Boom des aphrodisiaques à Conakry: les hommes entre enthousiasme d’une virilité recouvrée et risques sanitaires

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Exposés dans des bouteilles, des boîtes ou encore des sachets sur les marchés et autres lieux publics de Conakry, les produits aphrodisiaques rencontrent actuellement un succès croissant. Ces substances censées stimuler le désir et la performance sexuels sont aujourd’hui disponibles sur les marchés et même dans les pharmacies comme des petits pains. On en trouve partout et sous toutes les formes, au point qu’il est difficile de s’y retrouver : en comprimés, en liquide, en poudre, en pommade ou en gélules. Ce marché informel en pleine expansion est prisé par les hommes mais aussi par les femmes. Comment expliquer un tel engouement ? Qui sont les acteurs de ce marché et qui sont les consommateurs ?

Les aphrodisiaques et la quête de performance

Le recours aux produits aphrodisiaques existe depuis la nuit des temps. Depuis l’époque de la mythologie grecque, la virilité masculine est perçue comme très importante. À l’époque, il était même possible d’être condamné par l’Église si l’on n’était pas capable de satisfaire la libido ou les désirs sexuels de son partenaire.

En Guinée, les produits aphrodisiaques deviennent incontournables. Des affiches le long des grandes artères de Conakry, des étals sur les marchés, ils sont omniprésents sous diverses formes et sont consommés pour, dit-on, résoudre des problèmes de couple. Selon les sexologues, 70 % des couples se séparent à cause d’insuffisance érectile. Quant à l’efficacité de ces produits, les spécialistes de la santé restent sceptiques, mais les consommateurs, eux, en raffolent.

À la rencontre des spécialistes

Nous avons rencontré le Dr F. Diaby, naturothérapeute au marché du quartier Matoto. Il traite de nombreuses maladies telles que le diabète, l’hypertension, les hémorroïdes, l’infertilité, l’éjaculation précoce et la faiblesse sexuelle. Après avoir consulté un patient pour des éjaculations précoces, il détecte un trouble digestif appelé colopathie fonctionnelle, qu’il considère comme la cause du problème. Il prescrit un traitement de fond, mais dans l’urgence, il donne un aphrodisiaque coûtant 200.000 francs guinéens en boîte de dix gélules. « On ne peut pas parler de jouissance précoce ; c’est en réalité une éjaculation précoce. En andrologie, il y a un temps requis pour éjaculer, qui est de 4 minutes et 50 secondes. Si l’on est en dessous de ce temps, c’est qu’il y a un problème », explique-t-il.

Pour obtenir un avis plus précis sur les vertus réelles ou supposées des aphrodisiaques, nous avons rencontré le Dr N. C., sexologue guinéen résident à Bruxelles, en vacances à Conakry. Selon lui, des dysfonctionnements érectiles toucheraient 62 % des hommes en Guinée, et la frigidité affecterait près de 80 % des femmes en raison de l’excision. Pour ces personnes souvent désespérées, les aphrodisiaques représentent parfois le seul recours.

Les risques liés aux aphrodisiaques

Le Dr Fousseiny S., expert rencontré à l’hôpital du Camp Samory Touré à Kaloum, affirme que certains aphrodisiaques n’ont aucun effet thérapeutique et que leur efficacité pourrait être psychologique. « Tout est commandé par le cerveau. Par exemple, lorsqu’un homme se trouve en face d’une femme nue, le cerveau ordonne au cœur d’activer le sexe. En quelques secondes, le cœur pompe une grande quantité de sang pour provoquer une érection rigide. C’est ainsi que ça fonctionne », explique-t-il. Il met en garde contre les dangers de la consommation abusive d’aphrodisiaques, dont la plupart ne sont pas réglementés en Guinée. Les conséquences peuvent être graves, allant jusqu’à des chutes de tension mortelles.

Selon le Dr Fousseiny, seuls le gingembre et le Petit Colas sont sans conséquence. Il recommande donc de consulter un médecin avant de prendre d’autres produits, pour des raisons de prudence.

Les femmes aussi consomment des aphrodisiaques

Bien que les hommes soient les plus enclins à utiliser des aphrodisiaques, les femmes y recourent également. À Yimbaya, une jeune femme visite un magasin spécialisé dans la vente de produits aphrodisiaques. Elle se dirige vers un rayon réservé aux femmes, appelé « Secret des femmes », pour y trouver des aphrodisiaques féminins. Ce rayon propose divers produits tels que « femme fontaine », gel collé-serré, reins-doux, rétrécissant, et autres. Pour la tenancière de la boutique, les femmes ont aussi leurs propres problèmes : frigidité, manque d’appétit sexuel dû à l’excision ou au stress et à la fatigue.

Dans sa boutique, toujours fréquentée, on trouve une gamme de produits de sensualité pour augmenter le plaisir, composés de produits locaux mais aussi en provenance de pays voisins comme le Sénégal, le Niger, le Mali, et la Côte d’Ivoire. Elle doit faire face à des préjugés, certains affirmant qu’une femme vendant des produits sexuels pourrait être vue comme une personne ayant des comportements inappropriés. Malgré les critiques, la propriétaire continue son activité, affirmant que malgré les tabous et les jugements, elle est sur le bon chemin.

Pour une meilleure régulation du secteur

Les aphrodisiaques ont encore de beaux jours devant eux, tant pour les femmes que pour les hommes. Qu’ils soient réellement efficaces ou non, qu’ils soient inoffensifs ou potentiellement dangereux, ils continuent à séduire les consommateurs en Guinée. Ce secteur, encore très informel, pourrait un jour mieux s’organiser, offrant des avantages en termes de revenus et d’emplois. Cependant, il est essentiel de mettre en place davantage de règles et de contrôles pour que la recherche de plaisir ne se transforme pas en danger pour la santé.

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