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Le partage de biens entre les héritiers est un problème auquel plusieurs familles restent confrontées. Que dit la loi à ce sujet? Comment procéder à un partage équitable? Qui ont le droit à l’héritage? Qu’elle est la part de chacun? Ces questions sont abordées en détail par le juriste-consultant Kalil Camara.
Guinee360 : Quelle est la loi qui régit la succession en Guinée?
Kalil Camara : C’est le Code civil guinéen de 2019 qui régit la question de la succession en Guinée. La succession porte sur l’ensemble des biens, des droits, des actions et des obligations du défunt à la date de son décès.
Qu’est-ce qui garantit l’héritage aux héritiers au regard de la loi?
Pour que les personnes soient habilitées à succéder, il leur faut un jugement d’hérédité rendu par le tribunal du ressort du dernier domicile du défunt. Tous les héritiers doivent y figurer, car ce jugement détermine les héritiers. La loi prévoit qu’après le décès, le conseil de famille doit se réunir pour saisir le tribunal afin d’établir ce jugement.
A quand intervient la loi dans le partage de l’héritage?
La loi intervient lorsque les dispositions prévues en la matière ne sont pas respectées ou s’il n’y a pas d’entente entre les héritiers. Sinon, le défunt peut disposer de ses biens par libéralités ou par testament comme il le souhaiterait. Mais il faut comprendre que la loi réserve une part d’héritage aux héritiers les plus proches, c’est-à-dire aux personnes ayant la vocation héréditaire. Cette part est appelée la réserve héréditaire. Quelle que soit la liberté du défunt, (c’est-à-dire celui à qui la succession est ouverte), il ne peut porter atteinte à cette part garantie par la loi à ses héritiers. La réserve héréditaire globale, au sens de l’article 710 du Code civil, est de 2/3 de la masse successorale, le dernier tiers constitue la quotité disponible.
Le partage de l’héritage intervient quand?
Après avoir calculé l’actif et le passif de la succession (les dettes représentant le passif, et les droits, actions, créances et biens restants représentant l’actif), les deux tiers de ce calcul sont réservés aux héritiers protégés par la loi. Le défunt (c’est-à-dire celui à qui la succession est ouverte), peut disposer comme bon lui semble, la part appelée quotité disponible par donation entre vifs ou par testament.
Et si le défunt n’a pas laissé un testament?
Si le défunt n’a pas laissé de testament, la succession se fait selon les règles légales. À ce niveau, il est important de déterminer la qualité pour succéder. Au regard de l’article 663 de la même loi susvisée, pour succéder, il faut exister à l’instant de l’ouverture de de la succession ou, ayant déjà été conçu, né viable. Autrement dit, avoir la qualité de successible, l’héritier déjà né ou conçu mais qui naît pas viable, n’a pas droit à la succession.
Dans quelle condition un héritier est privé de son droit à la succession?
La loi pose aussi des situations d’indignité qui privent une personne, bien qu’elle soit héritière, de son droit à la succession. Ainsi, la loi prévoit que celui qui a été condamné pour avoir tenté de donner la mort à celui auquel il doit succéder peut être privé de la succession. Il en est de même pour celui condamné pour les coups et blessures volontaires ayant donné la mort sans intention de la donner, le faux témoignage dans une procédure criminelle visant le défunt. Cependant, il y a une exception : si la personne à qui la succession est ouverte pardonne à l’héritier dans l’une de ces situations, la loi lui accorde la qualité de successible.
Qu’est-ce qui ouvre la succession?
Selon l’article 658 du code civil, les successions s’ouvrent par la mort. Il y a aussi des cas d’absence et de disparition prévus à l’article 15 de la même loi. Dans le premier cas, une personne est éloignée de son domicile pendant une longue période sans donner de nouvelles est considérée comme absente, mais sans qu’il soit établi qu’elle est décédée. Pour le second, le disparu, par exemple lors d’un naufrage où le corps n’est pas retrouvé, il est difficile d’établir qu’il est décédé. À l’article 662, il est indiqué que la succession s’ouvre au dernier domicile du défunt, c’est-à-dire au domicile où le décès est survenu. Et c’est le tribunal compétent de cette localité qui est chargé de se prononcer sur la succession.
Qui sont ceux-là qui ont droit à la succession?
La loi prévoit les différents ordres de succession et définit les personnes ayant la vocation héréditaire. Au terme de l’article 666 du Code civil, ont vocation héréditaire, les personnes qui, par le mariage ou la parenté, se trouvent être les plus proches du défunt auquel ils ont survécu. Les personnes visées par cette disposition sont en cinq ordre :
1-les enfants et leurs descendants ;
2-Les père et mère ; les frères et sœurs et les descendants de ces derniers ;
3-Les ascendants autres que les père et mère ;
4-Les collatéraux autres que les frères et soeurs et les descendants de ces derniers;
5-Le conjoint survivant.
