Hydrocarbures : la Guinée veut rattraper le temps perdu 

il y a 3 heures 16
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Le gouvernement guinéen veut insuffler un nouveau souffle à son secteur des hydrocarbures. Pour poser les bases d’une politique nationale ambitieuse, une table ronde a été lancée à Conakry sous le thème : « Leçons du passé, ambitions pour demain : vers une nouvelle dynamique des hydrocarbures ». Objectif : diagnostiquer, planifier et impulser. Cette rencontre, ouverte ce 18 juin par le Premier ministre, se poursuivra jusqu’au 20 juin prochain.

Un secteur sous-exploité, un potentiel immense

Composé de trois segments – l’amont (exploration, recherche, production), le midstream (transport, stockage) et l’aval (raffinage, distribution) – le secteur guinéen des hydrocarbures demeure embryonnaire. La recherche pétrolière, amorcée dans les années 1970, n’a abouti qu’à trois forages en cinquante ans, un chiffre dérisoire au regard du potentiel géologique du pays.

Pourtant, la Guinée partage le même bassin sédimentaire que la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie et la Guinée-Bissau, des pays qui, pour certains, sont déjà producteurs de pétrole. Le bassin offshore guinéen, vaste de 93 000 km², possède 42 000 km de sismique 2D et 15 600 km² de sismique 3D, des données précieuses mais encore sous-exploitées.

 « Ce secteur a trop longtemps été dans l’ombre. Il conditionne notre souveraineté et notre avenir », martèle Abdoul Rahim Barry, de la Direction nationale des hydrocarbures.

C’est dans un contexte critique que cette table ronde est convoquée : l’unique dépôt pétrolier du pays, situé à Conakry, a été détruit par un incendie en décembre 2023. Résultat : un déficit de stockage qui met à mal l’approvisionnement d’un pays dont la consommation journalière de carburant dépasse les 3 000 m³.

Dans un pays où le segment midstream est pratiquement inexistant, et où le réseau logistique est vulnérable, la sécurisation de l’approvisionnement en carburant devient un enjeu vital. À cela s’ajoute la nécessité de promouvoir des combustibles de cuisson propres, comme le gaz butane (GPL), encore très peu utilisé (7% des ménages à Conakry).

Trois priorités pour une refondation

Face à l’urgence, le ministère en charge des hydrocarbures a défini trois axes prioritaires pour son plan d’action 2025 :

1. Augmentation de la capacité de stockage nationale ;

2. Renforcement du transport des produits pétroliers ;

3. Promotion du GPL dans les foyers guinéens.

 « Nous avons besoin d’une politique claire et pérenne, en cohérence avec notre engagement pour la transition énergétique », a déclaré le ministre des Mines et de la Géologie, Bouna Sylla, en ouverture des travaux.

Une dynamique impulsée par le programme Simandou 2040

Cette initiative s’inscrit dans le cadre plus large de Simandou 2040, un programme de développement socio-économique mis en place par le gouvernement guinéen sous la houlette du président Mamadi Doumbouya. Pour le ministre Bouna Sylla, cette table ronde incarne la volonté ferme de faire du secteur des hydrocarbures un pilier de l’économie nationale, à l’instar du secteur minier qui a longtemps accaparé l’attention et les investissements.

 « La Guinée a pris du retard sur le pétrole. Il faut rattraper ce retard, écouter les experts, mobiliser les partenaires, et surtout accélérer », a souligné le Premier ministre Amadou Oury Bah, tout en annonçant l’objectif d’une capacité de production solaire de 1,3 GW d’ici 2026.

Une table ronde aux allures de déclic

Pendant trois jours, des experts nationaux et internationaux, des investisseurs, des représentants de la société civile et des partenaires techniques et financiers échangeront sur le potentiel pétrolier guinéen, les opportunités d’investissement, les mécanismes de financement innovants, ainsi que sur les fondations d’un cadre réglementaire structuré et équitable.

Objectif : poser les jalons d’une politique énergétique souveraine, tenant compte des enjeux climatiques, économiques et géostratégiques.

« Ce n’est pas un événement de plus, c’est un point d’inflexion. Le moment de tracer ensemble un cap clair », insiste Abdoul Rahim Barry.

Un pari sur l’avenir

Ce réveil énergétique marque un changement de paradigme pour la Guinée. Un pays qui aspire à se doter d’une véritable souveraineté énergétique, capable de soutenir la transformation locale de ses richesses minières, d’améliorer le quotidien de ses citoyens, et de s’inscrire durablement dans la lutte contre le changement climatique.

La table ronde des hydrocarbures pourrait bien être le coup d’envoi d’un nouveau chapitre, celui d’une Guinée qui regarde résolument vers l’avenir… avec l’ambition d’exploiter pleinement ses ressources enfouies.

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