CRIEF : le dossier Zenab Nabaya, Tibou Kamara et Cie en examen devant la chambre spéciale de contrôle de l’instruction

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Le dossier ministère public et l’Etat guinéen contre 3 anciens ministres sous Alpa Condé, à savoir Zénab Dramé, alias Zénab Nabaya, Ismaël Dioubaté, Tibou Kamara, et Eveline Folla Mansaré revient à la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Le dossier a été jugé ce lundi, 18 mars 2024, en appel devant la chambre spéciale de contrôle de l’instruction de la CRIEF, représentée par le président Alhassane Mabinty CAMARA, assisté d’Aboubacar CONTE et d’Oumar Doumbouya. Les 4 prévenus sont poursuivis devant la CRIEF pour des faits de détournement de deniers publics, blanchiment des capitaux, corruption d’agents publics et complicité. L’audience s’est tenue en présence des avocats de la partie civile et de la défense, à l’absence des prévenus, a constaté sur place Guineematin.com à travers ses reporters.

Les débats ont porté sur l’appel contre l’ordonnance numéro 313, en date du 1er novembre 2023, portant non-lieu partiel, et renvoi d’une part, en faveur de Ismaël Dioubaté et de Tibou Kamara, (anciens ministres du Budget et du Commerce, respectivement) ; et de l’autre, de renvoi devant la chambre de jugement de Zenab Dramé, ancienne ministre de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, et Eveline Folla Mansaré.

A l’ouverture des débats, la Cour a d’abord ordonné la lecture du rapport synthèse sur les faits allégués dans la présente procédure avant de donner la parole aux parties pour avis sur l’appel et leurs prétentions respectives. Dans sa lecture du rapport-synthèse, le conseiller Aboubacar Conté a rappelé entre le contenu d’un article de presse ayant ébruité l’affaire et a attiré l’attention de l’Etat guinéen et des autorités judiciaires à s’en saisir.

S’agissant de l’origine des infractions articulées contre les prévenus, le rapport synthèse indique qu’il « ressort de l’examen des pièces de la procédure, notamment de l’extrait d’un article de presse que dans le cadre de l’organisation des examens nationaux de l’année 2020, Zenab Dramé, alias Nabaya, a réussi à faire décaisser sur le compte du trésor public un montant de 43 milliards 483 millions 406 mille francs guinéens. Soit une surfacturation de 65% du montant réel des dépenses. Il ressort également de la même pièce que Zenab Nabaya, en complicité avec le ministre d’alors, monsieur Ismaël Dioubaté, a bénéficié d’un paiement de 35 milliards 857 millions 433 mille 923 GNF pour l’équipement des centres professionnels des préfectures de Kankan, Kouroussa, Kérouané Siguiri et N’Zérékoré. Il ressort également de la même source, que l’incendie de la pharmacie centrale du 16 juin 2017, un montant de 10 milliards avait décaissé par dame Zenab Dramé, à l’époque DAF au Ministère de la santé. Et dans les mêmes circonstances, courant années 2014-2028, alors DAF au Ministère de l’Agriculture, elle a fait un décaissement, sans justification, d’un montant de 56 milliards de francs guinéens. Un autre d’un milliard 582 millions 780 mille 800 francs guinéens au Ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, dans le cadre de la lutte contre l’épidémie Coronavirus, pour permettre l’ouverture des classes, au mois de juin 2020. Ensuite, un montant de 15 milliards de francs guinéens devant servir les primes de séparation au département de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle ».

Au terme de l’examen des faits dans cette affaire, la chambre de l’instruction a rendu une ordonnance de renvoi en date du 1er novembre 2023 portant non-lieu partiel et de renvoi. Contre laquelle les parties au procès ont fait appel devant la chambre de jugement. A cet appel, s’ajoute une introduction de requêtes aux fins d’annulation de certains actes comme l’ordonnance de soit-communiqué au procureur.

A l’audience d’aujourd’hui, devant le juge Alhassane Mabinty Camara, aussitôt que les débats ont été ouverts, la défense a pris la parole pour solliciter la jonction des procédures que sont d’une part l’appel contre l’ordonnance numéro 313 en date du 1er novembre 2023 portant non-lieu partiel et renvoi, et d’autre part, les requêtes aux fins d’annulation de certains actes comme l’ordonnance de soit-communiqué au procureur.

Dans la foulée Me Moussa Diallo un des avocats de la défense a sollicité de la Cour un renvoi du dossier ne serait-ce qu’à huitaine afin de lui permettre de prendre connaissance des requêtes introduites par la défense. Finalement la Cour y a accédé et renvoyé l’affaire au 25 mars prochain pour ce motif et la suite des débats.

