Crise à la Feguifoot : “C’est l’application des textes qui pose problème”, selon Thierno Saïdou Diakité

il y a 1 semaine 77
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

Dans cet entretien accordé à Guinée360, le consultant sportif Thierno Saïdou Diakité revient sur la crise qui secoue la Fédération guinéenne de football (Feguifoot). Pour lui, c’est la mauvaise interprétation et la non-application des textes qui sont à l’origine des dysfonctionnements. Il déplore également le manque d’infrastructures sportives dans le pays, qu’il considère comme l’un des principaux facteurs des contre-performances des équipes nationales.

Guinée360 : Le football guinéen traverse une période d’instabilité depuis plusieurs années. En tant que spécialiste, quel est, selon vous, le véritable problème ?

Thierno Saïdou Diakité : C’est effectivement la question principale, fondamentale même. À mon humble avis, il s’agit d’un problème d’interprétation et d’application des textes. Est-ce que vous comprenez ? Pour rappel, la dernière normalisation, intervenue sous l’égide de la FIFA, est survenue à cause d’une incompréhension dans l’interprétation des textes entre la commission électorale, la commission d’éthique et le bureau exécutif. Est-ce que vous comprenez ? Ce dysfonctionnement a conduit la FIFA à mettre en place un comité de normalisation (CONOR), qui a géré les affaires du football national pendant deux ans. Est-ce que vous comprenez ? À notre grande surprise, malgré la mise en place du CONOR, les amendements statutaires validés par la FIFA et les efforts engagés, on se retrouve aujourd’hui dans une situation identique. Comme l’a dit quelqu’un récemment, c’est un retour à la case départ. Pour moi, c’est bien l’application et l’interprétation des textes qui posent problème.

Le comité de normalisation avait justement pour mission de résoudre ces dysfonctionnements. À votre avis, pourquoi n’a-t-on pas réussi à stabiliser la situation après son passage ?

 À mon avis, le CONOR, avec l’appui de la FIFA et de la CAF, a rempli sa mission. Il devait gérer les affaires courantes du football, remédier aux dysfonctionnements constatés et organiser l’élection d’un nouveau comité exécutif. Les statuts ont été amendés et adoptés en Assemblée générale extraordinaire. Ces modifications ont été validées par la FIFA. La grande innovation, c’est qu’on est passé d’un mode de scrutin basé sur les candidatures individuelles à une élection par listes. Le comité exécutif actuel a donc été mis en place en janvier 2024 sur cette base. Malheureusement, des divergences sont apparues au sein du comité exécutif sur l’interprétation des textes. Des récriminations ont été formulées contre le président Bouba Sampil, et portées devant la commission d’éthique. Le président a refusé de comparaître, arguant que certaines dispositions du code d’éthique n’étaient pas en conformité avec celui de la FIFA. D’où le clash. Un des vice-présidents a alors déposé une motion de révocation, qui a été adoptée lors d’une réunion ordinaire du comité exécutif. Certains membres ont ainsi décidé la révocation du président.

Bouba Sampil était pourtant perçu comme une chance de renouveau pour le football guinéen. Peut-on parler d’échec de sa gestion ?

 Lorsqu’un bureau est mis en place, il devient responsable de la gestion de la discipline. Or, nous avons connu plusieurs contre-performances, qui sont imputables à cette équipe dirigeante. Donc oui, elle porte la responsabilité des résultats des équipes nationales. Si on évalue globalement le bilan de la gestion de Bouba Sampil, il n’est pas du tout reluisant. Nous sommes quasiment éliminés de la CAN 2025 prévue au Maroc, et nos chances de qualification à la Coupe du monde 2026 sont compromises : à quatre journées de la fin, nous sommes cinquièmes du groupe, ce qui rend la tâche très difficile. À part l’équipe locale qui a réussi à se qualifier pour une phase finale prévue en août, la saison a été globalement décevante.

Est-ce que Bouba Sampil est seul responsable de la situation actuelle ?

 Il y a eu un désaccord sur le fonctionnement de la commission d’éthique. Bouba Sampil s’y est opposé en avançant que certaines dispositions du code d’éthique local n’étaient pas conformes à celui de la FIFA. Lors de la conférence de presse où il s’est retrouvé seul, c’était déjà un signe visible du malaise au sein du bureau exécutif. Vous savez, dans une équipe, même si l’on ne s’entend pas, par solidarité, les autres membres auraient dû être présents. Mais ils ont préféré boycotter, ce qui révélait déjà une fracture interne. Les événements des jours suivants ont confirmé cette crise profonde.

 Quelle est la part de responsabilité du ministère des Sports dans cette crise ?

Sur le plan réglementaire, la fédération dispose d’une délégation de pouvoirs accordée par le ministère, ce qui lui confère une certaine autonomie. Le ministère n’est donc pas responsable de la gestion quotidienne de la fédération. Son rôle est d’accompagner et d’encadrer les fédérations, mais pas de s’immiscer dans leur fonctionnement interne. En revanche, ce qu’on peut reprocher au ministère — et à l’État en général —, c’est le manque criant d’infrastructures sportives. C’est pour cela que, récemment, le ministre a sollicité l’appui de la FIFA pour résoudre la crise. Le gouvernement ne peut intervenir directement, car la fédération est censée être indépendante.

Le manque d’infrastructures peut-il expliquer les contre-performances des équipes guinéennes ?

Absolument, c’est un facteur déterminant. Jouer à domicile ou à l’extérieur change tout. Le public est souvent considéré comme le 12e homme. Si l’équipe nationale avait pu disputer ses matchs à Conakry, elle aurait bénéficié du soutien du public, ce qui aurait pu faire la différence. En plus, jouer à l’extérieur coûte très cher au budget national, et prive l’équipe de cet appui crucial.

 En attendant la prochaine Assemblée générale, la Feguifoot traverse une période de transition. Quelles pourraient en être les conséquences sur le football guinéen ?

 Selon les textes, c’est le vice-président le plus âgé, en l’occurrence Sourel Doumbouya, qui assure l’intérim. Mais comme la FIFA est attendue à Conakry dans les prochains jours, nous verrons quelles mesures seront prises pour sortir le football guinéen de cette crise de manière honorable.

 La révocation de Bouba Sampil est-elle définitive ? Quel scénario est envisageable ?

 On ne peut pas encore dire que la page Bouba Sampil est tournée. Il a annoncé qu’il allait introduire un recours auprès du Tribunal arbitral du sport (TAS) pour contester sa révocation. Donc, la décision reste provisoire.

 Ce recours a-t-il une chance d’aboutir ?

Cela dépendra des arguments qu’il présentera au TAS. Attendons de voir la suite.

Avez-vous des recommandations à formuler pour sortir durablement de cette crise ?
Ce serait prétentieux de ma part de formuler des recommandations, mais je peux exprimer un souhait : que le fair-play prime dans les discussions à venir. La mission de la FIFA écoutera toutes les parties prenantes. J’espère que l’intérêt supérieur du football guinéen prévaudra sur les ambitions personnelles. Car au final, ce sont l’image et la crédibilité du pays qui sont ternies lorsque de telles crises surviennent.

L’article Crise à la Feguifoot : “C’est l’application des textes qui pose problème”, selon Thierno Saïdou Diakité est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.

Lire l'article en entier