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L’ancien Président de la Confédération Africaine de Football (CAF), le Camerounais Issa Hayatou a rendu l’âme ce Jeudi 08 août 2024 à Paris. Élu en février 1988 à Rabat et battu en mars 2017 à Addis-Abeba, l’histoire retiendra des 29 ans de règne absolu de l’ami de la Guinée, l’image d’un Monarque avant–gardiste et novateur du Football Africain.
En février 1988, débarque d’un taxi dans la cour de la RTG à Boulbinet un homme de grande taille. Venu directement de l’aéroport Gbessia, il demande à voir le directeur de la radiodiffusion nationale de l’époque, Cheick FantamadyConde. Conduit au premier étage de l’immeuble nouvellement construit, l’étranger est aussitôt reçu par le Maîtres des lieux dans son bureau. Quelques temps après un long tête à tête, les 2 hommes ressortent du bureau et de la cour de la RTG pour l’hôtel de l’indépendance où une réservation a été négociée pour l’hôte. Le lendemain, celui dont on a découvert l’identité ( Issa Hayatou) est reçu successivement par le ministre de la Jeunesse et des Sports, feu Elhadj Amadou Binani Diallo et le Président de la Fédération Guinéenne de Football, Dr Baba Sacko avant de s’envoler en début d’après-midi pour Abidjan où l’attendait, feu Laurent Dona Fologo, ministre ivoirien des Sports.
Dans la soirée, feu Cheick Sylla, alors directeur des programmes de la radiodiffusion nationale et correspondant de Rfi annonce dans le monitoring de la chaîne internationale le soutien de la Guinée à Issa Hayatou qui venait de lancer à partir la Guinée sa campagne pour la présidence de la CAF.
Nous réalisons en ce moment que l’ancien Professeur d’éducation physique et sportive à l’université de Yaoundé, ancien champion du Cameroun du 400 et du 800 mètres entre 1964 et 1971 est l’un des 3 candidats à la présidence de la CAF laissée vacante suite au décès, le 19 août 1987 à Addis-Abeba de son Président Éthiopien, Ydnekatchew Tessema.
En mars 1988 à Casablanca, Issa Hayatou est élu face à Dr Halim du Soudan, 2ème vice-président en exercice et le Togolais, Gordfried Ekoué, après 3 tours de scrutin.
Sans revenir sur tous les détails de son bilan globalement positif, tous les spécialistes notent aujourd’hui que le Président Issa Hayatou, dirigeant aux accents anticolonialistes et anti-néocolonialistes, n’a eu de cesse de défendre le football africain et son indépendance. « L’avenir du football africain doit être géré par les Africains », a-t-il lancé à l’adresse du président de la FIFA, Gianni Infantino et de son clan qui venaient de le faire battre par le Malgache, Ahmad Ahmad à la clôture de la 39e Assemblée générale de la CAF à Addis-Abeba.
Le natif de Garoua a résisté aux pressions de la FIFA et de l’UEFA et n’a jamais toléré les critiques sur le fait que la Coupe d’Afrique des nations ait lieu en janvier – février, pendant les championnats européens de clubs, en refusant systématiquement leurs demandes toujours réitérées que la CAN soit repoussée au mois de juin, en pleine saison pluvieuse dans plusieurs régions du continent.
Durant ses sept quinquennats, la CAN est passée de huit à douze, puis de douze à seize équipes. La CAN a depuis trouvé une formule bien rodée et efficace, qui en fait quasiment la troisième compétition d’équipes nationales de football la plus suivie internationalement après la Coupe du monde et l’Euro
Le Président Hayatou a également révolutionné et développé le Football Africain avec la création de plusieurs compétitions nouvelles et l’amélioration de celles existantes ainsi que la valorisation du Football féminin.
Il a donné du poids au football africain. À son avènement en 1988, le Football continental est encore loin d’être cette force politique désormais très courtisée par la FIFA et crainte par les Etats africains.
L’Afrique n’avait que deux représentants en phase finale de la Coupe du monde. Grâce, entre autre, à son leadership, la représentativité de L’Afrique est passée à 3 en 1994, puis à 5 en 1998 avec le premier Mondial à 32 équipes.
Sur le plan financier, au moment de son départ, le 16 mars 2017, la CAF disposait de 108 millions de dollars de trésorerie et de 131 millions de dollars de capitaux propres, selon le rapport présenté à la tribune de la 39ème Assemblée Générale à Addis-Abéba.
