Touré a fait des déclarations poignantes, révélant la volonté du feu Général Lansana Conté de voir son fils Ousmane Conté lui succéder. Il a également fait d’autres révélations sur le coup d’État mené par le capitaine Dadis Camara et le massacre du 28 septembre 2009.

Des fétiches au cœur du pouvoir de Conté à Dadis

Youssouf Touré, surnommé « Joli », a fréquenté le feu capitaine Ousmane Conté, fils du défunt Général Lansana, qui était son mentor. Le père nourrissait le désir de voir son fils prendre sa place. Selon les dires de Youssouf Touré, Lansana Conté avait fait venir un féticheur de Guinée-Bissau. Ce praticien des mystères était censé œuvrer pour concrétiser la volonté de Lansana Conté. Mais au-delà de cette pratique, il fallait également préparer des hommes pour accompagner Ousmane Conté vers la présidence.

« Mon mentor, Ousmane Conté, m’a confié que son père souhaitait qu’il lui succède », a-t-il affirmé. Il a ensuite enchaîné en expliquant que le Général Bailo, le Général Arafan Camara et le Colonel Kandet Touré ont rencontré le président Lansana Conté pour discuter des moyens d’encadrer Ousmane Conté en vue de sa prise de pouvoir : « Ils ont mentionné que pour accéder au pouvoir, il fallait le soutien de l’armée. Le Colonel Kandet Touré a suggéré que son protégé, Nouhou Thiam, pourrait faire l’affaire. » Cependant, aucun consensus n’a été trouvé sur Nouhou Thiam. Un autre nom a été évoqué, mais là encore, aucune entente n’a été possible. Finalement, c’est le Général Bailo qui a présenté son protégé, le capitaine Moussa Dadis Camara. Mais ce jeune capitaine ne pouvait mobiliser les troupes sans moyens financiers. Il a alors été nommé chef divisionnaire à l’intendance des forces armées : « Ils ont convenu et ont rendu compte au Général Lansana Conté. Celui-ci a déclaré qu’ils devaient prêter serment devant le féticheur qu’il avait fait venir de Guinée-Bissau pour assurer que son fils lui succéderait. »

En 2005, selon les souvenirs de Youssouf Touré, après la tentative de coup d’État d’Enco5, un magicien blanc a demandé à rencontrer le président Conté au camp Samory. Il a été conduit au bureau d’Ousmane Conté. En présence de nombreux officiers, le magicien a été questionné sur l’identité du prochain président après Conté. Il a déclaré qu’un capitaine succéderait au Général Lansana Conté. Ousmane Conté avait pensé à lui-même, mais c’est à ce moment que les réelles ambitions de Dadis pour le pouvoir ont commencé à se manifester.

Dans son témoignage, Youssouf Touré accuse Dadis d’avoir envoyé un magicien indien pour éliminer Toumba, mais ce dernier aurait été incapable de le faire. Idriss Chérif, conseiller de Dadis et ancien ministre de la Communication, aurait pris contact avec Guillaume Soro de la Côte d’Ivoire pour faire venir des praticiens du mysticisme en Guinée. Selon le témoin, ceux-ci étaient censés s’occuper de Toumba chez Gono Sangaré. Cependant, aucun d’entre eux n’a réussi à éliminer l’aide de camp de Dadis : « Avant de se rendre chez Gono Sangaré, Dadis a exprimé le désir de rencontrer le diable. Lorsque nous sommes partis, je ne sais pas où ils ont obtenu du sang humain. On lui a dit qu’il devait se laver avec ce sang humain s’il voulait voir le diable. Gono Sangaré est sorti attendre dehors. Il s’est déshabillé et s’est lavé avec le sang. Ils ont appelé le diable à travers la forêt. Dès qu’il a vu le diable venir, il a crié et a voulu fuir. C’est là que je suis intervenu. Le féticheur lui a dit que s’il fuyait, il deviendrait fou et personne ne pourrait le soigner. Le diable lui a dit que puisqu’il s’était lavé avec du sang humain, il serait lié au sang humain dans sa quête de pouvoir. »

Le vrai « faux complot » ?

Si le récit de Youssouf est authentique, le capitaine Dadis aurait emprunté un chemin sans retour. Depuis qu’il s’était lavé avec du sang humain, selon les dires du diable, il ne pouvait s’en défaire s’il voulait le pouvoir. Selon Youssouf, Dadis aurait entrepris des actions visant à éliminer physiquement des leaders politiques, dont Alpha Condé, qui était censé lui succéder, d’après les dires du féticheur. Pourtant, lors de son témoignage, Moussa Dadis Camara aurait déclaré être victime d’un complot « orchestré » par le Pr Alpha Condé et le Général Sékouba Konaté, exécuté par son ancien aide de camp, Toumba Diakité.

« […] J’ai appris que le colonel Théa, Makambo, ils ont envoyé des agents chez les leaders [politiques]. Ils ont effectué des rituels pour inciter tout le monde à se rendre au stade. Le président Dadis a affirmé devant moi qu’il avait coordonné avec le Colonel Cheick Fantamady pour éliminer tous les leaders », a-t-il déclaré, ajoutant qu’il avait informé Alpha Condé du plan de Dadis et que ce dernier avait quitté le pays avant le 28 septembre 2009.

Alors que Dadis mettait son plan à exécution, Claude Pivi aurait également eu le sien. Selon « Joli », une fois que Toumba et Konaté auraient été écartés, Dadis aurait dû être arrêté : « Grand Co m’a dit que je devais suivre les gens jusqu’à ce qu’ils versent le sang. S’il arrive à verser du sang humain et à éliminer Toumba et Sékouba Konaté, ils arrêteraient Dadis pour son implication dans l’affaire du 28 septembre. C’était leur plan. Il m’a dit qu’il me nommerait gouverneur de Kindia. Je lui ai répondu que je n’avais pas ce niveau, et que seul l’argent m’intéressait. »

Des avocats de Dadis accusés

Youssouf a ensuite accusé des avocats de Dadis, dont Me Dina Sampil et un certain Pépé (qui n’est pas Me Antoine Pépé Lamah, précise-t-il), de vouloir le faire taire. « S’ils tentent de m’empêcher de témoigner ici, c’est parce qu’ils ne veulent pas que je révèle ce qui s’est passé entre nous. Ils ont tout planifié pour m’en empêcher. Ils ont contacté tous mes proches pour les dissuader de me laisser témoigner », aurait-il déclaré devant le tribunal, ajoutant qu’ils lui auraient proposé 700 millions, une offre qu’il aurait refusée.

Lire l'article en entier