CEDEAO: la détermination innocente de Tinubu face à une réalité hostile

il y a 10 mois 96
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Les pays francophones devraient encore attendre. Et pourtant, le principe en vigueur leur donnait le privilège de la fonction. Mais ils en sont privés par le manque de leadership confirmé et l’inexistence d’un choix dénué de toute contestation. Dans l’espace francophone de la région, les chefs d’Etat sont connivents et sont en outre pour la plupart aux antipodes des principes démocratiques qu’ils devraient prôner et imposer dans l’espace sous régional. Le Niger et le Bénin s’étaient manifestés sans y parvenir, car ne satisfaisant pas tous les critères pour relever le défi dans une sous-région en ébullition, tant dans le domaine de la gouvernance que dans le celui sécuritaire.

C’est alors chez les Anglophones, qui devraient pourtant attendre la prochaine fois, qu’on a trouvé le successeur. Le Nigéria est ainsi récompensé. Son nouveau Président, installé sur son trône il y a à peine un mois, devient le Président en exercice de la CEDEAO. Comme pour dire qu’il y en n’avait pas mieux que lui, malgré son inexpérience à conduire les destinées d’une organisation d’une telle dimension.
Tinubu est donc plébiscité. Pour ses premiers pas, il fait exactement comme ce qu’il a fait dans son pays, après son élection.

Au Nigéria, il a tenu promesse en initiant de grandes réformes, notamment dans le domaine économique, au risque d’une éventuelle instabilité qui pouvait déstabiliser son pouvoir. Malgré tout, il y a tenu et a réussi là où son prédécesseur a tremblé. C’était fondamentalement l’arrêt de la subvention du pétrole en vue de faire une économie estimée à des milliards de dollars. En retour, les prix ont flambée pour lui, peu importe, pourvu que sa décision soit appliquée.

A sa désignation, ce dimanche, à Bissau, pour succéder à son homologue Embalo, président volontariste mais en manque de stratégies, de moyens et de grande réputation, Tinubu a fait ce qu’il a l’habitude de faire depuis qu’il est président dans son pays. Percer l’abcès. Dire ce qu’il pense et agir en conséquence.

Ça n’a pas été facile pour lui, ça ne le sera non plus dans ses nouvelles fonctions.

A cet effet, l’ancien homme d’affaires soupçonné de petits arrangements à l’époque, dénonce avec fracas, l’irruption des militaires sur la scène politique. Donc, il a dans son viseur des putschistes : militaires et civils. Ces derniers sont subtils. Ils traficotent la constitution pour se maintenir aussi longtemps au pouvoir en violation de l’alternance consacrée au nom de laquelle ils ont pu accéder au pouvoir.

C’est facile de dénoncer, mais difficile de combattre ce phénomène qui est une gangrène pour la démocratie, même quand on s’appelle le Nigeria. Même quand on est le plus grand pays de l’espace, le plus peuplé et le plus puissant économiquement.
Dans ce combat, s’il doit être cohérent, Tinubu aura sur son chemin plus de la moitié de ses pairs. Les attitudes et les comportements antidémocratiques de ces derniers , font d’eux des potentielles cibles à abattre. Deriere leurs visages de démocrates, se cache une attitude autoritaire. Les libertés fondamentales sont violées, la justice instrumentalisée et la tentation du maintien au pouvoir, irresistible. De Ouattara à Macky Sall en passant par Talon et Faure Gnassingbné, c’est du même au pareil, sauf à des exceptions près. L’éventail de combat devient donc trop grand pour espérer un succès de l’initiative .

Pour cela, le nouveau Président en exercice doit hiérarchiser ces cibles , procéder méthodiquement pour glaner des résultats attendus par les populations. Placer les Chefs d’Etat autoritaires, à la limite dictateurs, au bas de l’échelle. Cela lui permettra de s’appuyer sur eux dans le but d’en finir avec les cas urgents. Ces cas urgents, c’est ceux de la Guinée, du Mali et du Burkina. De cette urgence, la Guinée pourrait être aussi la priorité. Car contrairement aux deux autres, l’horizon est encore trop sombre dans le pays géré par le colonel Mamadi Doumbouya chez qui, le retour à l’ordre constitutionnel paraît être le cadet des soucis.

Par dessus tout, le nouveau Président un atout. Fort de la puissance de son pays , de sa légitimité et de son aura personnelle, il pourrait faire bouger les lignes. Il faut juste espérer que la France ne vienne pas gâcher le plan ainsi établi et la volonté clairement exprimée, avec ses agissements dictés non pas par les valeurs démocratiques, mais plutôt par des intérêts économiques et géopolitiques.

Mognouma Cissé

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