Brouillage des ondes de Djoma FM : « le grand soupçon, c’est l’État », dit Aboubacar Condé

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Depuis vendredi dernier, les réseaux sociaux sont bloqués et les fréquences de certaines radios privées sont brouillées sur le territoire guinéen. La radio Djoma Fm fait partie de ces stations victimes de ce brouillage qui suscite une vague d’indignations au sein de l’opinion publique et dans la sphère de la presse guinéenne.

Dans un entretien accordé à Guineematin.com hier, mercredi 29 novembre 2023, Aboubacar Condé, le directeur de l’information de Djoma média, a pointé un doigt accusateur sur l’Etat guinéen.

Décryptage !

Guineematin.com : Depuis quelques jours, votre radio, Djoma FM, est victime de brouillage de ses ondes. Dites-nous comment vous avez constaté cette situation ?

Aboubacar Condé : « Personnellement, je l’ai constaté le dimanche à partir de 21 heures quand je quittais à un rendez-vous pour la maison. Je m’étais dit est-ce que ce n’est pas une coupure de courant, puisqu’actuellement Conakry a renoué avec les coupures d’électricité. Le lendemain matin, c’est-à-dire le lundi, en venant au travail, je constate que la même chose perdure. J’essaie d’aller sur FIM, je constate la même chose. Je continue sur les autres fréquences, je constate que ça émet convenablement. Soudain, je prends mon téléphone pour appeler le directeur général, Kalil Oularé. Dès qu’il m’a décroché, il dit : ce que tu constates, c’est la même chose chez moi aussi. II dit qu’on est victime de brouillage. Depuis ce jour, la situation perdure. On a essayé de comprendre, mais jusqu’à présent silence radio du côté des autorités ».

Guineematin.com : Depuis lors, est-ce que vous avez tenté de saisir les associations de presse ou porter plainte devant quelconque autorité pour en savoir plus ? 

Aboubacar Condé : Comme vous le savez, les responsables de ces deux médias (FIM FM et Djoma FM) ont été reçus hier, plus le bureau de l’URTELGUI, par la HAC. Les explications ont été données à la HAC qui, à son tour, nous a appris qu’une mission de la HAC a été dépêchée auprès de l’ARPT afin de comprendre le problème. Selon la HAC, l’ARPT leur a fait comprendre qu’elle ne sait pas d’où vient le problème, mais néanmoins qu’une équipe est sur pied pour en savoir plus. Une explication qui nous a laissé sur notre faim, parce qu’à la limite, c’est révoltant. Parce que la seule structure qui a les compétences, les moyens de brouiller une fréquence, c’est l’ARPT. D’ailleurs, c’est à elle que les fréquences appartiennent. Donc, tel problème ne peut pas intervenir, alors que l’autorité a les moyens en 30 minutes, selon les spécialistes, pour détecter le problème. On ne peut pas croire à cela, c’est juste une explication de diversion. Vous-mêmes, votre média (Guineematin.com) a été victime de cela, il a fallu des pressions pour qu’un beau matin qu’on nous dise que la situation s’est normalisée. Et si l’ARPT dit qu’elle ne sait pas, c’est encore plus grave. Ça veut dire qu’elle n’a pas la capacité de contrôler le cyber espace guinéen, ce qui n’est pas vrai. Maintenant, c’est pour les raisons politiques ? on ne sait pas. Est-ce qu’ils veulent nous mettre sous cloche ? on ne sait pas. Déjà, les journalistes qui sont syndiqués ici au niveau du SPPG (syndicat des professionnels de la presse de Guinée) ont attiré l’attention du syndicat par rapport à la menace de leur emploi. Là-dessus, le SPPG a fait une déclaration. Le Directeur général du groupe étant membre de l’URTELGUI a saisi ses pairs pour que, de manière concertée, des actions soient entreprises allant dans ce sens. Le DG vient de m’apprendre qu’une réunion est prévue aujourd’hui entre les différentes associations de presse pour qu’on mette un terme à ce qu’on est en train de vivre et que plus jamais ça en Guinée ».

Guineematin.com : Alors depuis le début de cette situation, comment se passe le service quand on sait que vous n’êtes plus suivis ?

Aboubacar Condé, journaliste, directeur de l’information de la Radio Djoma

 

Aboubacar Condé : « Le contenu du programme n’a pas changé, nous avons maintenu les programmes habituels contrairement à nos confrères de FIM qui, parfois essaient d’éteindre. Nous, nous avons maintenu le programme, parce que nous estimons que la faute n’est pas de nous, nos équipements n’ont aucun problème. Mais, dès qu’on commence une émission, surtout les émissions de grande écoute, il y a beaucoup de messages qui nous parviennent pour signaler les difficultés qu’ils ont. Donc, ça a forcément un impact négatif sur notre fonctionnement habituel, sans compter que nous avons des annonceurs qui commencent déjà à nous demander quand n’est-il ».

Guineematin.com : Derrière cette situation désastreuse, est-ce que vous soupçonnez une main noire venant de qui que soit ? 

Aboubacar Condé : « Le grand soupçon, c’est l’État. L’État est le premier à être dénoncé, parce que pour nous l’ARPT ne peut pas faire subir une telle atrocité aux médias si derrière il n’y a pas une volonté. Cette volonté, on ne sait d’où elle vient. Mais, le silence qu’observe les autorités au plus haut niveau ne peut pas nous amener à les dédouaner ».

Guineematin.com : Pour finir, quelle message avez-vous à lancer à la corporation ? 

Aboubacar Condé : « Aux médias, je leur dirai qu’hier c’était Guineematin.com et aujourd’hui c’est Djoma et FIM. Demain ça peut être un autre média. Je demande donc à la corporation de s’unir. Parce que dans un système démocratique, le rôle de la presse est incontournable. Et l’autre appel que je voudrais lancer, c’est à l’endroit des centrales syndicales. Il faut qu’ils se rejoignent à nous dans ce combat ».

Entretien réalisé par Malick DIAKITE pour Guineematin.com 

Tél : 626-66-29-27 

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