Souleymane Youla (ancien international) : « le syli national n’a pas progressé depuis longtemps… »

il y a 10 mois 160
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Dans une interview accordée à notre redaction dont nous vous proposons la dernière partie, Souleymane Youla s’est prononcé sur plusieurs questions. Il a aussi évoqué la sélection nationale qui selon lui n’a pas progressé depuis des ans. D’un autre côté, l’ancien international devenu agent de joueurs a mentionné l’ingratitude des footballeurs guinéens.
Dernière partie de l’interview…

• Que pensez-vous de l’équipe du syli national de Guinée ?

« Le syli national n’a pas progressé depuis longtemps. Les différentes générations qui se sont succédé n’ont jamais dépassé le stade des quarts de finale (à la CAN). Un travail doit être fait pour permettre à notre sélection nationale d’avancer. On a des joueurs aujourd’hui qui jouent régulièrement dans leur club. Mais un club et une équipe nationale font deux, ce n’est vraiment pas la même chose.

En club toute l’année tu es avec tes coéquipiers, vous vous connaissez très bien. Contrairement en sélection vous vous retrouvez au maximum deux semaines et cela c’est s’il y a la CAN par exemple. Si ce sont les éliminatoires ou des matchs amicaux c’est juste 3 à 5 jours de regroupement. C’est vraiment compliqué. C’est pourquoi si tu viens en sélection, tu dois être à 100 %.

Le sélectionneur a besoin des joueurs qui jouent dans leurs clubs titulaires. En tout cas si nous voulons faire une bonne figuration lors de la CAN. »

• Vous insistez souvent sur la mentalité des footballeurs guinéens ? qu’est-ce que vous leur reprocher ?

« La quasi-totalité des joueurs que nous ramenons ici en Europe ne sont pas reconnaissants avec les gens qui sont autour d’eux. Et même celui qui a mis son argent pour le faire sortir du pays. J’en suis témoin puisque j’ai envoyé un nombre incalculable de joueurs en Europe, je peux compter au bout des doigts ceux qui ont été vraiment reconnaissants à mon égard, c’est vraiment décourageant.

C’est l’ingratitude qui les caractérise, cela est une vérité. Il ne faut pas se voiler la face.

Si tu parviens à envoyer un certain nombre de joueurs et que tu ne trouves pas un résultat escompté c’est vraiment décevant. Là, il va falloir dire stop

Dès qu’il foule le sol d’un pays européen, ils ne font pas le nécessaire pour progresser. Ce qui les préoccupent ce sont les réseaux sociaux et autres… »

• Quels conseils avez-vous à leur donner ?

« Il faut que les joueurs guinéens sachent d’abord que le plus important c’est de signer, jouer au football, gagner sa vie et celle de sa famille tranquillement.

Les footballeurs guinéens doivent se mettre au travail et oublier les réseaux sociaux. Le secret dans la réussite du football c’est le travail.

Le championnat guinéen n’est pas au niveau. Aucun club européen n’a signé un joueur directement issu du championnat. Tu es obligé de passer par des étapes d’essais pour que tu sois recruté. Et cela aussi n’est pas souvent évident que tu réussisses, la plupart d’entre eux sont recalés. On dit souvent que Kaba diawara ne prend pas les joueurs évoluant dans le championnat guinéen parce que y’ a pas de niveau c’est bien la vérité. Il va prendre qui ? pour jouer à la place de qui ? Nous guinéens nous aimons nous mentir mais moi je ne mentirai pas, je ne dis pas les choses pour me faire plaire à qui que ce soit. Je suis dans ce milieu depuis tant d’années, j’ai été professionnel pendant 20 ans. J’observe et je fais mes analyses. C’est tout…»

• Vous qui êtes de l’ancienne génération pensez-vous avoir réussi votre pari ?

« Nous à notre époque, quand on est arrivé en Europe, on avait vraiment faim. Il fallait se faire valoir pour se mettre en évidence. Nous savons que nous sommes issues de familles pauvres.

On a compris très tôt que c’est à travers le football que nous allons réussir. Et ce que nous avons fait.

Mais la nouvelle génération aime la facilité et cela ne va pas les aider et c’est la vérité. C’est le travail qui paye. J’ai fait venir des joueurs ici en Europe, ils sont là et ne jouent pas. Ils ne sont même pas dans des clubs. C’est une peine perdue pour eux. »

• Pouvez-vous nous dire combien de jeunes guinéens vous avez envoyé en Europe ? et dans quelle condition vous les avez recrutés ?

