Flambée des prix des poulets importés sur le marché : les opérateurs économiques et les autorités du ministère du commerce se rejettent la balle

il y a 4 heures 21
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Un kilo de cuisse de poulet se vend désormais à 30 000francs au lieu de 25.000 francs, le foie, qui autrefois était vendu à 30 000, s’échange aujourd’hui entre 35 000 et 40 000 francs. Le carton de poulet se négocie en ce moment, entre 290 000 et 300 000GNF alors que le carton de cuisses quant à lui se vend, entre 225 000 et 230 000GN. Quant au foie il se monnaye, entre 600 000 et 660 000, le carton de 20kilos

C’est ce qui nous a été donné de constater ces temps ci, sur les marchés de Conakry. Une crise silencieuse qui affaiblit le panier de la ménagère.

Et pourtant, le protocole d’accord signé le 8 juillet dernier, fixant le prix plafond des denrées de première nécessité, a fixé le prix du carton de poulet à 280 000 et celui de la cuisse de poulet à 200 000. Cette flambée des prix serait due, selon les commerçants, au retard des bateaux au quai et à la rareté des produits surgelés, dans les chambres froides autres frigos

Les opérateurs économiques, regroupés au sein du Collectif National des Importateurs et distributeurs de produits congelés, informés, ont fait cas, dans une correspondance adressée à la Chambre de Commerce, de cette pénurie réelle et leur incapacité à maintenir les prix plafonds fixés dans le protocole d’accord du 8 juillet 2025.

« La consommation journalière dépasse les 10 conteneurs, or aujourd’hui, nous n’en recevons même pas cinq. Certains fournisseurs habituels, qui envoyaient 100 conteneurs, n’en expédient plus que 5 ou 10. Donc, il y a pénurie », reconnaissent-ils.

Rappelons que le protocole du 8 juillet a fixé les prix plafond à 200 000 le carton de cuisses de poulet, 280 000 GNF pour la poule entière, pour les distributeurs à Conakry. Les prix devenus d’ailleurs irréalistes, selon les importateurs. Puisque à les entendre, le prix d’achat à l’international de la volaille entière est passé de 1 900 $ à 2 400 $, Celui des cuisses est monté de 2 100 $ à 2 475 $ avec l’augmentation du fret maritime de plus de 2 000 $ par conteneur, y compris le refus de certaines compagnies d’acheminer des conteneurs vers Conakry, à cause de la congestion portuaire chronique.

Le secrétaire général du collectif, Mansa Mouramani Keïta, confirme que la congestion du port est un problème majeur du retard d’approvisionnement, mais aussi de la hausse des prix. « Ce qu’on recevait en 45 jours, met aujourd’hui plus de 4 mois à arriver. Le port est saturé, les navires ne trouvent plus de place, et cela provoque une hausse mécanique des prix, à cause des frais de congestion qui ont augmenté les prix de 1000 à 2000 dollars par conteneur »

Selon les importateurs, la plupart des navires refusent les conteneurs à destination de la Guinée.  » Quand les bateaux viennent parfois, remplis de conteneurs, ils sont obligés de repartir, parce que lorsqu’ils durent longtemps en rade, ils consomment trop de carburant, ils prennent du temps, alors qu’ils ont les marchandises d’autres pays. Donc ils vont préférer, aller d’abord, déposer celles-ci, ou bien ils prennent les marchandises, destination Guinée, pour aller les déposer, par exemple, au Maroc, ou même en Gambie, en attendant d’avoir un signal de la Guinée. Les compagnies payent aussi dans ces ports et tout ça se répercute sur la facture de l’importateur », dira-t-il, avant de continuer : « en plus du retard, les importateurs doivent payer des frais de branchement, de stationnement, et même des factures d’électricité, dépassant les 100 millions de francs mensuels pour maintenir les produits au frais.

Chaque jour de retard, c’est un million deux cent mille par conteneur. En dix jours, on perd près de 12 millions. C’est le consommateur final qui paie au bout. Et quand tu reçois enfin le produit après ce périple, des charges d’électricité s’imposent pour le stockage.

Pour la consommation du courant, ce qu’on paye par mois pour les quatre salles, va au-delà de 100millions GNF », explique le secrétaire général du collectif des importateurs.