En juin 2015, il a paraphé un mémorandum d’1 milliard de dollars avec la société Sportfive, devenue Lagardère Sports, contre la gestion des droits marketings et médias du football africain de 2017 à 2028. Un accord pouvant garantir la bonne santé financière de la CAF pendant une décennie encore, mais qui lui a valut la féroce guerre des Égyptiens. Cette hostilité Égyptienne et le complot du Président nouvellement élu de la FIFA, Gianni Infantino ont eu raison de sa candidature pour un 8ème mandat en mars 2017 à Addis-Abeba.
L’ami et le frère de la Guinée
Incontestablement, on pourrait qualifier la Guinée comme la seconde patrie de l’alter ego du Président Almamy KabeleCamara qu’il considérait affectueusement comme » le co-président de la CAF « .
Outre les liens d’ordre familial entre le Président Alpha Condé et sa famille à travers son frère, Saidou Hayatou, ancien Premier ministre du Cameroun, le candidat qui a médiatiquement lancé sa candidature à Conakry est demeuré un Président attaché à la Guinée et à ses dirigeants sportifs.
Quelques années après son élection, je le revois dans les jardins de la résidence de Salifou Camara Super V à Ratomaoù celui qui était encore vice-président de la Fédération Guinéenne de Football a organisé une réception en son honneur.
En plus de l’ascension du Président Almamy Kabele Camara dans le Comité Exécutif de la CAF et puis à la vice-présidence de l’instance, le Président Issa Hayatou a propulsé la carrière internationale de nombreux dirigeants du Football Guinéen dans les commissions de la CAF et de la FIFA : Dr Baba Sacko, Salifou Camara Super V, Aboubacar BaratheCamara, Fodé Capi Camara, Aboubacar Bruno Bangoura, Ibrahima Sory Conté, Ibrahima Blasco Barry, Djibril Diarra Becken, Zalikatou Diallo, Mamadou Antonio Souaré, Amadou Diouldé Diallo etc
En 2013, en plus des officiels Guinéens, il intégra un groupe de près de 10 Guinéens dans la délégation officielle de la CAF leur permettant de se rendre dans toutes les villes sud-africaines à bord de l’appareil mis à sa disposition et de suivre en VVIP tous les matchs de la CAN. Depuis, il en a toujours été ainsi dans les compétitions organisées par la CAF.
En marge de la compétition, il déroge à la règle, et reçoit le ministre des Sports de l’époque, Bantama Sow et propose d’offrir la CAN 2015 à la Guinée. Le ministre ne donne pas suite.
Mais, à Addis-Abeba, en septembre 2014, il décide publiquement d’octroyer l’organisation de la CAN 2023 à la Guinée alors que l’appel à candidature n’était même pas encore ouvert et que le jour et la nuit séparait le dossier de candidature Guinéenne pour les éditions 2019 et 2021 et les exigences du cahier des charges avec des infrastructures simplement inexistantes. Par amitié, par amour pour la Guinée, il a accepté, pour la première fois, de violer les règles et de nous faire plaisir, et ce malgré le manque de volonté politique affiché.
Le 1er octobre 2015, avec son épouse et quelqu’un membres de sa famille, il effectue un voyage officiel et privé en Guinée.
Reçu par le Président de la République, Alpha Condé, Issa Hayatou encourage son réticent frère à saisir l’opportunité de la CAN qu’il présente comme un vrai facteur de développement socio-économique du pays.
À Kuyeya dans le royaume de son frère siamois Guinéen, il partage la compassion de la Famille Kabele suite au décès de l’aîné des enfants, l’ancien Maire de Coyah.
Avec la classe politique Guinéenne, il entretenait une certaine amitié et fraternité notamment avec l’ancien Premier ministre, Cellou Dalein Diallo devenu Président de l’UFDG souvent invité aux phases finales de la CAN.
Comme on le voit, la Guinée est l’un des pays pour lequel le Président Issa Hayatou a manifesté un véritable intérêt durant ses 29 ans de règne.
Sa chute en mars 2017 et les facteurs conflictuels internes ont réduit la représentativité et l’influence de la Guinée comme peau de chagrin au sein des instances internationales de Football.
Fréquent dans la capitale Française pour des raisons de santé, j’ai eu souvent l’occasion de le rencontrer au siège d’IFAP Sports à l’avenue Foch dans le 16ème arrondissement de Paris chez Éric Durand en compagnie du Président Antonio Souaré, Jean Paul Camara JPP, Ousmane Decazi Camara. Avec les effets de la solitude de fin de règne non sans conséquences sur le moral et le mal d’insuffisance rénal dont souffrait l’ancien souverain du Football Africain.
VEUILLE ALLAH, NOTRE CRÉATEUR, l’accepter dans son éternel Paradis. Amen !
Abdoulaye Condé