« Je ne connais pas le nombre. Ils sont nombreux. Les jeunes que j’ai pris en Guinée pour les envoyer ici n’avaient presque pas de salaire. Je les engage dans des clubs ils ont 5 à 7 mille euros tu convertis cela en francs guinéens c’est des millions, dès qu’ils aperçoivent la somme ils disent que leurs vies est faite. Il arrête de travailler. C’est là qu’il se trompe. C’est en ce moment maintenant qu’il faut redoubler d’ardeur. Je ne peux vous cacher je suis tellement déçu des joueurs guinéens. C’est pourquoi depuis un bon moment je ne prends plus des footballeurs guinéens. Je préfère aller dans d’autres pays africains pour chercher des joueurs.

Récemment j’étais au Nigeria pour une détection. J’ai pu sélectionner 6 joueurs que j’ai envoyé en Europe, ils sont en train en ce moment de faire leurs essais. »

• Si vous recrutez un joueur lors d’une détection, qui s’occupe de la procédure administrative jusqu’au niveau du club qui doit accueillir le joueur ?

« Quand je vois un joueur qui m’intéresse, c’est moi qui m’occupe de son billet de tous les dossiers. Ensuite je fais la proposition au club, si le club approuve le joueur, il viendra faire son essai. Tout le long de ce processus c’est le club en question qui s’occupe de l’hébergement, de la restauration et tout ce qui rentre en ligne de compte jusqu’à la fin. S’il est retenu à l’issue de son essai alors il signe le contrat avec le club.

Tout ce que je fais pour les joueurs guinéens je ne demande rien au retour. Si le joueur signe le contrat j’ai ma commission qui s’élève à 10% de son salaire que le club va me verser.

Maintenant s’il y a un transfert du même joueur pour un autre club c’est là en ce moment que je gagne ma part. Depuis que j’ai commencé ce métier, aucun joueur ne peut lever le petit doigt pour dire qu’il m’a payé pour que l’envoi en Europe dans un club jamais. »

• Que faites-vous aujourd’hui pour nouer des partenariats avec certains clubs européens et ceux Guinéens. ?

« Je pense le faire mais je suis déçu, vraiment déçu. Je vous raconte une anecdote….

Quand j’ai signé à Lokeren en Belgique, on a noué un partenariat avec le satellite de Guinée. Avec ce partenariat qui a commencé a porté fruit on n’a recruté pas mal de joueurs guinéens dont entre autres sambegou Bangoura, Ibrahima Sory conté Latoré, Abdoul Karim Sylla, Alimou Diallo entre autres…. Tous ces joueurs sont arrivés en Europe grâce à moi. Quand j’ai signé en Belgique j’ai exigé à ce que mon club de Lokeren signe une sorte de partenariat avec un club guinéen. Cela a été possible grâce à feu Benoit Camara.

Mais quand les choses ont commencé à marcher, ils ont oublié que c’est grâce à moi que ce partenariat a été effectif. Et après tout était géré par Benoit Camara. Je n’ai jamais été associé à quoi que ce soit. La dernière fois c’est quand le projet a commencé après je ne savais rien de ce qui se passait.

Moi j’ai quitté le satellite d’Abidjan, et j’ai demandé à ce qu’il y est aussi un club qui s’appelle satellite en Guinée. C’est ainsi que cela a été effectif. Et tous les joueurs qui sont arrivés en Belgique à l’époque ont tous prouvé de quoi ils sont capables. C’est d’ailleurs ses joueurs-là qui ont formé l’ossature du syli national a cette période. »

• Est-ce qu’alors vous avez ciblé des académies en Guinée avec lesquelles vous comptez travailler ?

« Justement depuis le cas satellite, j’ai décidé de faire face aux académies, c’est le cas de cette académie qu’on appelle haut niveau qui vient de naître. Je suis en train en ce moment de chercher un bon partenariat pour cette structure. Le projet est en bonne voie. Bientôt vous en aurez des nouvelles. Désormais si je veux des joueurs chez nous en Guinée je vais dans les académies. Je ne prends plus ceux qui jouent le championnat, par manque de niveau, de mentalité et surtout de reconnaissance.

Il y a du talent dans les académies et c’est mieux structurer même s’il y a un petit quelque chose qui manque mais il y a quand même de la rigueur dans le travail et il y a le minimum de sérieux et de suivi. »

Entretien réalisé par ALSENY BALDE pour Africasport

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