Chaque ordre d’héritiers exclut les suivants, sauf le conjoint survivant, le père et la mère. Ce qui veut dire que le défunt ait laissé des enfants ou non, ses père et mère et le conjoint survivant ont toujours leur part dans la succession. Même en présence de parents.
Comment s’effectue le partage?
Le conjoint survivant a droit à 1/8 de la succession. En concours avec les descendants du défunt, les père et mère ont droit au 1/6 de la succession. Faute de descendants, ils ont droit à 1/3. A l’absence de descendants et de conjoint survivant, chacun des père et mère a droit à un 1/4. Et la moitié restante est pour les frères et sœurs du défunt.
Les enfants sont au premier degré. Ils sont égaux devant la loi. Ils succèdent sans distinction de sexe ni progéniture. Ils excluent tous les autres, sauf les père et mère et le conjoint survivant du défunt. La loi prévoit aussi la représentation. Si le défunt a laissé des descendants mais un est prédécédé, les enfants de ce dernier défunt viennent en concours avec les oncles. Si l’enfant décédé avait plusieurs enfants, c’est uniquement la part réservée à leur auteur qui sera partagée entre eux.
Si le défunt n’a laissé ni postérité, ni conjoint survivant, ni frère, ni soeur, ni descendant d’eux, la succession se divise par moitié entre les ascendants de la ligne paternelle et les ascendants de la ligne maternelle. Lorsque les père et mère d’une personne décédée sans postérité, ni conjoint survivant, lui ont survécu, si elle a laissé des frères, soeurs ou des descendants d’eux, la succession se divise en deux portions égales dont la moitié seulement est déférée au père et à la mère, qui la partagent entre eux également. L’autre moitié appartient aux frères, sœurs ou descendants d’eux. Dans le même cas, si le père ou la mère est précédé, sa portion s’ajoute à la moitié des frères et sœurs. Si le défunt n’a pas laissé d’enfant, ni père et mère, ni conjoint survivant, ses frères et sœurs sont appelés à la succession à l’exclusion des autres ascendants et collatéraux.
Il est important de noter que chaque ordre exclut l’ordre suivant, sauf pour les pères et mères et le conjoint survivant qui viennent en concours avec les descendants.
Est-ce-que un enfant né hors mariage peut hériter son père?
Concernant les enfants naturels (nés hors mariage), s’ils sont reconnus par leur père, ils ont le même droit que les enfants légitimes dans l’héritage. Par ailleurs, les enfants incestueux sont exclus de la succession dans le Code civil. Ils n’ont droit qu’aux subsides, c’est-à-dire aux frais d’entretien, de nourriture, d’éducation, etc.
Une femme qui est decedée avant son mari a-t-elle droit à la succession?
Une veuve ayant laissé derrière elle des enfants de son mari n’a plus droit à l’héritage. Ces enfants peuvent uniquement revendiquer leur part dans la succession. Si une femme n’a pas eu d’enfants mais que sa coépouse en a, ces deux femmes partagent une part commune de 1/8 de la succession.
Un enfant adopté a-t-il aussi droit à la succession?
Il existe deux formes : l’adoption simple et l’adoption plénière. Dans le cas de l’adoption simple, l’adopté continue à appartenir à ses parents biologiques et garde le nom et prénom qui lui ont été attribués. Dans le cas de l’adoption plénière, l’enfant change de noms et cesse d’appartenir à ses parents d’origine pour appartenir à la famille adoptive. La loi prévoit qu’il ( enfant adopté plénièrement) a les mêmes droits que les enfants légitimes de l’adoptant.
Que dit la loi sur la concession familiale?
La loi stipule également que la concession familiale est inaliénable. L’aliénation, en droit, est le transfert de propriété, par exemple d’un bien meuble immeuble, par donation ou vente. La loi interdit la vente de la concession familiale. En aucun cas, elle ne peut faire l’objet d’une vente. Il faut aborder cette question sous deux aspects : d’une part, si le père de famille est vivant, ses héritiers peuvent s’opposer à la vente de la concession et même saisir le tribunal. La vente n’est autorisée que si l’environnement est menaçant pour l’intérêt de la famille ou pour un retour au berceau (par exemple, si vous vivez à Conakry et souhaitez vous installer à l’intérieur du pays, vous pouvez vendre pour vous réinstaller). Si un enfant décide de quitter la concession familiale, le principe est nul ne peut être contraint dans l’indivision, les autres héritiers peuvent lui verser le montant correspondant à sa part et il doit quitter la concession familiale après avoir reçu sa part.
L’article Kalil Camara, juriste : “Les enfants nés hors mariage peuvent hériter si…” est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.