Au sortir de la salle, la partie civile représentée à cette audience par l’agent judiciaire de l’Etat, est revenu avec beaucoup plus de détails sur les faits et procédures.

Me Bernard Saa Dissi Milimouno, avocat

« Après l’instruction préparatoire, la décision qui était rendue, c’est une ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi. Dans cette décision, monsieur Tibou Kamara a bénéficié du non-lieu, monsieur Ismaël Dioubaté a bénéficié du non-lieu, madame Zenab Dramé et madame Eveline Folla Mansaré ont également bénéficié du non-lieu pour certaines infractions. Mais elles ont été renvoyées, en ce qui concerne madame Zenab Dramé, pour détournement de deniers publics et madame Eveline Folla Mansaré, pour complicité. Contre cette décision, l’agent judiciaire de l’État a fait appel. J’entendais l’autre dire que c’est le ministère public qui a fait appel, mais non ! Il s’agit bel et bien de l’agent judiciaire de l’État qui a fait appel. Nous avons fait appel, premièrement, parce que nous ne sommes pas d’accord que monsieur Tibou Kamara et monsieur Ismaël Dioubaté aient bénéficié du non-lieu dans ce dossier. Nous ferons toutes les démonstrations prouvant qu’il y a des charges suffisantes à leur encontre. Deuxièmement, nous avons fait appel parce que nous ne sommes pas aussi d’accord que madame Zenab Dramé et Eveline Folla Mansaré bénéficient du non-lieu en ce qui concerne ces infractions dont le blanchiment de capitaux, la corruption d’agents publics. Maintenant en ce qui concerne leur renvoi pour les faits de détournement de deniers publics. Là aussi, on n’est pas d’accord. Nous ne sommes pas d’accord en quoi ? Parce que les deux personnes ont été envoyées uniquement pour un montant sur lequel il y a une confusion parce que dans le raisonnement, le juge dit qu’il a des charges suffisantes à leur encontre pour des faits de détournement et complicité de détournement d’un montant de 28 milliards de francs guinéens. Mais dans le dispositif, le renvoi qu’il a prononcé c’est pour un montant de 29 milliards 582 millions 780 000 francs guinéens, et mieux, dans le même raisonnement, le juge avait indiqué qu’il y avait des charges suffisantes à l’encontre des deux dames pour détournement d’un autre montant à hauteur de 15 milliards 90 millions et quelques. Mais dans le dispositif, les deux n’ont pas été renvoyés pour ce montant. Or, il est de principe que lorsque le juge d’instruction estime qu’il y a des charges suffisantes à l’encontre d’une personne inculpée, il doit prononcer le renvoi. Donc c’est pour cette raison que l’agent judiciaire de l’État a fait appel. Nous pensons que dans les jours à venir, les débats vont avoir lieu sur le dossier pour que chacune des parties donne sa position avec les détails et les moyens pour soutenir ces prétentions », a expliqué Me Bernard Saa Dissi Millimouno.

Me Dina Sampil qui a pris la parole au nom de ses confrères de la défense, soutient que les prévenues, inculpées sont renvoyées devant la chambre de jugement pour des faits de détournement de deniers publics, blanchiment de capitaux et de complicité portant désormais non pas sur un montant de 200 milliards de francs guinéens, mais sur un montant de 28 milliards.

Me Dina Sampil, avocat

« Je précise que l’ordonnance de renvoi n’a retenu que 28 milliards au lieu de 200 milliards GNF. Et la différence-là qu’est-ce qu’on en a fait ? Est-ce que c’était une exagération expresse et volontaire pour nuire à notre cliente ou alors c’étaient des affirmations simples. Nous allons examiner devant la chambre spéciale est-ce que les 28 milliards finalement retenus sont également fondés ? Il se trouve que dans l’ordonnance qui renvoie ma cliente devant la chambre de jugement a fait abstraction de ses passages au ministère de la Pêche et au ministère de la Santé en tant que DAF, pour se concentrer uniquement au niveau du Ministère de l’Enseignement technique. Et là aussi, on attribue les 28 milliards GNF comme frais d’organisation des examens de sortie de l’année 2020 qui se sont tenus dans les meilleures conditions et ayant abouti à de meilleurs résultats », a dit Me Dina Sampil, membre du collectif des avocats de la défense dans cette affaire.

 Mamadou Laafa Sow et Hassanatou Bah pour Guineematin.com

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