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À Kankan, la capitale de la Haute-Guinée, la pénurie d’essence s’installe dans la durée et pèse lourdement sur le quotidien des habitants. Depuis plusieurs semaines, le carburant est devenu rare dans les stations-service de Kankan. Certaines sont totalement à sec, d’autres fonctionnent à flux très réduit. Conséquence : de longues files d’attente s’étirent le long des routes, tandis que les prix explosent sur le marché noir.
Si les transporteurs et commerçants en subissent déjà les contrecoups, les établissements scolaires ne sont pas épargnés. Retards, absences, perturbations des cours : la crise énergétique se transforme peu à peu en crise éducative.

Au groupe scolaire privé Noumania Sacko, situé dans le quartier Missiran, les élèves sont désormais au bord de l’exaspération. Faute d’essence, enseignants et apprenants peinent à rejoindre l’école. Les cours sont de plus en plus irréguliers, certaines classes fonctionnent à moitié, et la qualité de l’enseignement s’en ressent.
« L’objectif de notre sortie n’est pas de semer la panique, mais de demander la stabilité », explique Moussa Camara, élève de 11e année en sciences experimentales et porte-parole du groupe.
« Ce n’est pas seulement la tristesse d’une école, c’est celle de toute la Haute-Guinée. Nous voulons que nos voix soient entendues. »
Les élèves évoquent une réalité devenue insupportable : des professeurs souvent absents, des retards répétés, et des journées de cours écourtées. « Quand le professeur n’est pas là, les élèves se dispersent. Certains sortent de l’école ou ne reviennent plus », confie Moussa, amer.
Pour ces jeunes, l’éducation est désormais menacée par un problème d’approvisionnement énergétique qui dépasse leur compréhension.
Le litre d’essence, vendu à 25 000 francs guinéens sur le marché informel, est devenu un luxe. Les familles dépensent jusqu’à 175 000 francs par semaine rien que pour le transport de leurs enfants, selon les estimations recueillies auprès des élèves. Une charge insupportable dans une région où le pouvoir d’achat est déjà faible.
« Certains parents envisagent de suspendre la scolarité de leurs enfants s’ils ne peuvent plus payer les frais de transport », s’inquiète un encadreur.
Les motos-taxis, moyen de déplacement le plus utilisé à Kankan, ont doublé leurs tarifs. Le coût du litre d’essence, passé de 12 000 à 25 000 francs, a rendu tout déplacement pénible pour les ménages.
Les élèves dénoncent des pratiques spéculatives
Au-delà du manque d’approvisionnement, plusieurs élèves accusent certains acteurs locaux de spéculation. « L’essence existe, mais certains la stockent pour la revendre plus cher », dénonce Moussa Camara. « Ce sont ces comportements qui aggravent notre souffrance. »
Ce constat alimente la colère dans la ville, où les habitants voient passer chaque jour des camions-citernes sans que la situation ne s’améliore.
Les enseignants à bout de souffle
Interrogé par Mediaguinee.com, Idrissa Sangaré, proviseur du groupe scolaire Noumania Sacko, confirme la gravité de la situation.
« Cette crise dure depuis trop longtemps. Au début, on pensait qu’elle serait passagère, mais elle prend une allure inquiétante », explique-t-il.
« Beaucoup d’enseignants viennent de quartiers éloignés. Sans carburant, ils peinent à se déplacer. D’autres sont contraints de réduire leurs heures ou de rater des cours. Cela perturbe profondément le rythme de l’enseignement. »
Le proviseur souligne également l’incompréhension face à une pénurie qui semble paradoxale :
« Les camions-citernes entrent dans la ville, mais on ne sait pas où va le contenu. Il faut que chacun fasse preuve de citoyenneté et place l’intérêt général au-dessus des intérêts personnels. »
Des revendications claires et urgentes
Les élèves du groupe Noumania Sacko ont résumé leurs attentes en trois points principaux :
1. Assurer un approvisionnement régulier en carburant dans la ville de Kankan ;
2. Faire baisser le prix du litre d’essence pour le rendre accessible aux familles ;
3. Permettre la reprise normale des cours, en mettant en place des mesures temporaires d’accompagnement pour les enseignants et les élèves.
Ils appellent les autorités locales, les distributeurs et les responsables du secteur à agir rapidement. « Nous supplions ceux qui en ont la possibilité de nous aider à retrouver la tranquillité et la stabilité », insiste Moussa Camara.
Une jeunesse déterminée mais pacifique
Face à l’inaction, les élèves envisagent de se mobiliser davantage. « Nous avons d’autres possibilités », avertit Moussa. « Si l’on nous pousse au mur, nous pourrions réagir comme d’autres villes l’ont fait. »
Mais le message se veut avant tout pacifique. « Nous aimons notre région. Nous ne voulons pas dégrader les biens publics. Si nous avons parlé aux médias, c’est pour éviter toute escalade. »
Une crise régionale aux conséquences multiples
La pénurie de carburant à Kankan ne se limite pas au secteur éducatif. Elle affecte le commerce, les transports, et même l’accès aux soins. Les taxis-motos roulent au ralenti, les produits de première nécessité voient leurs prix grimper, et de nombreux travailleurs peinent à rejoindre leurs lieux d’activité.
Selon plusieurs habitants, la Haute-Guinée est aujourd’hui la région la plus durement touchée. Dans certaines localités, comme Kérouané, Mandiana ou Siguiri, la situation serait similaire, voire pire.
Les populations appellent donc à une intervention urgente de l’État pour rétablir la distribution normale et stabiliser le marché du carburant.
En attendant, les élèves de Kankan continuent d’étudier dans la frustration, avec une seule certitude : sans essence, c’est leur avenir qui cale.
Karifa Doumbouya
L’article Kankan : la pénurie d’essence paralyse les cours, les élèves lancent un appel aux autorités est apparu en premier sur Mediaguinee.com.
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il y a 3 heures
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