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Dans le contexte politique actuel de notre pays, marqué par la rédaction d’une nouvelle constitution par le Conseil National de Transition (CNT), des critiques émergent quant à la légitimité de ce processus. Certains contestent le fait que le CNT n’a pas été élu, ce qui pourrait, selon eux, compromettre la qualité et la légitimité de la future constitution. Pourtant, l’histoire nous montre une vérité essentielle : une constitution n’est pas simplement un texte, mais le reflet de la volonté des hommes et des femmes qui choisissent de la soutenir et de la mettre en œuvre.
La constitution des États-Unis, rédigée en 1787, est l’une des plus anciennes et des plus respectées au monde. Les délégués de la Convention constitutionnelle, choisis par les législatures des treize États, représentaient davantage les élites que la volonté populaire directe. Cette constitution a survécu aux épreuves du temps non seulement grâce à ses principes solides, mais surtout à l’engagement des citoyens américains à défendre les idéaux qu’elle incarne. Une constitution, à l’image d’un drapeau, acquiert sa sacralité lorsque les cœurs se lèvent pour la défendre. Les mots d’un texte ne prennent vie que lorsqu’ils sont animés par la foi et la conviction de ceux qui les adoptent. Aucun texte ne peut survivre sans l’esprit et le souffle de ceux qui choisissent d’en faire une réalité.
La Constitution française de 1958, qui a établi la Cinquième République, a été rédigée dans un contexte de crise politique. Charles de Gaulle et ses collaborateurs, bien que non élus spécifiquement pour cette tâche, ont su créer un texte qui a apporté la stabilité tant attendue en France. La question est donc : est-ce le texte ou l’esprit des hommes qui forge l’Histoire ? La véritable force d’une constitution réside-t-elle dans l’élan d’une nation résolue à faire triompher la justice et la liberté ? Ne devrions-nous pas nous interroger sur le fait que ce soit notre volonté collective, et non seulement les mots écrits, qui façonne le destin de notre peuple ?
De plus, certaines pratiques démocratiques ne sont pas toujours inscrites dans la constitution dès le départ mais sont respectées par la volonté des hommes. Aux États-Unis, par exemple, la tradition de ne pas briguer plus de deux mandats présidentiels a été observée pendant plus de 150 ans sans être formellement inscrite dans la Constitution. Ce n’est qu’après l’élection de Franklin D. Roosevelt pour un troisième et un quatrième mandat que cette règle a été codifiée dans le 22e amendement en 1951.
Dans notre contexte, l’avant-projet de constitution fixe une limite d’âge de 80 ans pour les candidats à la présidence, tout en exigeant qu’ils soient en bonne santé et pleinement capables. Cette limite pourrait devenir superflue si les experts chargés d’évaluer l’état de santé et la sincérité des candidats accomplissent leur mission avec rigueur et impartialité. Un leader de 80 ans, en pleine possession de ses moyens, peut gouverner aussi vigoureusement qu’un plus jeune, pourvu que l’intégrité et la volonté soient présentes. L’exemple de Joe Biden, qui, malgré son éligibilité pour un second mandat, a choisi de se retirer par devoir envers son pays, montre que, au-delà des lois et des âges, c’est notre engagement sincère à respecter l’esprit de la constitution et notre détermination collective à faire triompher la justice qui donne véritablement vie à notre démocratie. C’est cet engagement patriotique qui forgera l’avenir de notre nation.
Ainsi, la légitimité et l’efficacité d’une constitution ne dépendent pas uniquement du processus de sa rédaction, mais surtout de l’engagement des hommes et des femmes à respecter et à faire respecter ses principes. Le CNT, bien que non élu, peut rédiger une constitution solide, à condition que les acteurs politiques et la société dans son ensemble s’engagent à la faire vivre. Une constitution, aussi bien rédigée soit-elle, reste un simple document, un « simple chiffon », si elle n’est pas soutenue par une volonté collective d’application avec intégrité et responsabilité. C’est cet engagement qui transformera le texte en un véritable contrat social, capable de guider notre nation vers la paix, la stabilité et le développement. La question essentielle est donc : sommes-nous prêts à devenir les gardiens vigilants de ce texte, à le défendre non par contrainte, mais par amour pour notre patrie et notre peuple ?
Le succès de la nouvelle constitution ne résidera pas seulement dans sa rédaction, mais dans la détermination de chacun à en respecter l’esprit. Le CNT mérite donc notre soutien dans son effort de rédaction, avec la conscience que la véritable force de ce texte dépendra de notre engagement à le défendre et à le respecter, pour le bien de notre nation tout entière. Bien que comparer notre situation à celle des États-Unis ou de la France puisse sembler problématique, l’objectif n’est pas de prétendre que nos contextes sont identiques, mais de souligner une vérité universelle : la valeur d’une constitution repose avant tout sur l’engagement des hommes à en faire respecter les principes. Les principes fondamentaux de gouvernance, de respect des lois et de responsabilité sont applicables à toutes les sociétés, quelles que soient leur histoire ou leur situation. Il ne s’agit pas de copier un modèle étranger, mais de tirer des leçons pour renforcer notre propre processus de construction nationale.
La Guinée a connu plusieurs constitutions depuis son indépendance : celles de 1958, 1982 (suspendue en 1984), 1991 (suspendue en 2008), 2010, 2020 (suspendue en 2021), et actuellement la charte de la transition guinéenne depuis 2021. Combien de constitutions faudra-t-il encore rédiger avant de comprendre que ce ne sont pas les textes qui garantissent notre avenir, mais notre volonté collective de les respecter ? Ne sommes-nous pas à un tournant où la véritable question n’est plus de rédiger un autre document, mais de forger un véritable pacte avec notre avenir, un engagement inébranlable envers les générations futures ?
Ousmane Boh KABA