Samuel Kaninda, Transparency : « En matière de lutte contre la corruption, la Guinée…»

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Dans cette interview, Samuel Kaninda, conseiller régional pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre chez Transparency International, explique les résultats de l’Indice de Perception de la Corruption dans le monde en 2023. Il souligne que l’Afrique subsaharienne n’a pas obtenu un score moyen suffisant, avant d’évoquer les points communs entre les pays les plus corrompus. Concernant la Guinée, l’expert soutient que l’efficacité de la lutte contre la corruption doit être renforcée pour être plus significative et capable d’inverser la tendance actuelle. Pour cela, la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF) doit relever le défi de la méfiance de certains acteurs politiques et de la société civile à son égard. Lisez !

Guinee360.com : Transparency International a publié son Indice de perception de la corruption dans le monde en 2023. Que peut-on retenir ?

Samuel Kaninda : De l’Indice de perception de la corruption (IPC) 2023, nous retenons que la lutte contre la corruption du secteur public n’a pas progressé de manière significative dans la plupart des pays. A l’échelle mondiale, le score moyen est de 43 sur 100 et il reste inchangé. Et aussi, plus de deux tiers des pays ont obtenu un score inférieur à 50 sur 100.

Quel est la place de l’Afrique subsaharienne ?

En Afrique subsaharienne, très peu de pays connaissent des améliorations importantes tandis que la majorité de pays stagnent. Le score moyen de la région est de 33 sur 100 et n’a pas changé. Seuls cinq pays obtiennent un score supérieur à 50 sur 100. Ainsi, des actions décisives pour renverser cette tendance demeurent un besoin urgent pour la région.

La Guinée a amélioré son classement d’un point par rapport à 2022 pour obtenir un score de 26 en 2023. Qu’est-ce qui explique ça ?

Si tout pas allant dans la bonne direction est à encourager, cette légère amélioration de la performance de la Guinée doit être soutenue dans le temps et intensifiée pour devenir plus significative et de nature à inverser la tendance actuelle. L’engagement pris par les autorités actuelles de la Guinée de bâtir un état de droit, pilier essentiel pour une lutte contre la corruption efficace, et les premiers signaux envoyés avec des mesures telles que la création de la Cour de répression des infractions économiques et financières ainsi que les actions entamées en vue de récupérer les biens spoliés de l’Etat contribuent certainement à l’amélioration de la perception de la prévention et la lutte contre la corruption du secteur public de la Guinée.

Quel regard portez-vous sur les activités de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) créée par le CNRD?

Je dois avouer que je n’ai pas suivi de très près les activités récentes de la CRIEF. Je sais, cependant, que plusieurs affaires impliquant notamment des dignitaires de l’ancien régime sont actuellement devant la cour et, par ailleurs, depuis sa mise en place, la CRIEF fait l’objet d’une certaine méfiance de la part de ceux et celles qui craignent qu’elle soit instrumentalisée à des fins politiques. Ceci devrait être considéré comme un défi à relever par la CRIEF qui devrait prouver son impartialité les actes posés par elle. Je pense que ceci pourra se constater au niveau des faits.

Qu’est-ce que les pays les moins performants dans le classement ont en commun?

Avec cette édition de l’IPC, Transparency International a mis en exergue la corrélation entre la corruption et la justice, voire l’injustice, parce que les deux (la corruption et la justice) sont étroitement liées dans une relation complexe et inverse. C’est-à-dire là où la justice prévaut, il y a peu de place pour la corruption, mais il est également vrai que là où la corruption prospère, elle déséquilibre la justice. Il ressort donc de notre analyse que les pays les moins performants dans l’IPC obtiennent aussi les scores le plus bas dans l’Indice de l’état de droit qui relève une détérioration globale du fonctionnement des systèmes judiciaires.

Les pays comme le Tchad, le Mali, la Guinée, le Burkina et le Niger sont dans la queue du peloton. Peut-on déduire que les transitions militaires sont propices à la corruption ?

Je ne tirerai pas une telle conclusion de façon hâtive. Ce serait trop simpliste et généralisant parce qu’il y a des éléments de contexte qui différencient chacune des transitions susmentionnées qu’il faudrait prendre en compte dans toute analyse. De surcroit, on ne peut pas établir d’un point de vue factuel que les performances des pays susmentionnés en matière de lutte contre la corruption étaient considérablement différentes avant la survenance des transitions actuelles. D’ailleurs, il faut noter qu’à l’exception du Tchad dont le contexte est assez singulier, l’insécurité et la corruption sont parmi les principales raisons évoquées pour expliquer les motivations des renversements de régime intervenus dans les quatre autres pays. Aussi, les autorités militaires de ces pays ont, dans la plupart des cas, exprimé leur intention de travailler dans le sens de lutter contre la mauvaise gouvernance mais les résultats restent mitigés. Il est toutefois encourageant de noter que, malgré les restrictions de l’espace civique qui s’observent ça et là, les sociétés civiles de ces pays restent mobilisées pour demander des comptes à leurs dirigeants respectifs. En définitive, nous pensons que la responsabilité incombera aux autorités élues au bout de ces transitions d’asseoir davantage une gouvernance véritablement transparente, intègre, redevable et inclusive à tous les niveaux afin d’assurer une stabilité dans leurs pays ainsi que l’atteinte de leurs objectifs de développement respectifs.

Les crises ukrainienne et à Gaza ont elles eu un impact sur la lutte contre la corruption dans le monde ?

Il s’agit ici de crises complexes qui polarisent le globe et que toute personne éprise de paix souhaite voir résolues. Cependant, étant donné que nous n’avons pas mené une étude spécifique sur cette question importante, il m’est difficile d’y répondre.

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