Pour éviter une crise totale, le CONID-PEC appelle l’État à prendre ses responsabilités, notamment : la réduction des impôts et les quittances liés aux importations, l’allégement des frais de port et d’électricité, Et surtout, la révision des prix plafonds, à la lumière de la conjoncture actuelle. « On ne peut pas chercher 5 mille francs sur le carton, pendant que l’État a 55mille francs sur le même carton et vouloir que les prix ne s’augmentent pas. Ce n’est pas soutenable pour les opérateurs », déclare un membre du collectif.

Autre cause évoquée par le responsable de CONID-PEC, c’est l’instabilité de la devise. « Les devises ne sont pas stables. L’euro par exemple que les gens utilisent beaucoup, pour payer ces denrées, s’achetait à 10 000, 10 100, puis 10 200. Aujourd’hui, on l’achète à 10 600 dans les banques. Et sur les marchés parallèles, à 10 705 francs guinéens. Donc quand ton premier investissement est revu à la hausse, comment le prix du produit final peut-il rester stable » ?

Les opérateurs économiques pointent aussi leur doigt accusateur sur les comportements spéculatifs de certains commerçants qui, profitant de la rareté, vendent à des prix excessifs, en l’absence de réelle concurrence. « On a souvent eu à gérer des cas comme ça. Lorsqu’ils sentent que personne n’a le produit, à part eux seuls, ils augmentent », affirme-t-il.

Du côté des autorités, on assure qu’il n’y a pas de rupture de stock, mais plutôt une forte demande. Selon Mohamed Traoré, le directeur du commerce intérieur et de la concurrence, « je tiens à rassurer qu’il n’y a pas de rupture de stock, il y a quand même une quantité importante qui ravitaille le marché. Sauf que les prochaines commandes à venir, doivent être rapidement prises en compte, pour régulariser les prix, afin que ça n’aille pas dans tous les sens. Il évoque en outre, les spéculations sur le foie et rassure les consommateurs : « le prix du foie n’est pas encore plafonné. Nous sommes dans une démarche de rationalisme qui consiste à intégrer les produits, au fur et à mesure. L’objectif est d’encadrer tous les prix. Mais pour l’heure, ça demande beaucoup de moyens et d’efforts. Nous voulons d’abord mettre l’effort sur les produits de grande consommation. C’est notamment le riz, l’huile, la farine. Dès lors, que nous arrivons à maîtriser cela, puisque des challenges existent, nous allons progressivement intégrer d’autres produits tel que le foie, parce qu’on commence à comprendre que les gens s’y intéressent. »

Il accuse par ailleurs une série de facteurs nationaux et internationaux, tels l’inflation mondiale sur les produits carnés, importés en provenance du Brésil, des perturbations logistiques dues à la congestion du port de Conakry et les difficultés d’accès aux conteneurs frigorifiques pendant la saison des pluies. « Le port de Conakry est sous pression. Le quai frigorifique ne peut plus contenir tous les conteneurs destinés au pays. Résultat, les délais de déchargement s’allongent, les rotations de camions ralentissent, et tout cela impacte l’approvisionnement du marché », explique Mohamed Traoré.

Quelles solutions pour sortir de ce cercle vicieux ?

Le protocole signé en juillet prévoyait déjà une clause de révision, en cas de changement de la conjoncture internationale. Les acteurs économiques estiment donc qu’il est temps de l’appliquer. « Cette clause laissait entendre que les prix ne sont pas figés. S’ils ont changé à l’international, ils doivent l’être ici aussi. Il est donc temps qu’on puisse procéder à cette révision ».

L’État, par la voix du directeur du commerce, se dit ouvert à une révision progressive des prix, en fonction des données économiques. Des discussions sont en cours avec la Chambre de Commerce et l’Association des Importateurs. « On travaille d’abord pour la disponibilité, comme vous avez constaté. Parce que, mieux vaut un marché ravitaillé, qu’un marché en rupture de stock. Je le dis souvent, tant que les prix sont justes, même quand ils sont élevés, parfois c’est lié à la conjoncture mondiale, on ne peut pas faire grand-chose, mais nous travaillons sur tout ce que l’État peut consentir, pour soulager le panier de la ménagère», assure Mohamed Traoré.

Mais pour les acteurs du secteur, le temps presse. Sans mesures rapides, la Guinée pourrait se retrouver dans une crise d’approvisionnement encore plus grave, avec un impact direct sur le panier de la ménagère.

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